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Opinions of Tuesday, 22 September 2015

Auteur: Michel Michaut Moussala

Les financements de Boko Haram

Au moment où le Cameroun fait face aux attaques des kamikazes de Boko Haram, il est fort judicieux de se poser des questions sur le financement de cette secte car, l’argent est le nerf de la guerre. Il serait recommandé de faire l’étiologie de ce mouvement djihadiste affilié à l’état Islamique de l’Afrique de l’ouest.

De prime abord, la formation du groupement remonte à 2002 à Maiduguri par Mohamed Yussuf, assassiné en 2009 et le flambeau est repris par un illuminé du nom d’Abubakar Shekau, qui, en septembre 2009, attaque la prison de Bauchi en libérant près de 500 prisonniers qu’il enrôlera aussitôt comme combattants.

Pour recruter, nourrir, payer les membres de cette secte qui sévit au Nigéria, au Cameroun, au Tchad et même au Niger et au Bénin, il faut être organisé et disposer d’un réseau de communications fiables et sécurisé.

Souvenons-nous que la secte Boko Haram commence à faire parler d’elle avec l’enlèvement de la famille moulin-Fournier détenue pendant deux mois et finalement libérée contre le paiement d’une rançon de près de sept (7) millions de dollars (environ 4 milliards FCFA), plus la libération des prisonniers djihadistes détenus au Cameroun.

On assistera par la suite aux rapts des sœurs canadiennes, des prêtres italiens, du père Vanderburgh et des travailleurs chinois. Toutes ces libérations vont se solder par le paiement de fortes rançons à la secte islamiste.

L’on se rappelle également que la réserve de Bouba ndjida avait vu ses éléphants sauvagement abattus par des braconniers d’un nouveau genre qui vont abattre près de 1500 de 2004 à 2014 dans les parcs du Cameroun, du Congo, du Gabon et de la RCA.

Visiblement ce braconnage sauvage n’avait qu’un but, récupérer les défenses d’ivoire pour les acheminer vers l’Asie où ils les vendent à prix d’or pour se constituer un trésor de guerre. L’ivoire est généralement vendu à 100 euros (environ 65 400 FCFA) le kilogramme alors qu’en Asie, le même kilogramme revient à près de 200 euros (138 000 FCFA).

Lorsque Boko Haram attaque certaines grandes villes, ses premiers objectifs sont les banques, le bétail, les vivres, les jeunes filles qu’il pourra vendre comme otage sexuel. en plus, lors de la prise d’otages, on soupçonne de petits bandits considérés comme des sous-traitants qui se permettent d’enlever des otages pour les revendre à Boko Haram qui va en dernier lieu, négocier contre paiement d’une forte rançon.

N’oublions pas également que certains hommes d’affaires du nord sont régulièrement menacés s’ils ne payent pas l’effort de guerre. Cette forme de chantage rapporte également gros aux finances de Boko Haram. Les mouvements djihadistes excellent également dans le trafic de la drogue, des cigarettes, des voitures, la prostitution…

Quand on met donc bout à bout les revenus de tous ces trafics juteux, on comprend donc que le groupe Boko Haram gère un juteux pactole qui lui permet de payer ses troupes, de les nourrir, de les équiper en armes sophistiquées. J’ai encore en mémoire ces commentaires et remarques du ministre tchadien de la Communication Hassan Sylla Bakari en mars 2015 à Yaoundé « Ce sont des gens très bien armés.

Où trouvent-ils ces armes ? Comment peuvent-ils avoir des chars AML de dernière génération». Les propos d’Hassan Sylla Bakari renvoient inéluctablement au nerf de la guerre.

Au-delà-même de tous ces trafics juteux, l’on soupçonne les monarchies du Golfe de financer ce mouvement djihadiste. « Il est indéniable que des mouvements djihadistes bénéficient du soutien des monarchies pétrolières et des paradis fiscaux afin de faire transiter et de blanchir les importantes sommes d’argent issues de la criminalité et des trafics divers».

Je me souviens qu’en 2011, lors des frappes chirurgicales en Libye avec pour maître-d ‘œuvre Nicolas Sarkozy, président à l’époque en France, le président Idriss Deby Itno avait mis les occidentaux en garde contre l’éviction de Kadhafi sans solution de rechange. Il avançait comme motifs de son inquiétude, l’immense arsenal dont disposait le leader libyen.

Si cet arsenal tombait aux mains des rebelles et des terroristes, c’est une bonne partie de l’Afrique subsaharienne et du Maghreb qui connaitrait de graves remous.

Une fois Kadhafi renversé, son vaste et sophistiqué arsenal militaire tomba entre les mains des différentes milices à travers le pays et ces armes ont commencé à circuler dans les pays voisins et ce fut le début de l’embrasement du nord mali. Sans l’intervention Française, sûrement que Bamako serait déjà tombée aux mains de ces terroristes trafiquants.

Le président nigérien Mouhamadou Issoufou est d’ailleurs clair là-dessus « Mon devoir est de protéger le Niger et les Nigériens, de leur permettre de se coucher et de se lever en sécurité.

L’intervention de la force Serval au Mali visant à stopper l’avancée des troupes djihadistes sur Bamako était-elle justifiée ? Oui, bien évidemment. Si les Français n’étaient pas intervenus, les djihadistes seraient à Bamako aujourd’hui, voire à Niamey ». De nos jours, le Sud Soudan et la Libye servent de principales voies d’acheminement des armes vers Boko Haram.

Comment comprendre que ce mouvement aligne parfois des véhicules blindés légers et même des tanks que seuls ne peuvent posséder que des états organisés. Ceci prouve à souhait que ce mouvement terroriste dispose des complicités au niveau des certains états africains, en particulier, certains états dits néants où le pouvoir central n’existe plus, mais constitués de plusieurs milices dont chacune impose sa loi dans sa zone de compétence et d’influence.

Ces états s’approvisionnent auprès de beaucoup de groupes occidentaux dont le seul leitmotiv est l’argent, l’appât du gain, l’utilisation criminelle qui en sera faite demain n’a aucune importance à leurs yeux. Certains estiment que le matériel saisi en mars 2015 après la bataille de Gambarou était constitué à 40% du matériel Français. Comment a-t-il pu être acquis par Boko Haram ? Les occidentaux n’ont ni amis permanents, ni intérêts permanents. Ils n’ont que des intérêts fluctuants au gré de l’heure.

Rien n’exclut d’ailleurs que certains fournisseurs en armes de l’état du Cameroun ne se retrouvent pas en train de proposer le même matériel militaire à Boko Haram moyennant paiement cash. Au niveau des financements de Boko Haram, ceux-ci sont multiples et proviennent de plusieurs sources. Boko Haram est une nébuleuse, une hydre de mer qui envoie ses tentacules partout et qui opère par la dissuasion, le chantage et la terreur.