Actualités of Saturday, 15 November 2025
Source: www.camerounweb.com
La mécanique secrète de la fraude électorale, révélée par les procès-verbaux fantômes »
Le 12 octobre 2025, les Camerounais ont voté pour élire leur président. Pourtant, entre les bureaux de vote et la proclamation des résultats, une opération de falsification systématique des procès-verbaux (PV) aurait permis à Paul Biya de conserver le pouvoir, malgré des indicateurs initiaux favorables à l’opposition. Grâce à des témoignages exclusifs et à l’analyse de documents obtenus par Jeune Afrique, nous révélons comment des commissions locales, dominées par l’administration, ont transformé des défaites en victoire.
Selon les révélations de Jeune Afrique, des scrutateurs et avocats de l’opposition affirment que les PV originaux, photographiés et transmis par des observateurs le jour du scrutin, ne correspondent pas aux versions officiellement transmises au Conseil constitutionnel. Dans cinq départements clés (Moungo, Lekié, Mfoundi, Lom-et-Djerem, Menoua), les chiffres ont été revus à la hausse pour Paul Biya, tandis que ceux de l’opposition ont été minorés. Par exemple, dans le Moungo, le candidat Pierre Kwemo dénonce la « disparition » de 80 000 voix en sa faveur. Ces écarts, impossibles à contester légalement, soulèvent des questions sur l’intégrité du processus.
Me Emmanuel Simh, vice-président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), explique à Jeune Afrique que les commissions locales de recensement, contrôlées par des représentants de l’État, ont eu 48 heures pour modifier les PV. « Les opposants sont empêchés d’accéder aux preuves, et les magistrats ferment les yeux », confie-t-il. Aucun audit indépendant n’a été autorisé, malgré les demandes répétées.
Les données analysées par Jeune Afrique montrent des anomalies flagrantes : une hausse de 800 % du nombre de votants dans le Nord-Ouest, région anglophone en crise, ou une baisse de 8 % dans l’Extrême-Nord, bastion historique de l’opposition. Ces chiffres, combinés aux témoignages de scrutateurs menacés, dessinent le portrait d’une élection truquée.
Patricia Tomaïno Ndam Njoya, seule candidate à avoir saisi le Conseil constitutionnel, a vu son recours rejeté. « Le système est conçu pour empêcher toute contestation », résume un juriste proche du dossier. Jeune Afrique révèle que les « PV fantômes » – ceux remplacés après le vote – n’ont jamais été confrontés aux originaux, rendant toute preuve irrecevable.
Cette enquête montre comment une fraude organisée a pu prospérer en l’absence de contre-pouvoirs. Alors que Paul Biya a prêté serment le 6 novembre, les preuves accumulées par Jeune Afrique jettent une ombre durable sur sa légitimité.