À Guibai, l'ami qui souffre – et dont l’agonie intellectuelle est plus éloquente que tous ses écrits. Mon cher Guibai, vous m’invitez à souffrir avec vous, ce matin. Soit. Mais si la souffrance est la monnaie de la lucidité, alors vous êtes un rentier de l’opacité. Votre texte n’est pas un témoignage, c’est un réquisitoire manqué contre la cohérence, drapé dans la fausse neutralité d'un observateur qui n’observe rien d’autre que l’épaisseur de ses propres œillères.
Vous évoquez le brave camarade du MRC, qui vous réveille avec la sainte angoisse de la « dynamique cassée ». Vous le fustigez pour sa suspicion, pour son soupçon de « vendu », mais vous omettez l’essentiel : il sent l'odeur du soufre, celle de la compromission, même recouverte du vernis d’une interview. Donner la parole n’est pas un acte neutre quand l'acteur est un bénéficiaire des « grâces et faveurs du régime de Biya ».
Vous vous faites l’avocat du FSNC. C'est votre droit, mais ne venez pas ensuite me donner des leçons de courage.
Je vous lance un défi si voulez vous comparer à moi Mamadou Mota, entrez dans l'opposition pour deux jours. » Mon cher cousin, vous ne comprenez donc rien. L'opposition n'est pas un salon de thé où l'on sirote l’amertume des défaites. C'est le cachot. L'opposition, c'est l'étreinte de la matraque et la fraîcheur douteuse d'une cellule.
Vous, vous bénéficiez des grâces et des faveurs du régime de Biya et vous voulez vous positionner comme un défenseur de la cause commune cel constitue un acte de couardise. La seule vérité qui surnage de votre narratif c’est précisément ce qui vous discrédite. Vous tenez la plume, mais la main est celle qui reçoit les miettes du festin. C’est bien plus facile d’analyser le sacrifice quand on est repu.
Vous jouez au procureur du MRC, me sommant de reconnaître la victoire, quel est votre contribution à cette victoire ?
Vous reprochez au MRC de ne pas publier de communiqué pour denoncer un simulacre électoral. Mais qu'auriez-vous voulu ? Un communiqué d’éloge funèbre ?
Vous parlez de la constance du MRC dans le boycott de 2020. C'est l’unique mot honnête de votre diatribe. La constance, mon cher Guibai, est le luxe des hommes libres. Le changement de braquet permanent, l'excuse électorale, la justification des « centaines de milliers de jeunes qui rêvent de changer leur environnement immédiat » par la prise des strapontins : cela, c'est le signe de l'opportunisme, la maladie chronique de ceux qui n’ont jamais eu le courage de payer le prix de leur rêve. Le MRC est maître de sa trajectoire, pas un missile manipulable par quelques billets de Banque.
Vous concluez votre échange avec votre ami sur une question : « Et votre parti, le MRC, allez-vous boycotter les prochaines élections locales ? »
Je vais vous répondre, Guibai, sans l’hypocrisie qui vous caractérise.
Le MRC, lui, n’a pas besoin de justifier son positionnement à chaque cycle par le prisme d’un cynisme désespéré. L'opposition n'est pas un concours de présence. Elle est un état d’âme et un combat de principe.
Si l’arène politique n’est qu’un guet-apens, y entrer est une reddition. L’urgence n'est pas de ramasser les « mandawas » que le régime consent à laisser tomber. L'urgence est de faire s'écrouler la table du festin pour que la nation entière puisse y prendre sa place.
Quand on entre dans l'opposition, on y entre pour de vrai. Ce n'est pas une escapade de deux jours pour prendre la pose du martyr, puis retrouver le confort de la faveur.
Alors, Guibai, souffrez, et cogitez encore. Car le sacrifice n’est jamais une question d’opportunité, c’est une affaire de dignité.











