Actualités of Friday, 20 June 2025

Source: www.camerounweb.com

Avoir des relations : la nouvelle provocation de Bruno Bidjang

La coach blonde reprécise ironiquement l’importance d’avoir des relations. « Avoir des relations ou rien ! Bruno François Bidjang, avec ce discours, notre frère Bruno vient briser nos illusions d’amoureux de l’excellence et met ainsi fin au mythe de la méritocratie », écrit-elle sur sa page Facebook dans une publication que la rédaction de CamerounWeb relaie pour les lecteurs.

L’espoir fait vivre, dit-on. Mais son discours, que je trouve tiré par les cheveux, n’a pas sa place dans un monde que nous voulons bâtir avec une jeunesse avide de changement. Il a raison ! Dans le Cameroun actuel, le népotisme est sans doute la valeur la mieux partagée. Il faut “être quelqu’un”, connaître “un quelqu’un”, qui te dirige vers “un autre quelqu’un”.

Avoir des relations, dans l’imaginaire populaire camerounais, relève presque de l’ésotérisme ou de la sorcellerie. On te demande même en entretien d’embauche sans fioriture : “Qui est ton parrain ?”. Le réseau relationnel, au lieu de rester un levier parmi d’autres, s’est transformé en pilier central de l’ascension sociale. Une dérive perverse qui réduit l’effort individuel à néant.

Il a tort. Car la normalité — la vraie — voudrait que les plus méritants aient accès au saint Graal de la réussite. Dans les pays développés, ton opiniâtreté peut encore être récompensée par un bon emploi. Ce que Bruno Bidjang appelle ici “relation”, là-bas, on l’appelle mentorat.

Si tu veux lancer une entreprise, on t’encourage à te faire accompagner par un mentor, quelqu’un qui a déjà réussi et peut t’orienter vers un objectif clair. Ce n’est pas un passe-droit, mais un accompagnement structurant.

Les “relations”, au Cameroun, dans mon esprit, c’est souvent une bande de gens qui se cooptent entre eux, parfois même dans des cercles douteux, où orgies et privilèges se mêlent aux décisions qui devraient construire une nation.

Un exemple ! Indira Baboke a fait toutes ses études universitaires au Cameroun, jusqu’à son doctorat. Grâce aux relations de son père, elle pouvait se mouvoir librement : faire de la musique, jouer la star, et passer ses examens de médecine sans encombres.

Mais soyons honnêtes : son diplôme aurait sans doute eu plus de valeur s’il avait été international. Nous savons tous que les sciences humaines, la biologie et les sciences sociales sont bien plus développées en Occident qu’en Afrique, et particulièrement au Cameroun.

Dans notre pays, on ne fabrique même pas notre propre paracétamol. On aurait souhaité qu’elle ramène des savoirs utiles pour développer le pays. Mais hélas, dans les nations sérieuses, même le fils du Saint-Père ne peut réussir sans compétence. Là-bas, ta “relation” ne te sera d’aucune utilité si tu n’es pas excellent.

En Europe ou en Amérique et en Asie l’éducation est sacrée. On ne peut pas blaguer avec la compétence, car un citoyen mal éduqué est un danger pour lui-même, pour les autres, et pour la démocratie. Le mérite, là-bas, n’est pas juste un titre. C’est un emblème de l’excellence.

Alors, monsieur Bidjang, votre argumentaire est bancal. Il ne s’applique qu’à votre réalité, où la République n’est plus qu’un cercle élitaire, loin d’une démocratie qui prône la liberté, la justice et le rêve populaire.

Faire des relations la seule monnaie d’échange pour accéder au confort social, spirituel et moral, c’est poser les pierres, et couler le béton, d’une société où les classes sont hermétiques, figées et injustes.

Dans 1984 de George Orwell, il y a trois classes sociales. Le Parti intérieur (2 %) : une élite toute-puissante. Le Parti extérieur (13 %) : une classe moyenne complètement soumise. Les prolétaires (85 %) : méprisés, laissés à eux-mêmes, mais aussi les seuls à pouvoir, un jour, renverser le système. Est-ce ce monde-là que vous voulez léguer à la jeunesse ?