Actualités of Tuesday, 7 October 2025

Source: www.camerounweb.com

Akere Muna et la polémique du ralliement : quand l'opposition s'entre-déchire

Le ralliement d'Akere Muna à Bello Bouba Maïgari, annoncé le 28 septembre, continue de faire des remous dans l'opposition camerounaise. Jeune Afrique révèle les dessous d'une décision qui a provoqué colère et accusations de trahison au sein même de ses anciens soutiens.

Selon des informations exclusives recueillies par Jeune Afrique auprès de plusieurs sources proches des négociations, le ralliement de l'avocat à l'Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP) ne serait pas désintéressé. Akere Muna aurait rejoint Bello Bouba Maïgari en échange d'un hypothétique poste de Premier ministre en cas de victoire.

Une promesse bien plus alléchante que celle du Front pour un salut national au Cameroun (FSNC) d'Issa Tchiroma Bakary, qui n'aurait proposé à l'ancien bâtonnier qu'un simple portefeuille ministériel, toujours selon les révélations de Jeune Afrique. Cette différence d'offres expliquerait le choix final de Muna, malgré ses déclarations publiques sur "les larmes du peuple" et "l'impératif de s'unir".

La décision a provoqué une onde de choc parmi les anciens partisans de Muna. Jeune Afrique a recueilli les réactions indignées de plusieurs figures qui avaient soutenu sa candidature. Prosper Nkou Mvondo, président du parti Univers qui avait investi Akere Muna pour cette présidentielle, n'a pas mâché ses mots en dénonçant son "opportunisme".

"Certains de ses supporters influents se sont même sentis trahis, estimant que l'avocat n'aurait pas dû réduire ainsi les chances d'un anglophone de se faire entendre en première ligne lors de la présidentielle", rapporte Jeune Afrique après avoir interrogé plusieurs cadres anglophones de l'opposition.
Cette défection rappelle un précédent sulfureux. Jeune Afrique rappelle qu'Akere Muna s'était déjà désisté tardivement en 2018, en faveur de Maurice Kamto. Sept ans plus tard, le schéma se répète, alimentant les critiques sur la constance politique de l'avocat et sa capacité à tenir la distance dans une campagne présidentielle.

Au-delà des tractations politiques, Jeune Afrique révèle qu'Akere Muna fait face à de sérieuses menaces dans les zones anglophones. Lors des obsèques de son frère Bernard Muna, il avait échappé à une tentative d'enlèvement orchestrée par des combattants séparatistes de l'Ambazonie. Un épisode qui souligne l'impopularité de l'avocat auprès de certaines franges radicales du mouvement indépendantiste.

Pourtant, Muna n'a pas renoncé à convaincre. Jeune Afrique rapporte qu'il a tenu un meeting à Mbengwi, dans le Nord-Ouest, certes sous forte escorte militaire, pour tenter de rallier les électeurs anglophones à la cause de Bello Bouba Maïgari.

Dans sa stratégie de conquête du vote anglophone, Bello Bouba Maïgari peut compter sur un autre renfort de poids : Seta Caxton Ateki. Jeune Afrique a interrogé un sympathisant de l'opposition qui livre une analyse sans détour : "Quand j'ai appris qu'Ateki Seta Caxton se présentait, j'ai compris que la partie allait être difficile pour tout opposant en zone anglophone. C'est la raison pour laquelle Bello Bouba Maïgari, conseillé par Célestin Bedzigui, a tout fait pour l'avoir à ses côtés."

Figure influente de la société civile anglophone, Ateki s'est bâti une réputation dans la défense des consommateurs et le plaidoyer citoyen. Un ancrage qui lui vaut une certaine estime auprès de la jeunesse anglophone, selon l'analyse de Jeune Afrique. Certains experts jugent son profil capable de séduire au-delà des clivages partisans, notamment dans les zones urbaines où la méfiance envers les partis traditionnels est forte.

Ces ralliements illustrent la fragmentation de l'élite politique anglophone à l'approche du scrutin. Jeune Afrique constate que le vote anglophone reste particulièrement disputé entre trois candidats principaux : Bello Bouba Maïgari avec ses nouvelles recrues, Joshua Osih du Social democratic front qui tente de conserver ses bastions, et Issa Tchiroma Bakary qui mise sur ses accords avec les séparatistes.

Dans cette bataille pour les 1,029 million d'électeurs inscrits dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, les jeux d'alliances et les accusations de trahison pourraient bien décider de l'issue du scrutin. Reste à savoir si les électeurs anglophones suivront les consignes de leurs élites ou choisiront une tout autre voie le 12 octobre.