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Actualités of Mardi, 13 Mars 2018

Source: www.camerounweb.com

Depuis sa cellule, Atangana Mebara lance un message fort à Mebe Ngo’o

Mebe Ngo'o a été limogé le 02 mars dernier Mebe Ngo'o a été limogé le 02 mars dernier

Depuis leur éviction du gouvernement le 02 mars dernier, plusieurs indiscrétions annoncent que les anciens ministres Mebe Ngo’o et Atangana Kouna pourrait subir le même sort que l’ancien Secrétaire général de la Présidence de République. Atangana Mebara.

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Après plusieurs années passées aux services de Paul Biya, l’ex-SGPR s’est retrouvée dans les viseurs de l’Opération Épervier qui l’a conduit derrière les barreaux. Une expérience qu’il a retracée sous forme de conseils à tous les « Eperviables » dans son œuvre « Lettres d’ailleurs: Dévoilements préliminaires d’une Prise de l’« Épervier » du Cameroun ». Extrait…

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D’abord l’environnement physique: comme l’a dit notre bien amusant, (et pour cela sans doute aussi bien-aimé) Ministre de la Communication, ISSA TCHIROMA BAKARY dit ITB, « la prison de Kondengui, ce n’est pas un hôtel cinq étoiles ». Il convient donc de s’y préparer, afin d’atténuer le choc à votre entrée. Aussi, voudrais-je d’abord que, à travers cette sommaire description, vous ayez une petite idée de ce qui vous attend.

Après franchissement du lourd et immense portail de la prison, qui vous sépare de la liberté, vous vous retrouvez dans une grande cour, appelée Cour d’honneur ; je n’ai jamais su pourquoi on l’appelle ainsi. Le sol est tout en béton armé. De part et d’autre de cette cour, se trouvent les bureaux des principaux responsables de la prison centrale de Kondengui.

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À votre droite, en tournant le dos au portail d’entrée, il y a le secrétariat, puis le bureau du Régisseur (c’est le Patron des lieux) ; suivent ensuite le bureau des adjoints aux chefs de service (ils sont deux), le bureau du chef de bureau de la comptabilité-matières ; au fond de cette rangée, il y a une salle, étroite, et généralement occupée par les sous-officiers, appelés intendants. À votre gauche, se trouve d’abord le bureau du Chef du Service de la Discipline et des Activités SocioCulturelles, communément appelé SEDASCE ; c’est un des bureaux les plus confortables de l’Administration, après celui du Régisseur ; viennent ensuite toujours à votre gauche, le bureau du greffe de la prison, puis celui du Chef du Service Administratif et Financier, appelé Chef SAF.

Après le bureau des intendants, il y a une pièce, avec une petite table et un lit de camp, destinée à permettre aux sous-officiers et officiers de se reposer lorsqu’ils sont de permanence. C’est dans cette pièce que vous subissez votre fouille d’entrée, fouille corporelle et de votre baluchon ; et c’est là que l’on vous dit ce qui est interdit et ce qui est permis.

Il me souvient que c’est ici qu’un intendant (M. MEPOUI) m’avait retiré mon jeu de cartes, en me disant que c’était interdit (pourtant il en pilule dans tous les quartiers de la prison). Après cela, vous êtes pris en charge par un ou des gardiens qui vous conduisent dans ce qui deviendra votre nouvelle résidence, votre « quartier » ; le « commandant » de ce quartier est aussi souvent là pour vous accueillir.

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Pour y aller, vous franchissez la « grille », c’est une espèce de check-point où cinq à six gardiens s’occupent de fouiller (fouille corporelle et fouille des paquets et bagages) tous les visiteurs, femmes et hommes, qui entrent en prison, pour rencontrer des parents, pour effectuer des travaux, pour réaliser quelque prestation spirituelle ou matérielle ; c’est aussi le chas par lequel sont autorisés à passer les détenus qui sont convoqués par un responsable de l’Administration. C’est un endroit triste et désagréable à observer.

Après la « grille », vous êtes conduit soit directement dans votre quartier d’affectation, soit dans ce qu’on appelle « la cellule de passage » ; c’est le quartier 4, où sont généralement temporairement affectés tous les détenus en attente d’un transfert définitif dans un quartier approprié. Les détenus VIP passent très rarement par cette cellule de passage. Ils sont dirigés vers l’un des quartiers dits « spéciaux » ; il s’agit des quartiers 7, 11, 12 et 13 bis. Les quartiers 1 et 3 sont des quartiers de standing moyen, pour des détenus de classe moyenne, ou pour ceux qui auraient pu être dans les quartiers spéciaux mais qui sont provisoirement affectés, en attendant plus d’information sur leur cas. Le quartier 2 est réservé aux malades, en particulier aux malades atteints de pathologies contagieuses (tuberculose, maladies de la peau etc.).


Le quartier 5 est destiné aux détenus de sexe féminin. S’agissant de ce quartier, assurez-vous, si vous êtes un homme, que vous n’avez pas sur votre carte d’identité un prénom féminin, car vous pourriez y être affecté à cause de ce prénom, comme cela est arrivé à un médecin, prénommé Thérèse. Il aurait eu une apparence quelque peu efféminée qu’il aurait probablement séjourné quelques minutes dans ce quartier ! Le quartier 6 est celui des condamnés à mort ; oui, il en existe encore !

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Il est bon de savoir que c’est l’un des quartiers, avec le 2 et le 13 (mineurs), qui bénéficient de plus de sollicitude et de soutien de la part des ONG qui interviennent ici. Le quartiers 8 et 9 constituent ce qu’on appelle le KOSOVO ; ce sont les quartiers les plus surpeuplés : outre que ces deux quartiers contiennent plus des 3/4 de la population carcérale de la prison de Kondengui, (entre 2500 et 3000 pour une prison construite pour environ 800 détenus), c’est également dans ces quartiers que vous trouvez ce qu’on appelle des « dormiterre », ceux qui dorment à même le sol, souvent plus nombreux que ceux qui dorment (à deux) sur un lit dans une cellule donnée ; chaque cellule compte ici entre 40 et 80 détenus, condamnés ou en attente de jugement. Dans les autres quartiers (1 et 3), les détenus sont entre 10 et 30 par cellule. Le quartier 10 est réservé aux détenus présentant des troubles mentaux sérieux, occasionnels ou définitifs ; il peut souvent compter entre une et deux dizaines de détenus. Le quartier 13 est celui des mineurs, ceux âgés de moins de 18 ans ; on y trouve de nombreux jeunes enfants de 14 à 16 ans.

En général les détenus ne sont pas autorisés à effectuer des visites d’un quartier à l’autre. Mais à l’occasion d’une manifestation ou d’une cérémonie religieuse, l’accès dans les autres quartiers est aisé. Ne ratez pas l’occasion d’aller voir dans quelles conditions vivent les enfants des hommes ! La seule fois que j’ai pu me rendre aux quartiers des mineurs et au KOSOVO, à l’occasion de la procession de la Fête du Très Saint Sacrement, j’en suis sorti défait, psychologiquement et humainement. Un de mes compagnons n’a pas pu retenir ses larmes.

Je me suis demandé si ceux qui décident de placer des jeunes hommes en détention provisoire savent vraiment à quoi ils destinent ces gens dont certains seront déclarés innocents quelques mois ou années plus tard. Il est difficile de ne pas se rendre compte, après quelques semaines de séjour ici, que le régime de détention des femmes est beaucoup plus sévère que celui des hommes, sans que les raisons en soient claires.

D’abord il n’y a pas de quartier spécial chez les femmes, ce qui fait que les anciens ministres et hauts cadres du secteur public et privé, partagent le même environnement réduit et les mêmes commodités que les détenues ayant des profils culturels, éducatifs et professionnels différents. Ensuite les espaces communs comme la bibliothèque, le parloir des avocats, la cour intérieure leur sont pratiquement interdits.

Les seuls endroits qu’elles peuvent fréquenter en compagnie des hommes, ce sont les lieux de culte, ou les lieux d’entraînement des chorales religieuses. Parfois les plus jeunes sont autorisées à jouer au handball sur la Cour une ou deux fois par semaine. En cas d’accouchement, il est courant de voir la jeune maman revenir le même jour à la prison, avec son bébé, soutenue par une ou deux gardiennes de prison ; heureusement la solidarité des femmes dans ce genre de situation est proverbiale.


Arrivé dans votre quartier, le Commandant et les autres détenus vous accueillent, chacun à sa manière : ceux qui vous connaissent avant se donnent un air de sincère compassion, les autres empruntent l’air peiné. On vous présente alors votre couche, qu’on appelle ici « mandat » ; le mandat réglementaire représente une espèce de boîte de 1m90 de longueur, 90 cm de largeur, 1m de hauteur.

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Vous devez installer rapidement votre matelas, ainsi que vos petits nécessaires de toilette et éventuellement de première urgence médicale. Vos désormais codétenus vous aident à vous installer, en couvrant par exemple votre matelas d’un drap, le vôtre si vous en avez. On vous conseille aussi d’attendre la matinée pour ouvrir votre valisette ou pour défaire votre baluchon. À vrai dire, l’installation s’effectue pratiquement le lendemain matin.

Après votre première nuit, rarement reposante, vous êtes frappés au réveil par les bruits des portes que l’on ouvre, des cris de gens qui se chamaillent, ou des appels d’autres détenus, « les corvéables », ceux qui sont autorisés à sortir de la prison chaque matin pour effectuer des corvées à l’extérieur et qui ne reviennent qu’en fin de journée (il s’agit généralement de détenus en fin de peine).

Ce qui retient le plus votre attention, c’est l’environnement dans lequel vous vous retrouvez et dans lequel vous devez passer vos prochains mois et peut-être prochaines années. Si vous êtes affectés dans l’un des « quartiers spéciaux », vous devez considérer que votre nouvel environnement est de loin bien « meilleur » que celui des autres quartiers ; en réalité, il est seulement moins pire.

Après l’ouverture des bureaux, vous êtes invité, généralement un peu après neuf (9) heures, à remplir les formalités « d’entrée », ou plus officiellement de mise sous écrou. Vous allez d’abord au bureau du greffe de la prison ; on vous pose des questions sur votre identité ; ensuite on vous prend la toise, et on ouvre ainsi votre dossier d’incarcération.

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Puis, après le bureau du greffe, vous devez vous rendre chez le médecin de la prison. Celui-ci vous prendra les paramètres principaux, poids, tension artérielle, pouls ; il vous demandera ensuite si vous suivez un traitement spécial et pour quelle affection. Il vaut mieux, vis-à-vis de ce praticien, être sincère et vrai ; car, en cas d’aggravation de votre état, son avis sera déterminant pour les diligences à entreprendre à votre endroit. Il y a lieu de reconnaître, que le Docteur NDI Francis Norbert, s’est montré jusqu’ici très professionnel avec nous, capable à la fois de discrétion et de grande disponibilité en cas de nécessité.

Entre votre quartier, votre lieu de résidence et les endroits de ces formalités administratives, vous découvrez la prison, sa population, ses dispositions et caractéristiques physiques. Les choses qui vous frappent d’abord, c’est d’une part cette foule de jeunes gens qui vous regardent bizarrement (en tout cas c’est le sentiment que vous avez), d’autre part les odeurs ; toutes sortes d’odeurs, odeurs nauséabondes de toilettes sales, à côté d’odeurs de fritures ou d’aliments que des « majordomes » réchauffent ; odeurs des beignets, odeurs d’individus qui ont pris leur dernière douche quelques semaines auparavant...

Il y a eu un jour, dans notre quartier spécial 7, une bagarre entre un jeune détenu camerounais, André, et un Belge, Philippe, d’un certain âge ; le motif de la bagarre était que le jeune détenu camerounais exigeait de son voisin de lit qu’il se lave, parce que les odeurs qu’il dégageait, après plusieurs jours voire semaines sans douche, l’indisposaient et l’empêchaient de dormir (c’est dire qu’on peut retrouver dans ces quartiers spéciaux, toutes sortes d’individus).

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Mais on découvre quelques jours après, que les odeurs les plus agressives, sont celles des fosses septiques, quand elles sont pleines, et surtout lorsqu’on les vidange. Je n’ai jamais pu imaginer que l’on puisse vidanger une fosse septique à la main. Et pourtant c’est un spectacle courant dans cette prison, de voir des jeunes détenus, torse nu et mains nues, arborant un petit short ou un pantalon délavé tombant souvent sur les fesses, puiser dans le regard de la fosse, avec des ustensiles divers ayant la forme de sceaux, puis déverser le contenu de leurs bolées dans la rigole bétonnée, ouverte, partant des quartiers 1 et 3, et passant devant l’entrée du quartier 5, et derrière le hangar où se trouve la sortie de la rigole, par laquelle se déverse dans la nature, à l’extérieur de l’enceinte de la prison, tout ce qui est vidé dans cette rigole.

Les déchets provenant des fosses sont expurgés vers la sortie par des versements de sceaux d’eau que d’autres détenus puisent dans les réserves d’eau disponibles. Certains de ces jeunes gens, armés de pelles et de brosses à manche dures, sont chargés de pousser vers la sortie les déchets rebelles. La première fois, c’est un spectacle insupportable : ces jeunes gens sans masque, sans aucune protection et obligés de s’acquitter de cette tâche, si dégradante, si inhumaine !

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Après quelques séances de ce spectacle, vous vous surprenez à passer à côté juste en vous couvrant le nez, et en évitant de regarder. Ce sont ces mêmes jeunes, généralement nouvellement arrivés, qui s’occupent aussi de nettoyer, chaque soir, autour de 17 heures, les différents espaces publics de la prison.

Rassurez-vous, pour les quartiers spéciaux, les choses se passent différemment : les détenus font généralement appel aux services de l’un d’entre eux, déjà bien connu, et qui 264 dispose, chez lui, d’une motopompe qu’il met à disposition pour les vidanges, moyennant une contribution aux charges y relatives, carburant pour la motopompe et une petite « motivation » financière pour les détenus devant assister le maître-vidangeur.

Parfois, des responsables d’ONG ou des religieuses menant des activités dans cette prison font aussi appel à ce détenu et à sa motopompe, pour vidanger les fosses des quartiers de malades ou d’autres détenus.