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Actualités of Vendredi, 22 Juin 2018

Source: www.camerounweb.com

Ambazonie: Cabral Libii salue le plan Marshal de Paul Biya, mais...

C’est tout d’abord l’aveu d’un double échec sur le plan politique et stratégique C’est tout d’abord l’aveu d’un double échec sur le plan politique et stratégique

Le plan d’assistance humanitaire d’urgence mis en place par Paul Biya et présenté par le Premier ministre Philemon Yang dans le cadre de la crise qui secoue les deux régions anglophones du pays est diversement apprécié par les principaux acteurs politiques camerounais. La dernière sortie en date est celle du coordonnateur du ‘Mouvement 11 millions de citoyens’ Cabral Libii.
Dans une tribune publiée sur les réseaux sociaux, le plus jeune des candidats déclarés à la présidentielle de 2018 contre le président Paul Biya a tenu à « saluer humainement l’initiative ». Mais Cabral Libii considère la sortie du pouvoir de Yaoundé comme « l’aveu d’un double échec sur le plan politique et stratégique. »

Ci-dessous la tribune de Cabral Libii

D’emblée, le document suscite étonnement et surprise tout d’abord par le sens du détail et de la précision qui se dégagent des informations relatives à la crise «anglophone» contenues en son sein, ensuite par son style empreint de démonstrations et de justifications, peu commun aux instances étatiques qui semblent donner l’impression que le peuple camerounais n’est pas le véritable destinataire de ce document mais plutôt d’autres personnes physiques et morales, enfin par le volontarisme empressé et le branle-bas généralisé qui détonnent avec l’inertie humanitaire observable jusqu’ici et pourtant décriée depuis fort longtemps. A la lecture de ce document, émotions et compassions étreignent le cœur du citoyen lambda soucieux de voir cet épisode douloureux prendre fin. C’est donc le lieu de saluer humainement l’initiative et de formuler l’expectative que contrairement aux habitudes, l’allocation de plus de 12 milliards de FCFA serve effectivement à apaiser la douleur des compatriotes déboussolés. Cependant, au-delà de la fumée du discours et de l’écume des mesures, ce qui transparait de ce texte aux allures de confession, c’est tout d’abord l’aveu d’un double échec sur le plan politique et stratégique.

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Sur le plan politique:

C’est premièrement l’aveu et la reconnaissance d’une politique in absentia, d’une gouvernance crisogène que ce gouvernement pratique non seulement à l’égard des deux Régions sinistrées mais de l’Etat tout entier. C’est ensuite celui de l’échec d’une gouvernance de crise dont l’attentisme, l’excès de confiance, l’insouciance, l’esprit de forteresse, et la politique de l’autruche ont constitué la méthodologie de base pour se muer par la suite en une mécanique de l’assistance autour d’un principe organisateur prédominant : l’urgence. C’est enfin l’aveu d’une politique de l’improvisation articulée sur des solutions magiques et incantatoires dont le caractère évasif et l’imprécision révèlent l’éphémère destinée. On parle d’une périodicité qui correspond curieusement au temps qu’il faut pour être réélu…

Sur le plan stratégique

La rhétorique et la sémantique employées sont symptomatiques des carences relevées plus haut et dont les dérives observables traduisent le statisme d’un état en panne d’innovation qui de manière atavique reproduit les mêmes schémas. On observera donc dans ce document, à la vocation apaisante factice, tout d’abord :

- l’implémentation d’une stratégie blâmable de la contre-attaque doublée d’une rhétorique du complot qui consiste à inscrire l’Etat dans une posture de victime afin de détourner l’attention sur les terroristes étrangers et sécessionnistes alors que ce gouvernement a disposé de trente-six ans pour détecter , prévenir et éviter cette crise ;

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- ensuite la persistance critiquable d’une stratégie du refus caractérisée par les dénégations, la présentation des boucs émissaires, et la diversion des instances étatiques niant toute responsabilité afin de farder la vérité de cette crise qui est étroitement liée à trente-six ans de malgouvernance et de pillage systématique de l’Etat ;

- enfin le déficit de maitrise de l’ingénierie du management des crises dont les maitres mots sont la détection, la prévention, la préparation, la limitation des dégâts, la reconstruction...

Au-delà de la solennité de l’annonce, ce document ne rassure guère quant à la capacité de ce Gouvernement à apporter de véritables réponses aux populations de ces Régions sinistrées et à celles de toutes les Régions abandonnées du Cameroun, qui sont de potentiels foyers de crises. Trois niveaux de considérations confirment cette posture.

Premièrement, ce document au-delà des qualités esthétiques demeure :

- évasif sur les mesures d’encadrement des populations ;

- sur les conditions de recasement ;

- sur la protection des élèves et des enseignants ;

- sur la réparation des dégâts causés par les violences faites aux femmes ; sur les mesures de remédiation à mettre en œuvre s’agissant de l’enrôlement des jeunes dans les groupuscules terroristes ;

- sur l’assistance des familles des soldats tombés sur le champ de bataille et leur encadrement psychologique, afin d’éviter de nouveaux clivages sociaux entre frères d’une même nation.

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Deuxièmement, la persistance dans l’envoi au sein de ces Régions de ceux-là même qui font partie du problème et qui sont membres du Gouvernement.
Troisièmement, le mutisme sur les solutions ultimes de cette crise que sont la bonne gouvernance et une décentralisation effective de l’Etat conférant aux Régions, une autonomie administrative financière et le droit légitime et constitutionnellement reconnu de la gestion des affaires locales que tous les camerounais appellent de leurs vœux.

En ce qui concerne l’assistance humanitaire

Je fais mienne, cette réflexion: l'assistance humilie si, en nourrissant ceux qui souffrent, vous ne semblez occupé que d'étouffer des plaintes qui attristent le séjour d'une ville, ou de conjurer les périls qui en menacent le repos, si elle n'a rien de réciproque, si vous ne portez à vos frères qu'un morceau de pain, un vêtement, une poignée de paille , si vous le mettez dans la nécessité douloureuse pour un cœur bien fait de recevoir sans rendre , elle humilie quand elle prend l'homme par en bas, par les besoins terrestres seulement, quand elle ne prend garde qu'aux souffrances de la chair, au cri de la faim et du froid, à ce qui fait pitié, à ce qu'on assiste jusque chez les bêtes.

En revanche l'assistance devient honorable :

*parce qu'elle peut devenir mutuelle, parce que tout homme qui donne une parole, un avis, une consolation aujourd'hui, peut avoir besoin d'une parole, d'un avis, d'une consolation demain, parce que la main que vous serrez serre la vôtre à son tour ;

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*L'assistance honore quand elle traite le pauvre avec respect, non seulement comme un égal, mais comme un supérieur, puisqu'il souffre ce que peut-être nous ne souffririons pas, et il est dépositaire de la souveraineté ;

*L'assistance honore quand elle prend l'homme par en haut, quand elle s'occupe, premièrement de son âme, de son éducation morale, politique, de tout ce qui l'affranchit de ses passions et d'une partie de ses besoins, de tout ce qui le rend libre, et de tout ce qui peut le rendre grand.

*L'assistance honore quand elle joint au pain qui nourrit la visite qui console, le conseil qui éclaire, le serrement de main qui relève le courage abattu.

Je partage la peine et la douleur des compatriotes en détresse, je condamne avec la dernière énergie tous les actes de violence et de criminalité qui ont cours, j’encourage les forces de l’ordre et de défense, je regrette profondément la dérive guerrière, je m’incline devant les mémoires des disparus de cette crise, j’en appelle au dialogue sur la forme de l’Etat, j’interpelle les camerounais en cette année 2018 à sanctionner l’incurie et l’incompétence dans les urnes, en portant à la tête de l’Etat dans les prochains mois, un homme qui saura mieux protéger l’Etat, le peuple et libérer les énergies.

REACTION DU COORDONNATEUR DU MOUVEMENT 11 MILLIONS DE CITOYENS

Mr Cabral Libii