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Opinions of Mercredi, 6 Décembre 2017

Auteur: Boris Bertolt

Guerre Ambazonie: les alliés des sécessionistes sont à Yaoundé

Quand il y a un conflit qui se déclenche quelque part ou un crime qui a lieu, la première question que l’on se pose est celle de savoir: qui a intérêt? A qui profite le crime? C’est cette question qui va constituer la trame de l’analyse ou de l’enquête. Dans le cadre de la crise anglophone, qui a intérêt à ne jamais ouvrir un dialogue franc, sincère et républicain sur l’Etat, sur la représentation et sur le vivre ensemble? Qui a intérêt à fracturer l’opinion publique? Qui a intérêt à faire passer y compris les plus modérés pour des extrémistes?

Quand vous posez ces questions, vous découvrez que ce sont ceux qui sont à Yaoundé qui ont intérêt à voir cette crise s’éterniser. Cela leur permet en réalité de ne plus avoir des comptes à rendre d’un point de vue politique, d’utiliser la loi anti-terroriste pour bafouer les libertés publiques et museler complètement toute revendication sociale ayant trait à la gouvernance politique. Tous ceux qui peuvent critiquer l’ordre gouvernant sont susceptibles d’être taxés de soutiens aux sécessionnistes. Sur cette base, la crise anglophone est une épée de Damoclès sur notre démocratie très fragile.

Vous comprenez encore que la crise anglophone pose clairement le problème de la nature de l’Etat qui est aux fondements de la corruption, du caractère autoritaire, de la répression et des injustices au Cameroun. Ceux qui sont à Yaoundé ne peuvent pas vouloir ni la décentralisation et encore moins la fédération parce que cela va réduire le pillage de l’Etat et le contrôle des richesses du peuple.

Qu’est-ce qu’ils font donc? Ils travaillent à radicaliser la contestation afin de légitimer leur qualification de terroristes et imposer la répression. Cela a deux conséquences majeures: les modérés anglophones sont mis en minorité, on les rend invisibles, on donne la voix aux sécessionnistes et au final on a une lecture manichéenne de la situation: d’un côté les bons d’un autres les mauvais. On légitime au sein de la population dominante l’idée du répression au nom de l’Etat et de la souveraineté. Or il s’agit simplement d’un complot de la classe dominante pour conserver ses privilèges le peuple n’est dès lors qu’un instrument.

Dans cette stratégie nauséabonde, les médias jouent un rôle essentiel parce qu’ils permettent de construire l’opinion publique et les représentations autour du conflit et des crimes. On fait dire aux journalistes que dans la zone anglophone il n’y a que des sécessionnistes. Ils relaient et accentuent le manichéisme. Ces mêmes médias s’acharnent sur ceux qui réclament le dialogue en créant un savant amalgame entre fédéralistes et sécessionnistes. Au final ce sont ceux qui tiennent les clés à Yaoundé qui sont gagnants.

Regardez le nombre de journaux contre le SDF. Dans un parlement c’est normal que des députés bloquent des sessions. Tellement l’assemblée nationale a été une caisse de résonance dans ce pays que les camerounais sont surpris des choses qui sont normales ailleurs. Or les intellectuels organiques du pouvoir sont pleinement conscients de l’inculture du peuple et ils le manipule. Regardez ces journaux, analysez les titres vous remarquerez que c’est la même officine qui se cache derrière.