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Opinions of Friday, 11 November 2022

Auteur: www.camerounweb.com

Mondial 2022 : 'Michael Ngadeu, humeur dévastatrice d’Eto’o, légèreté de Song, sur fond d’une inacceptable ingratitude de la nation'

Par Thiéry Gervais Gango, journaliste Par Thiéry Gervais Gango, journaliste

Michael Ngadeu-Ngadjui comptait parmi ces cadres depuis l’inespérée victoire en finale à la CAN gabonaise. Loin de compter parmi les défenseurs centraux les plus doués au monde c’est vrai, mais avec des mérites qui le placent largement au-dessus de certains protégés et copains appelés hier.

Dans ces moments que j’imagine difficiles pour le footballeur, j’ai envie de lui dire, le coeur meurtri comme celui de nombreux Camerounais, que nous nous sentons honteux de n’avoir pas assez pesé pour que le Qatar soit pour lui, l’expression de notre infinie gratitude.
Les qualités de footballeur de Michael Ngadeu-Ngadjui sont évoquées ici et là, dans une affaire et une controverse qu’on aurait pu nous éviter à quelques jours de l’ouverture de la Coupe du monde qatari.

Les qualités du footballeur ne sont pas l’objet de ce propos, concernant ce guerrier qui s’est donné corps et âme pour le drapeau. Avec ses moyens et surtout, avec sincérité et cette envie de se mettre toujours au service du collectif.

Michael Ngadeu-Ngadjui restera l’un des moteurs de la qualification inespérée des Lions indomptables pour le mondial dont on le prive pour faire plaisir à une envie démesurée de puissance. Avec un cynisme qui découvre à beaucoup, la nature profonde de celui qui porte la responsabilité de cette non sélection. Les symboles devraient avoir pourtant un sens, même pour ceux qui se croient intendants du destin des autres ou démiurges par lesquels passeraient désormais la vie et la mort sur les terrains du sport roi et jusque dans les vestiaires.

Parce que la non sélection de Michael Ngadeu-Ngadjui n’a rien à voir avec le sportif, je ne m’attarderai donc pas davantage sur cet aspect, Souley Onohiolo y ayant consacré un texte ce matin, avec grande pertinence d’ailleurs. D’autant plus que c’est désormais de notoriété publique que Michael Ngadeu paye le prix de sa sincérité face à un ancien cadre de l’équipe qui s’arrogeait, en son temps, le droit de parler, parfois avec irrévérence, à ses prédécesseurs à la Fécafoot, mais qui, devenu président, ne tolère pas la moindre objection. La moindre remarque. Et qui peut, selon ses humeurs, faire payer le prix fort à l’un des piliers de notre qualification, pour une remarque qui ne valait pas deux balles.

Si l’on mettait bout à bout ce que Samuel Eto’o a pu faire au sein de l’équipe nationale, et le nombre de fois où il a été pardonné, même le chapelet de la miséricorde divine ne suffirait pas pour égrainer le nombre d’occasions où ses incartades et ses humeurs ravageuses auraient pu convaincre de le priver de nombreux rendez-vous sportifs. De l’histoire de l’intoxication de Joseph Désiré Job au refus de prendre le drapeau comme capitaine de l’équipe, en passant par l’affaire du brassard arraché à Rigobert Song en Autriche, aux tensions épiques avec de nombreux co-équipiers depuis Djemba Djemba, les mensonges autour du pénalty manqué de Womé, son pénalty manqué à Yaoundé face au Sénégal au même endroit où Womé avait manqué le sien (tout se paye), la pollution des vestiaires, des actes d’indiscipline caractérisée, les injures publiques proférées à l’endroit du ministre des Finances et ses collaborateurs, sa défiance vis-à-vis du ministre des Sports qu’il méprise proprement, et j’en passe.

Mais à la vérité, le plus à plaindre dans cette révoltante exclusion n’est pas le sanguin Samuel Eto’o dont la brutalité ne surprend plus. Ce n’est même pas Michael Ngadeu-Ngadjui à qui tant de réactions disent combien il est cher à nos cœurs. Pour toujours.
Celui qui interroge le plus ici, c’est cette marionnette au titre qui en dit suffisamment sur ce qu’il n’est pas. Lions sur le terrain, mais femmelette devant son ancien ennemi juré en privé, dont on s’étonne qu’à défaut d’avoir les capacités pour entrainer ou pour paraître moins sans personnalité, qu’il n’ait pas pu feindre au moins d’être enfin le sélectionneur qu’il n’est pas. Et essayer de dire sous cape qu’il a fait de son mieux, ne le disculpera pas.

Ne pas faire preuve de caractère pour maintenir Michael Ngadeu-Ngadjui sur « sa » liste est une faute inqualifiable, qui hantera les nuits de « Jahman » jusqu’à la fin de sa vie. Lui le défenseur central. Lui pour qui on se mobilisa en 2010, de jour et de nuit sans compter d’heure, pour le faire sélectionner même symboliquement, alors que celui qui avait arraché son brassard en Autriche avait juré qu’il n’irait pas à la Coupe du monde sud-africaine, avant de se raviser face aux pressions. Nathalie Yamb, André Kana-Biyik ou encore Gérémi Sorele Njitap peuvent témoigner de l’énergie déployée pour que Samuel Eto’o reparte voir Paul Le Guen pour permettre à un Rigobert Song croulant, de s’asseoir même symboliquement sur le banc des Lions pour la seule Coupe du monde jusque-là organisée sur le continent. La même chose était et est envisageable pour Ngadeu.

A l’époque, nous ne le faisions pas pour nous-mêmes. Nous ne le faisions pas particulièrement pour le grand et héroïque défenseur que Rigobert Song restera. Nous le faisions au nom du symbole, au nom des valeurs, au nom de ceux qui de sueur et de sang se sont donnés pour nous. Au nom de l’histoire et surtout au nom de cette empathie qui a manqué aux deux ogres à qui les autorités ne peuvent pas abandonner complètement le destin de nos Lions qui furent, qui sont et qui seront après le passage mouvementé à la Fécafoot du Jupiter du football camerounais.