La récente polémique autour des résultats du concours d’entrée à l’ENAM remet brutalement sur la table une vieille question : à quoi sert encore cette école dans le Cameroun d’aujourd’hui ?
Une institution née d’un idéal
À l’aube de l’indépendance, l’ENAM fut pensée comme un outil d’intégration nationale. Elle devait former des cadres compétents, incarner l’excellence et garantir une administration au service de tous. Elle était censée être le symbole d’un pays qui se construisait, avec des élites recrutées sur la base du mérite.
Une dérive sociale flagrante
Mais ce projet s’est dévoyé. L’ENAM est devenue le miroir d’un apartheid social. Loin d’être un creuset d’égalité, elle est désormais un instrument de reproduction des privilèges. Un simple regard sur la liste des admis suffit : les noms parlent plus fort que les notes. À l’ENAM, ton patronyme – ou celui de ton père – compte davantage que ton intelligence et ta compétence. L’admission de Brenda et Junior Biya n’est qu’un exemple parmi tant d’autres de cette logique implacable.
La fausse justification
Certains objecteront que les enfants de riches ont, eux aussi, le droit d’entrer à l’ENAM. Bien sûr qu’ils en ont le droit – mais seulement s’ils en ont la compétence. Car la justice sociale exige que l’enfant de la bayam sellam, du motoman ou du pousseur ait les mêmes chances. Or, si l’on est incapable de garantir cette équité minimale, alors l’ENAM n’est plus qu’une machine à exclure.
Une fabrique d’incompétence
Le résultat est dramatique : des juges, des procureurs, des douaniers formés dans l’injustice et la médiocrité. L’école qui devait incarner l’excellence est devenue le symbole de la cancritude. Elle ne produit plus des serviteurs de l’État, mais des fonctionnaires déconnectés, incompétents et illégitimes.
Fermer l’ENAM
L’ENAM n’a plus de raison d’être. Elle ne sert ni la justice sociale, ni l’efficacité administrative, ni l’intégration nationale. Elle est devenue un instrument de reproduction des inégalités et un incubateur d’incompétence. Tant qu’elle existe, elle perpétue un système où le mérite est sacrifié sur l’autel du nom et du privilège.
Alors oui, il faut fermer l’ENAM. Car une école qui trahit sa mission originelle n’est plus une école : c’est une imposture institutionnelle.











