Opinions of Wednesday, 8 October 2025

Auteur: Jean Bruno Tagne

Quand Paul Biya fait les chichis devant les caméras

Biya à Maroua Biya à Maroua

C’est un classique bien rodé et quasi folklorique : chaque sortie publique du président Paul Biya se transforme en une espèce de cinéma muet à la Charlie Chaplin. Mais sans panache.

Devant les caméras, il gesticule, fait mine de discuter ou de donner des instructions imaginaires au Premier ministre, au Secrétaire général de la présidence de la République et parfois au directeur du cabinet civil. Tous sont pourtant ses plus proches collaborateurs avec lesquels il est censé travailler au quotidien pour le développement du Cameroun.

Mais il semble les découvrir et improvise avec eux une séance de travail fictive sur le tarmac.

En réalité il s’agit d’un théâtre dont le président Paul Biya est à la fois le metteur en scène et joue le premier rôle.

Petite anecdote. Mitan des années 2000. Jean-Marie Atangana Mebara est alors secrétaire général de la présidence de la République. Le président doit effectuer un « bref séjour » à l’étranger. Toute la machine administrative et le folklore de la présidence se mettent en branle pour l’accompagner à l’aéroport.

La CRTV est là, fidèle au poste. Comme d’habitude, les commentaires des journalistes sont enflammés et zélés. Paul Biya quitte ses accompagnateurs et avance lentement vers son avion. Soudain, il rebrousse chemin. Stupeur. Tout le monde est interloqué. Atangana Mebara écarquille les yeux. Mille questions se bousculent dans sa tête. Le président revient. Que se passe-t-il ? Le vieux a-t-il oublié quelque chose ? Renonce-t-il à son voyage ?

Il revient vers son secrétaire général, lui sert théâtralement la main et lui glisse : « Monsieur le secrétaire général. J’ai oublié de vous saluer en partant. Je suis revenu pour ça. Si je ne le fais pas, ils diront dans leurs journaux que vous et moi avons des problèmes. » (Atangana Mebara, J.-M. 2018).

Après la mise en scène, il repart, laissant derrière lui son SG/PR, mi-amusé, mi-désarçonné par les simagrées de son patron, et un peuple devant la télé, qui échafaude toutes sortes de conjectures sur ce moment de pur cinéma à l’aéroport.