Actualités of Friday, 24 October 2025

Source: www.camerounweb.com

Clément Atangana : portrait d'un octogénaire à la santé fragile, arbitre controversé du destin du Cameroun

Image illustrative Image illustrative

L'enquête exclusive de Jeune Afrique. À 84 ans, Clément Atangana s'apprête à prononcer le verdict le plus attendu de sa carrière. Le 27 octobre, le président du Conseil constitutionnel camerounais proclamera les résultats de l'élection présidentielle du 12 octobre. Mais derrière cette figure institutionnelle se cache un homme affaibli, aux prises avec de sérieux problèmes de santé que Jeune Afrique est en mesure de révéler. Selon nos informations, ce magistrat hors hiérarchie a "récemment subi une hospitalisation de longue durée en Europe, où il séjourne régulièrement". Une fragilité physique qui contraste avec le poids des responsabilités qui pèsent sur ses épaules.


Les révélations de Jeune Afrique. Depuis l'ouverture des travaux du Conseil le 22 octobre, Atangana a choisi le silence radio. "Le président ne décroche plus son téléphone", révèle notre investigation auprès de sources proches de l'institution. Comme "les dix autres membres de son instance désignés pour un mandat de neuf ans", il s'est coupé du monde extérieur. "Peut-être ce magistrat hors hiérarchie essaie-t-il d'échapper à la pression", analyse Jeune Afrique. Une pression d'autant plus intense qu'il "se sait au centre des attentions", confie une source contactée par notre rédaction.


Ce que Jeune Afrique a découvert : un parcours au service du pouvoir. Le curriculum vitae d'Atangana révèle un homme façonné par le système Biya. Nommé à la tête du Conseil constitutionnel en février 2018 par le président Paul Biya, il "venait alors d'être admis à la retraite", indique Jeune Afrique. Une nomination qui ressemble à une récompense pour services rendus : Atangana était "un ancien président de la Commission nationale de recensement général des votes depuis 1997", tout en exerçant simultanément "comme président de la Chambre administrative de la Cour suprême", des postes stratégiques dans l'architecture électorale camerounaise.


L'investigation de Jeune Afrique : les liens compromettants. Mais c'est sur le plan de l'impartialité que les révélations de Jeune Afrique sont les plus explosives. "L'impartialité des membres du Conseil constitutionnel est mise en doute. Le président est particulièrement visé", note notre enquête. Premier élément à charge découvert par Jeune Afrique : "son épouse est députée du RDPC", le parti au pouvoir. Un conflit d'intérêts manifeste dans un pays où les liens familiaux pèsent lourd dans les décisions politiques.


Les informations exclusives de Jeune Afrique. Mais il y a plus grave encore. "Clément Atangana a lui-même avoué être membre de l'Adenso, une association qui a adressé une déclaration publique appelant le président Paul Biya à briguer un nouveau mandat en octobre 2025", révèle notre investigation. Un aveu qui entre en contradiction frontale avec la loi. Selon les textes que Jeune Afrique a pu consulter, "les membres du Conseil constitutionnel doivent s'abstenir de tout ce qui pourrait compromettre l'indépendance et la dignité de leurs fonctions (...) d'occuper au sein d'un parti ou d'une formation politique, d'une association partisane ou syndicale, tout poste de responsabilité ou de direction et, de façon plus générale, de faire apparaître de quelque manière que ce soit leur appartenance politique ou syndicale".



L'analyse de Jeune Afrique : une voix chevrotante devenue symbole. Au fil des années, Atangana est devenu malgré lui l'incarnation d'une justice électorale aux ordres. "Les adversaires du RDPC ne connaissent que trop bien le verdict 'irrecevable', répété par la voix chevrotante du président Atangana lors des audiences en contentieux électoral", documente Jeune Afrique. Cette voix tremblante, signature sonore de ses décisions, est devenue le symbole d'une institution qui rejette systématiquement les recours de l'opposition. "La jurisprudence du Conseil n'est pas de nature à renforcer sa crédibilité. Les juges rejettent souvent les recours des opposants, ce qui a fini par éroder la confiance du public et des hommes politiques", explique à Jeune Afrique un avocat rompu aux contentieux électoraux.


Ce que Jeune Afrique a mis au jour : un homme prisonnier du système. Malgré les accusations, "la compétence du collège des juges n'est pas remise en cause", reconnaît Jeune Afrique. Atangana possède indéniablement l'expertise technique pour son rôle. Mais c'est précisément ce qui rend sa situation tragique : un juriste compétent, désormais âgé et fragile, dont la légitimité est minée par des liens trop étroits avec le pouvoir et une jurisprudence trop prévisible. "Les critiques pourraient-elles pousser les conseillers à défier le pouvoir ?

Les révélations financières de Jeune Afrique. Les raisons de cette docilité ne sont pas qu'idéologiques. Selon les informations obtenues par Jeune Afrique, Atangana perçoit, comme chaque membre du Conseil, "environ 3 millions de francs CFA nets d'impôts par mois", plus des "primes en numéraire, des avantages en nature dont un véhicule 4×4 renouvelé tous les cinq ans (l'ancien leur revenant en pleine propriété), sans oublier une mutuelle santé". À 84 ans, avec une santé déclinante et des séjours médicaux réguliers en Europe, ces avantages ne sont pas négligeables.


Pourquoi c'est crucial. Comme le révèle Jeune Afrique, Clément Atangana cristallise toutes les critiques contre le Conseil constitutionnel. Le 27 octobre, lorsqu'il proclamera vraisemblablement la victoire de Paul Biya "conformément aux résultats provisoires – et déjà très contestés – compilés par Elecam", sa voix chevrotante ne sera pas seulement celle d'un octogénaire fatigué. Elle sera celle d'un système judiciaire camerounais dont l'indépendance reste, selon notre enquête, largement théorique. Un homme, une voix, un système : le destin de Clément Atangana résume celui d'institutions censées arbitrer mais qui, selon les révélations de Jeune Afrique, ne font qu'entériner.