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Opinions of Lundi, 19 Mars 2018

Auteur: Dieudonné Essomba

Serail: comment Paul Biya a nourri les sécessionnistes

Paul Biya a déclaré la guerre aux sécessionnistes Paul Biya a déclaré la guerre aux sécessionnistes

La Sécession est une rébellion d’un type particulier qui accumule les traits d’une insurrection classique et d’un mouvement de libération. C’est cela qui la rend terriblement difficile à combattre.

Les principales étapes sont les suivantes :

Etape 1 : se faire reconnaître par les concitoyens et la Communauté Internationale comme un mouvement séparatiste ;

Etape 2 : paralyser l‘Etat et le contraindre à abandonner ses missions régaliennes de service public : écoles, santé, justice, police, etc.

Etape 3 imposer son ordre, en terrorisant ceux qui sont favorables à l‘Etat, et en montrant qu’elle garantit mieux la sécurité que l’Etat qui a fui et ne protège plus personne. Ici d’ailleurs, la Sécession est souvent aidée par l’Etat qui, sans protéger personne, recourt à la répression aveugle ;

Etape 4 : acculer l‘Etat à quelques poches hypersécurisées qui prouvent qu’il n’est qu’une force d’occupation incapable de sortir de ses bunkers, pendant que la Sécession organise le reste du pays ;

Etape 5 : déstabiliser les circuits économiques qui profitent à l‘Etat, de manière à rendre l‘occupation terriblement coûteuse. Le pays ne gagne plus rien à y rester et épuise toutes ses maigres ressources à poursuivre la lutte ;
Etape 6 : engager la bataille finale, pour détruire les poches occupées par l’Etat, acculant celui-ci à réclamer des négociations qui se clôturent par un référendum d’autodétermination.

Voilà les séquences d’une Sécession. Les Anglophones, eux, le savent et appliquent méthodiquement.

On ne peut en dire autant du Gouvernement et des autres va-t-en-guerre, surpris de la vitalité pourtant prévisible de la Sécession et se retrouvent tétanisés, ne sachant plus quoi faire et enfermés dans une folle fuite en avant.

Pour neutraliser une Sécession, vous ne pouvez recourir à la force que si le mouvement est très marginal dans la population, ou alors, s’il ne recouvre qu’une population minoritaire. Par exemple, en Angola, le Cabinda ne comprend que 2% de la population.

Mais si la Sécession recouvre une population trop importante, comme les Anglophones qui représentent 20% du Cameroun, vous ne pouvez plus la réduire par des moyens de force. Vous devez alors adopter la Fédération qui a un double effet.

D’abord, la fédération assèche l’attractivité de la Sécession, puisque par nature, presque tous les peuples de la terre se contentent d’une autonomie de type fédéral qui leur permet d’assumer leur identité tout en les débarrassant des préoccupations trop lourdes comme la défense ou les affaires étrangères.

En second lieu, la fédération donne des pouvoirs locaux puissants et légitimes, avec une police et une administration locales acceptées par la majorité de la population, ce qui est nécessaire pour combattre les Sécessions.

Mais la Fédération elle-même doit être faite à temps, car passée la quatrième étape, les jeux sont faits: la Sécession devient inéluctable.