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Infos Business of Wednesday, 16 December 2015

Source: camernews.com

Endettement: Le Cameroun inquiète le FMI

Alamine Ousmane Mey, ministre des Finances Alamine Ousmane Mey, ministre des Finances

Dans son rapport 2015 cette institution attire l’attention du pays sur l’accroissement de sa dette.
Le Fonds monétaire international (Fmi) vient de publier son rapport annuel 2015 sur les perspectives économiques de la région Afrique. Le volet Afrique sub-saharienne de ce document, dénommé «Faire face à un environnement qui se dégrade», épingle certains pays dont le niveau d’endettement s’est «excessivement» accru au fil des ans.

Le Cameroun fait partie, de l’avis des experts du Fmi, de ce groupe. Une telle sonnette d’alarme avait déjà été tirée dans les précédents rapports. Lors des récentes missions trimestrielles de revue, l’institution financière attirait l’attention du Cameroun sur la «grande propension à l’endettement».
Dans le même document, l’on peut lire que l’économie camerounaise fait preuve de résilience, avec un taux de croissance supérieur à 5% et une inflation qui reste modérée.

L’institution financière internationale justifie cette performance par «une dépendance moins forte par rapport au pétrole comparativement aux autres pays visés producteurs d’or noir. La chute des recettes pétrolières a ainsi été en partie atténuée par l’augmentation des autres recettes». Pour autant, le Cameroun enregistre un déficit public croissant tiré par l’investissement public, qui est essentiellement financé par des ressources génératrices de dette. Dans le même temps, les risques liés à l’insécurité, particulièrement dans la région de l’Extrême-Nord où sévit la secte islamiste Boko Haram depuis plus de deux ans continuent également de dominer l’environnement socioéconomique du pays. Raison pour laquelle le Fmi reste très réservé sur les emprunts obligataires futurs du Cameroun.


Une attitude à laquelle les autorités camerounaises répondent par cette interrogation massive: «Est-ce qu’on n’insiste pas trop sur l’accroissement de la dette et non sur la qualité de la dette ?» Le ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), Louis Paul Motazé, explique que le Cameroun mène de grands investissements qui nécessitent d’importants moyens. «Notre pays ne peut pas se focaliser sur les emprunts concessionnaires qui ne garantissent que des petits crédits, incapables de financer les projets d’envergure. Ainsi, ajoute t-il, le Cameroun va vers des bailleurs qui proposent de gros financements à des taux d’intérêts faibles et à des délais lui permettant aisément de rembourser ses dettes.

De ce fait, le Cameroun va continuer à s’endetter».
Endette de courte échelle
Au cours de la séance de présentation du rapport 2015 du Fmi, le ministre des Finances, Alamine Ousmane Mey a, de son côté, indiqué que «le Cameroun met un accent sur la diversification des guichets. La dette ne vise pas à compromettre l’avenir de nos enfants et petits-fils. Au contraire, elle vise à leur aménager des bonnes conditions de vie demain. En remboursant, on s’assure que les projets qui ont nécessité l’endettement ont tous été réalisés». Une explication qui a fait dire au nouveau représentant du Fmi au Cameroun, Kadima Kalonji, que «Le rapport ne demande pas aux Etats de ne plus s’endetter. Mais de mettre un accent sur les activités moins onéreuses. Aussi de s’assurer de faire des priorités sur les ressources que la dette viendrait à financer afin que les dépenses aient un impact sur la croissance dans un délai raisonnable. Et puisse permettre le remboursement de cette dette».
Au mois de juillet dernier déjà, sur la question et en discussion avec une mission du Fmi, le ministre des Finances reconnaissait que le taux d’endettement du Cameroun plafonne à 22,5% du Pib.

Il tendait donc à relativiser les inquiétudes du Fmi qui, dans son rapport sur les perspectives économiques de l’Afrique, faisait savoir que ladite dette a presque doublé en quatre ans, passant de 15% du Pib à un peu plus de 30%, bien que soutenable. Pour Boriana Yontcheva, alors représentante résidente de cette institution «le stock de la dette du Cameroun ne préoccupe pas vraiment le Fmi. Le Cameroun, comme les autres pays de la région, bénéficie de l’initiative Ppte. En revanche, le Cameroun, comme d’autres pays, doivent gérer de manière modérée leur accès au marché financier».
Sur cette question importante, l’homme politique, économiste et président de Global Rating Services Inc, une agence de notation basée à Wall Street, New York aux Etats-Unis, Célestin Bedzigui, s’ouvrant à votre journal dans un dense entretien, a abordé entre autres, le projet d’émergence du Cameroun. A ce propos, il a été ferme à dire que l’émergence n’est point un slogan.

D’après lui, pour être émergent, «le pays se doit de passer à une étape de production d’un marché essentiellement domestique à une économie aux capacités de production manufacturières et d’un niveau de compétitivité lui permettant d’être présent sur le marché global des produits intermédiaires ou finis. Ceci veut dire qu’il se doit non pas de s’endetter à courte échelle, mais susciter des investissements massifs et lourds».
Dans le même ordre d’idées, l’économiste et ancien conseiller aux affaires économiques de l’ancien président sénégalais Abdoulaye Wade, Shérif Salif Sy, a également exhorté les pays d’Afrique subsaharienne à réorienter leurs choix économiques pour parvenir à l’émergence. Tout en leur demandant de trouver des capitaux pour ce faire, il met en garde contre la reconstitution du stock de la dette.

Sur la même lancée, Shérif Salif Sy appelle à la mise en place en Afrique de véritables sources énergétiques grâce à des réseaux interconnectés. «Il n’est pas possibles d’envisager une industrialisation sans stabilité en matière de fourniture énergétique. Ceci appelle des cadres plus attractifs qui attirent des investissements». On le voit, l’endettement du continent africain à travers certains de ses pays inquiète le monde de l’économie.