Opinions of Tuesday, 18 November 2025

Auteur: Daniel Essissima

France - Cameroun: les accords coloniaux que Biya a rompus en 2019

J'ai effectué des recherches pour identifier un document "officiel" titré « 11 accords coloniaux », que la France aurait fait signer au président Ahmadou Ahidjo en 1959-1960 et dont le président Paul Biya se serait désengagé en 2019.

Après cette étude, j'ai enfin compris que l'expression « 11 accords coloniaux » n'existe pas officiellement. C'est une interprétation réalisée par des personnes. En 1960, on emploie les termes « accord de coopération » ou « traité de coopération ».

Ainsi, je vous communique le rapport du sénat français de novembre 1960 portant sur le « traité de coopération » entre la France et le Cameroun indépendant, conclu le 13 novembre 1960.

« L'accord en matière économique, monétaire et financière stipule, dans son article premier, que La République du Cameroun déclare vouloir poursuivre son développement en étroite association avec la République française et les autres pays de zone franc, tout en bénéficiant des possibilités d'échange qui s'offrent à elle dans les autres pays du monde. La République du Cameroun reste au sein de la zone franc ; la République française continuera à lui apporter l'aide matérielle technique qui lui est nécessaire. Une Commission paritaire franco-camerounaise sera chargée de suivre l'exécution de l'accord. Elle se réunira en principe une fois par trimestre. Le Cameroun et la France maintiennent leurs relations normales dans le cadre d'un régime préférentiel réciproque, qui a pour objet d'assurer à chacune des parties des débouchés privilégiés ; ces pays assureront la coordination de leur politique commerciale à l'égard des pays tiers et se consulteront à l'occasion de leurs plans d'importation. L'entrée sur le territoire de chaque partie des marchandises originaires de l'autre partie s'effectue librement et en franchise de droit. Mais, pour protéger son industrie naissante, le Cameroun pourra établir des droits de douane sur les marchandises originaires et en provenance de France, sous réserve des obligations qui pourraient s'appliquer à son égard par suite de l'article 133 du Traité de Rome. La République du Cameroun entend en effet confirmer son association à la Communauté économique européenne, sans préjudice des aménagements rendus nécessaires par son accession à l'indépendance. »

« La qualité d'État indépendant et souverain acquise par le Cameroun lui confère le droit de créer une monnaie nationale et un institut d'émissions qui lui soit propre, mais, en attendant cette création, la monnaie légale reste le franc C.F.A. (art. 25 et 26). La suite du titre IV de l'accord prévoit les modalités d'application de ces principes monétaires. Le titre V prévoit que la République française et la République du Cameroun se concerteront sur les problèmes de la politique monétaire et de la politique financière à l'échelon le plus élevé. Il prévoit la représentation du Cameroun dans les organismes financiers communs. b) Une convention spéciale organise les relations entre le Trésor camerounais et le Trésor français. c) Par la convention culturelle, la République française s'en gage à faciliter sur le territoire du Cameroun et sur son propre territoire l'éducation des citoyens camerounais désireux de suivre un enseignement de caractère français et d'acquérir les diplômes qui le sanctionnent. Elle mettra à la disposition du Gouvernement camerounais le personnel qualifié nécessaire au fonctionnement des établissements publics d'enseignement et de culture, à l'inspection pédagogique, à l'organisation et à la sanction des examens et concours, enfin aux services administratifs de l'enseignement. En contrepartie, la République du Cameroun s'engage à s'adresser de préférence au Gouvernement français pour le recrutement de ces personnels, à accorder toutes facilités à ces personnels dans l'accomplissement de leur mission et à maintenir dans ses établissements des différents degrés, à l'intention des élèves désireux de suivre les programmes français, un enseignement conforme à ces programmes. Chaque État s'engage à favoriser sur son territoire la création par l'autre État de bibliothèques, de centres culturels destinés à répandre la connaissance mutuelle de leurs cultures et de leurs civilisations. Chacun des Etats s'engage à faciliter aux ressortissants de l'autre l'accès des établissements universitaires culturels, notamment par l'octroi de bourses, par l'organisation de stages. »

« Par l'accord concernant l'assistance militaire technique aux forces armées camerounaises, la France s'engage à apporter au Cameroun l'assistance de personnels militaires français chargés de procéder à l'organisation, à l'encadrement et à l'instruction des forces armées camerounaises. La République française fournit à titre gratuit la première dotation en matériels et équipement militaire nécessaires à la mise sur pied des forces armées camerounaises. La République du Cameroun s'adressera à la République française pour l'entretien et le renouvellement des matériels de l'armée camerounaise. Le Cameroun se réserve le droit d'accepter l'aide d'autres pays pour les fournitures qui ne pourraient pas être faites par la France. V Les ressortissants camerounais qui servent encore dans l'armée française seront transférés à l'armée camerounaise au plus tard le 31 décembre 1960. Le Gouvernement du Cameroun pourra autoriser les nationaux camerounais à servir dans les forces armées françaises, mais leur recrutement se fera exclusivement par voie d'engagement. Le Gouvernement français pourra autoriser les nationaux français à servir dans les forces armées camerounaises, à condition que ceux-ci soient dégagés de-toutes les obligations d'activité du service militaire français. La République française apportera son concours à la formation de base des cadres de l'armée camerounaise. Les nationaux camerounais sont admis dans les grandes écoles et établissements militaires français, soit par concours dans les mêmes conditions que les nationaux français, soit dans la limite d'un contingent particulier comportant aménagement de ces conditions. »

« Le Cameroun signait de nouveaux accords de coopération avec la France le 21 février 1974 à Yaoundé. Au nombre d’une vingtaine, si l’on tient compte de l’ensemble des actes (y compris les annexes, les protocoles accord et les échanges de lettres), ces textes se substituent aux accords cadres du 13 novembre 1960 et autres conventions conclues entre cette date et le 21 février 1974. Coiffés par trois textes de principes, les nouveaux accords couvrent, comme dans le passé, tant le politique, l’économique que le social, le culturel et le technique. Seules Y échappent les questions monétaires et commerciales, qui relèvent du domaine multilatéral. »

Source: Le Monde diplomatique paru en août 1976.