Paul Biya absent, le parti au pouvoir improvise face à la montée de Tchiroma
Exclusive - À six jours du scrutin, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais navigue à vue

L'information révélée par Jeune Afrique est aussi surprenante qu'inquiétante pour le camp présidentiel : à une semaine du scrutin du 12 octobre, Paul Biya n'a toujours pas véritablement lancé sa campagne électorale. Selon nos informations exclusives, sur trois déplacements initialement programmés – Douala, Bertoua et Maroua – seul le meeting de l'Extrême-Nord se maintiendrait encore à l'agenda présidentiel.

Cette absence remarquée du président sortant intervient dans un contexte explosif. Jeune Afrique a pu recueillir les confidences d'un cadre du RDPC qui tente de justifier cette stratégie pour le moins inhabituelle : « Nous avons l'habitude de ce déséquilibre en termes d'image. La réalité n'est pas celle des réseaux sociaux. Le RDPC sait faire campagne sans Paul Biya, qui n'a jamais fait beaucoup de meetings ».


Pourtant, cette posture détachée contraste violemment avec la dynamique observée du côté de l'opposition, notamment autour d'Issa Tchiroma Bakary. Les lieutenants du président sont contraints de sillonner le pays pour compenser l'absence de leur champion, une situation inédite qui traduit un malaise profond au sein de l'appareil du parti au pouvoir.


Comme l'a révélé Jeune Afrique, le secrétaire général du RDPC, Jean Nkuete, multiplie les déplacements. Après l'Ouest, il est attendu à Douala ce 7 octobre, avant de prendre la route de Ngaoundéré et de Garoua. Une tournée marathon qui vise à occuper le terrain déserté par le candidat lui-même.

Le 27 septembre, dans une déclaration rapportée par Jeune Afrique, Jean Nkuete tentait de transformer cette faiblesse en force mystique : Paul Biya serait « l'athlète dont les forces bénies par le Très Haut rendent la dynamique invincible ». Une rhétorique quasi-religieuse qui peine à masquer l'inquiétude réelle des cadres du parti.


Face à la déferlante Tchiroma et aux campagnes actives de Bello Bouba Maïgari, Joshua Osih ou Cabral Libii, Jeune Afrique constate que le RDPC mise tout sur une stratégie digitale autour du slogan « Grandeur et espérance ». Mais cette présence numérique suffira-t-elle à compenser l'absence physique du candidat sur le terrain ?

Selon nos sources au sein de l'opposition, « Tchiroma Bakary est parvenu à imposer un rapport de force, avec les images de ses meetings ». Une analyse que les stratèges du RDPC ne peuvent plus ignorer, malgré leurs déclarations rassurantes.

Jeune Afrique révèle que Paul Biya a récemment regagné Yaoundé après un court séjour en Suisse, et se prépare à tenir son unique grand meeting de campagne à Maroua, ce 7 octobre. Selon le Cameroon Tribune cité par Jeune Afrique, plus de 20 000 militants seraient attendus dans une ville déjà « en effervescence », avec des façades repeintes pour l'occasion.


Ce déplacement dans l'Extrême-Nord, bastion traditionnel du RDPC, sera scruté avec attention. Il devra démontrer que le parti au pouvoir conserve sa capacité de mobilisation, malgré l'incertitude et les doutes alimentés par l'absence prolongée de son candidat ces dernières semaines.

La question demeure : le président sortant peut-il encore gagner une élection sans véritablement la faire campagne ?