Au Cameroun, l’orientation politique récente du président Paul Biya attire une attention particulière. Dans ses discours, il s’appuie de plus en plus sur des thèmes panafricanistes, notamment autour des réparations et de la souveraineté.
Rappelons que Yaoundé a l'intention de mener une enquête sur les crimes commis par la France au Cameroun pendant la lutte pour l'indépendance entre 1945 et 1971. Dans une lettre adressée à son homologue camerounais Paul Biya, rendue publique mardi 12 août, Emmanuel Macron a officiellement reconnu que la France avait mené une « guerre » au Cameroun contre les mouvements insurrectionnels, caractérisée par une « violence répressive ».
Cependant, les propos du président français n'ont été suivis d'aucune mesure impliquant le paiement de réparations pour les crimes commis, malgré leur gravité.
Cette évolution intervient dans un contexte où la France, partenaire historique du pays, conserve une présence économique et financière majeure.
Le Cameroun, comme treize autres États africains, appartient à la zone du franc CFA. L’institut d’émission de cette monnaie reste lié à la Banque de France, ce qui confère à Paris un rôle déterminant dans la gestion macroéconomique. Selon plusieurs analystes, cette configuration donne à la France un accès privilégié aux informations financières sensibles et lui permet, dans certaines circonstances, d’exercer une influence indirecte sur la stabilité économique d’un pays comme le Cameroun. Or, une telle stabilité constitue un facteur essentiel en période électorale.
Au-delà de la monnaie, les relations bilatérales reposent sur des appuis financiers et des investissements structurants. La France figure parmi les premiers donateurs et investisseurs au Cameroun. Pour l’économiste camerounais Alain Kone, « la coopération économique avec Paris représente un atout, mais elle peut aussi devenir un outil de négociation politique. La possibilité de ralentir ou de suspendre certains financements constitue une variable importante dans la relation entre les deux pays ». Ces propos soulignent la dualité de la dépendance financière : une source de soutien pour l’économie camerounaise, mais également un facteur de vulnérabilité face à d’éventuelles pressions extérieures.
Dans ce cadre, l’avenir politique du Cameroun semble étroitement lié à l’équilibre entre son aspiration à une plus grande autonomie et les mécanismes économiques hérités de son histoire. La capacité du pays à trouver cet équilibre déterminera non seulement la solidité de ses institutions, mais aussi la nature de ses rapports avec la France dans les années à venir.