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Opinions of Wednesday, 26 August 2015

Auteur: Benjamin Zebaze

Général Pierre Sémengue : « En 1984, les nordistes se sont tués entre eux »

Nous proposons au duo Bindzi-Semengué, de reprendre purement et simplement à leur compte, cette fausse interview réalisée par nos soins où le Rubicond en matière de négationnisme et d’incitation à la haine est franchi.

Nous les mettons au défi de renier « l’épuration ethnique » de 1984 visant les nordistes comme ils l’ont fait au sujet des massacres perpétrés par la France en « Sanaga maritime » et en « pays bamiléké ».
Mon Général, pourquoi êtes vous entré dans l’armée ? Par vocation ou par mimétisme ?

Entre 1940 et 1950, les temps sont difficiles. Il fallait bien vivre. J’étais un fils de paysans dans la forêt vierge de Bikoka à Lolodorf. Mon père est mort quand je n’avais même pas cinq ans. Me retrouver général d’armée, c’est quand même extraordinaire !

En 1947, sort un dictionnaire dont la partie historique parle de la seconde guerre mondiale. Je suis fasciné par les atrocités que cet ouvrage relate. C’est là où l’idée de couper les têtes des adversaires afin de les exposer a germé dans mon esprit. Cela nous a été bien utile en « pays bamiléké et bassa » plus tard. J’espère que nous y reviendrons.

Quand vous regardez dans le rétroviseur, que dites-vous de votre carrière ?
J’ai eu une carrière époustouflante. Rendez-vous compte : aucune bataille à conduire. Des moments agréables comme lorsqu’il fallait couper les têtes à l’Ouest et en Sanaga maritime.

J’ai occupé pratiquement toutes les fonctions : Chef d’Etat major de l’armée de terre, Inspecteur général des armées, Chef d’Etat major des Armées, Contrôleur général des armées… Tout cela sans jamais avoir livré la moindre bataille, comme je le disais plus haut. Il faut le faire.

Vous faites l’actualité depuis quelques jours, après avoir pratiquement dédouané la puissance coloniale dans les événements à l’ouest et en pays bassa avant et après l’indépendance…

Il faut tout de même qu’une certaine histoire de ce pays puisse être écrite valablement ; que les choses soient connues. Les gens écrivent n’importe quoi et disent n’importe quoi… Je crois qu’il était normal de dire les choses telles qu’elles se sont déroulées, car la jeunesse d’aujourd’hui a besoin de repères.

En plus, les gens veulent qu’on ouvre les archives. Je ne suis pas d’accord, car je pense qu’il n’est pas utile que tout le monde sache quelles étaient par exemple les méthodes que nous utilisions pour couper les têtes d’un seul tranchant. Nous sommes vivants : pourquoi dépenser de l’argent pour rechercher une vérité que nous avons au bout des lèvres ?
Qui peut penser qu’un Général de ma trempe puisse mentir ?

Le Général Asso’o pense en effet que vous êtes un menteur.
Celui-là ! Quand je pense qu’il est Général comme moi, je me demande à quoi cela a mené de servir le colon avec autant de zèle. Cet Asso’o là !…

Si vous permettez, mon Général, nous y reviendrons un peu plus loin. Restons sur cette affaire de massacres à l’Ouest et en pays bassa.
Ah ! On voit que c’est cela qui vous intéresse.

C’est l’actualité, mon Général. Que s’est-il réellement passé pendant cette période ?
Je ne comprends pas cette polémique. Pourquoi ne pas attendre ma mort et celle de tous ceux qui ont aidé la France dans cette besogne pour ouvrir les archives ? Ce serait plus juste. Nous ne pourrions pas, dans ces conditions, influer sur l’enquête.

Y a-t-il eu massacre ou pas ?
Dans le Moungo et à l’Ouest, les bamilékés, dont on connait l’amour effréné pour les biens matériels, en ont profité pour se massacrer entre eux et spolier les populations Sawa de leurs terres ; c’est la vérité !

Et à Douala, à Yaoundé, comment ces bamiléké ont fait pour avoir autant de terre ? En tuant aussi ?
Je ne sais pas. C’est possible.

Si votre version est correcte, qui coupait les têtes des nationalistes et les exposait devant les marchés et les lieux publics ?
Au départ c’était nous. Pour se défouler, on coupait quelques têtes pour ne pas perdre la main en ce qui concerne la maitrise de la technique d’un « seul tranchant » comme je l’ai expliqué plus haut.
Cela a amusé les nationalistes aussi.

Puisqu’ils étaient nombreux, ils trouvaient qu’il n’y avait pas de mal à couper quelques têtes de temps en temps. Certains ont été plus malins. Ils ont en profité pour voler les terres des hommes aux têtes coupées.

Selon vous, François Hollande, le président de la République française a eu tort de reconnaitre les méfaits de son pays en cette période.
Voilà ce que je ne comprends pas. François Hollande est né quand ? Il n’était pas là quand les événements se sont déroulés. Il parle et les camerounais préfèrent sa vérité à celle d’un homme qui était sur le terrain comme moi.

Vous insistez beaucoup sur l’Ouest et êtes peu loquace en ce qui concerne le « pays Bassa ». Eux aussi tuaient pour voler les terres ?
Avec eux, il vaut mieux être prudent.

Ils ne sont pas aussi peureux que nos frères bamilékés ; leurs « médecine traditionnelle » est aussi très réputée et efficace. Avec le mal fou que nous avons eu à attraper Um Nyobé qui disparaissait et réapparaissait à sa guise, vous n’allez pas m’entrainer dans un autre combat difficile.

Mais nos lecteurs attendent votre réponse
Je pense avoir été suffisamment clair.

Abordons la tentative du putsch d’avril 1984. Pensez-vous, comme Fenkam Frédéric, qu’il ne s’agissait que d’une opération pour éliminer les gens du Nord ?
Avouez que si on avait éliminé tous ces gens là, il n’y aurait pas eu la secte Boko Haram dans la région. A postériori, je me dis que si on avait utilisé le gaz Napalm comme à l’Ouest, le pays serait tranquille.

Mais c’est très grave ce que vous venez de dire. Vous reconnaissez vous-même, par cette réponse, que l’Ouest a été attaqué avec des méthodes qui valent pour certains dirigeants, des inculpations pour crime de guerre, crime contre l’humanité, voir de génocide

Qu’est ce que vous en savez, en matière d’armement chimique? Quand il fait froid comme à l’ouest, le Napalm favorise la croissance des cultures. Quand il fait chaud comme au nord, il ne s’attaque qu’à des esprits surchauffés, comme ceux de Boko Haram. C’est scientifique.

Avouez, mon Général que 1984, c’est l’année qui restera gravée dans votre esprit.

En effet, quand je revois le film des événements, j’ai du mal encore à croire que c’est ma modeste personne qui a sauvé la République.
Je me revois entrain d’entrer triomphalement au palais d’Etoudi, les armes en bandoulière comme dans un film de guerre où Elie Savalas joue le premier rôle. Les gens s’enfuient à mon passage en criant « Semengué veut faire un coup d’Etat ». J’avoue que j’y ai pensé un instant, voyant le chef de l’Etat apeuré dans un coin de son bureau.

C’est ainsi que je dépose mes armes et dit, la poitrine bombée, le torse haut : « C’est fini, monsieur le président, le peuple camerounais veut vous entendre ». Il fallait voir son soulagement. C’était émouvant ; il m’aurait embrassé s’il n’y avait la solennité de la fonction.

Mais le Général Asso’o Emane conteste violemment cette version des faits.
Celui là alors ! Quel rabat-joie ! Tout le monde ne peut pas comme lui, qui est originaire d’une zone de pygmée, avoir des méthodes pour se rendre invisible ; au point de passer devant les putschistes qui avaient disposé des moyens militaires énormes entre le quartier général et l’Etat major sans être vu.

La version du Général Asso’o est carrément romanesque. Il a réussi à libérer le pays avec un pistolet automatique, 9 munitions et 36 grenades que son petit frère lui a rapportées de Sangmélima où il s’était rendu le matin du 06 avril pour chercher du renfort. Qu’en pensez-vous ?

C’est bien ce que je vous disais. Seul un parent de pygmée pouvait réussir un tel exploit. Mais ce que ce monsieur ignore, c’est que l’art de la guerre consiste à savoir être là où il faut au moment où il faut.

S’il est vrai qu’après les premiers coups de feu, j’ai été arrêté par mes anciens subalternes, j’ai su les convaincre qu’ils seraient coupables devant Allah, d’avoir tué un pauvre Général sans défense.

Ils m’ont libéré. Tout ce qu’on m’a appris à « Saint Cyr » m’est revenu rapidement à l’esprit. J’ai foncé à la présidence de la République pour libérer le président. C’était quand même le plus important, quoi qu’en pense Asso’o Emane.

Vous libérez le président de la République ; s’en suit un véritable massacre de toute l’élite du Nord
Qui vous a dit cela ? Les morts de ce triste épisode l’ont été par les nordistes.

Comme à l’Ouest, ce sont des nordistes qui ont tué d’autres nordistes ?
C’est exactement cela.

Mais mon Général, c’est insoutenable ce que vous dites là. Et ce procès près de Mbalmayo où des gens ont été jugés à la va-vite et exécutés sommairement ? Le journal « Œil du Sahel » en fait l’écho tous les mois d’avril.
S’ils sont morts, donnez-moi leurs certificats de genre de mort. Je mets au défi celui qui pourra me présenter le moindre certificat de décès. S’il n’y a pas de certificat de décès, c’est qu’il y a eu « zéro mort », « zéro exécution », « zéro assassinat ».

Mon Général, vous êtes chrétien, ancien d’église. Comment conciliez-vous le métier de soldat et de serviteur du Christ ?
Après avoir participé à toutes ses opérations où on tranchait des têtes, j’avais besoin de me confesser. C’est là où j’ai appris dans la bible, que des chefs militaires étaient chrétiens. Voyez vous-mêmes comment dans l’ancien testament, des sanctions sévères sont prescrites.

La loi du talion « œil pour œil, dent pour dent », nous a permis d’être efficaces et opérationnels à l’Ouest et en pays Bassa. Les nationalistes violaient les femmes, nous répondions en tranchant des têtes. C’est d’ailleurs ce que nous enseigne la bible où pour une faute commise, Dieu puni le coupable jusqu’à sa septième génération. Qu’importe le sort des innocents, pourvu que le coupable soit parmi les personnes sanctionnées. C’est pour cette façon très rationnelle de voir les choses que je suis devenu chrétien.

Avec toute cette agitation dans la sous-région, comment réagit un Général de l’armée camerounaise ?

Il se dit qu’il vaudrait mieux que les choses dégénèrent après son décès ; pas avant. Il se voit mal dans un véhicule surchauffé, encadré par des soldats qui sont entrés dans l’armée sur recommandations, et qui sont prêts à s’enfuir au moindre bruit suspect.

Quelle est votre opinion sur l’armée camerounaise ?

Pour être honnête, je suis mal placé pour avoir un avis négatif ou positif. En mon temps, un jeune homme qui pouvait trancher une tête humaine d’un seul coup, avait un avenir certain dans l’armée coloniale.
Aujourd’hui, avec toutes les techniques modernes, je m’y perds un peu. Je ne vois pas ce qu’il y a de réellement jouissif d’appuyer sur un bouton pour tuer des centaines de personnes. Je suis de l’ancienne école : selon moi, rien ne vaut et ne vaudra une belle tête tranchée exposée à l’entrée d’un marché populaire.


Pour en finir, que conseillez-vous à vos jeunes camarades de l’armée sur le plan politique ?

A mon humble avis, un militaire doit être apolitique. Mais il doit nécessairement voter pour le Rdpc et son excellence Monsieur le président de la République, chef des armées, Paul Biya.

Mon Général, je vous remercie pour votre disponibilité. Je suis certain que cet entretien fera date dans l’histoire de ce pays.
Vous voyez qu’il n’est pas nécessaire d’ouvrir les archives françaises ! Il suffit de profiter un peu de moi pendant le temps qu’il me reste à vivre pour tout savoir.

Une fois de plus, merci.