Vous-êtes ici: AccueilOpinionsActualités2016 05 06Article 369793

Opinions of Friday, 6 May 2016

Auteur: camernews.com

A la rencontre d’une reine camerounaise

Françoise Alima Messi est l’épouse de sa majesté René Désiré Effa, ce roi qui a initié et élevé le Président Paul Biya au rite et rang traditionnel du «Nnome Ngui»

Si les administrations coloniales et certaines d’aujourd’hui ont institué les titres de Chef traditionnel, supérieur, de tel ou tel autre degré, ces personnalités africaines sont des Rois, dont la notoriété ne se borne pas à des tenues officielles ridicules que les administrations en place imposent, voulant en faire des sous- agents administratifs à leurs ordres…. Ces Rois règnent et leurs épouses – ils sont en général polygames – les Reines, ont des rôles prépondérants dans la vie et les réalités du quotidien de leurs contemporains.

Nous avons rencontré la Reine Alima Messi Françoise, une des épouses de Sa Majesté Effa, ce Roi qui a initié et élevé le Président Paul Biya au rite et rang traditionnel du «Nnome Ngui ».

Cette fille Etenga de Bikop, dans la Mefou Akono, et femme boulou de Ngonebock, dans le sud Cameroun est conseiller d’orientation, mais aussi doctorante en psychologie sociale à l’Université de Yaoundé 1. Sa recherche est une étude sur l’influence sociale dans le leadership traditionnel africain.

Pourquoi avez-vous choisi ce sujet ?

Françoise Alima Messi :
« C’est pour épauler mon époux. Je suis mariée à un Chef Supérieur. L’une de mes priorités est d’être au top non seulement en tant qu’épouse, mais dans bien d’autres domaines. Je veux mettre la psychologie au service de la chefferie traditionnelle.

Nous sommes certes dans un pays moderne et contemporain mais, en Afrique, il y a cette cohabitation de deux pouvoirs : le traditionnel et le moderne. Ils sont antinomiques, pourtant ils doivent évoluer ensemble. Il se pose le problème d’une nouvelle dynamisation de nos valeurs ancestrales qui vont nous servir d’appui pour faire face à la mondialisation. Les institutions traditionnelles ont donc besoin d’un accompagnement psychologique dans le cadre d’un management moderne des chefferies, d’où le choix de mon sujet. »


Vos recherches ont-elles des approches spécifiques à la vie des Africaines au quotidien ?

Françoise Alima Messi :« Parfaitement! Au sein de la chefferie, je pratique la psychologie appliquée. Les femmes africaines vivent beaucoup de situations dramatiques. Dans le cas d’exemple de la succession et de l’héritage, aux yeux de la loi, tous les enfants ont les mêmes droits. Mais dans la pratique, c’est autre chose. Les filles sont déshéritées et abandonnées à elles-mêmes dans certaines familles. Je me dois de leur trouver du réconfort.

Il y a aussi une autre réalité qui fait beaucoup de mal dans nos chefferies traditionnelles. C’est la polygamie. L’une de ses particularités est de tuer le bel amour des femmes pour leur conjoint, les transformant en actrices qui jouent un rôle, un personnage. Vous savez, une femme, même mariée au plus grand coureur de jupon, tant qu’elle est dans la monogamie, se sent en sécurité même de façon illusoire.

Vivre la réalité de la polygamie n’est pas toujours évident. Pour accepter de partager son époux, il faut éteindre en soi la flamme qui brûle pour lui, et jouer. Ainsi, il peut entrer et sortir sans que son absence ne vous fasse de mal.

Le danger est que l’homme peut ne plus se sentir aimé, car en réalité, il ne l’est plus. Alors, en quête d’amour, il va voir ailleurs ; c’est pourquoi il est plus facile pour un homme qui a déjà une deuxième femme d’en chercher une troisième, et ainsi de suite.

En ce qui me concerne, beaucoup de paramètres ont joué en ma faveur. Mes études de psychologie sont un très grand atout, et l’Eternel Dieu m’a donné un époux réfléchi, qui sait faire la part des choses. La polygamie archaïque dans laquelle tout le monde vit dans la même concession est pire qu’un enfer. Je ne suis pas dans la même ville que ma coépouse.

On ne se rencontre que lors de grands événements qui exigent la présence de tous. L’inconvénient cependant est que nos enfants n’apprennent pas à se connaître, et à s’aimer, mais voir mon homme par intermittence renforce mon amour pour lui.

Je pense pour finir que le bonheur n’est pas une donnée matérielle que l’on peut posséder. C’est plus un état d’âme. A mes sœurs africaines, je dis que pour être heureuses, nous devons savoir ce que nous voulons et nous donner les moyens d’atteindre nos objectifs. Je prends le cas de cet événement qui est la Journée internationale de la Femme, le 8 mars.

Quand j’observe comment mes compatriotes camerounaises ont leur singulière manière de célébrer cette journée, beaucoup sont comme des marionnettes qui prétendent revendiquer leur droit et l’égalité des sexes à travers l’achat des pagnes. Et, lorsqu’on a cousu son «kaba androïde », qui peut se soulever avec facilité, le tour est joué. Comme c’est ridicule ! Comme la liberté, l’égalité ne se revendique pas, elle s’arrache. Il vaut mieux rechercher son autonomie financière que revendiquer une égalité avec un homme dont dépend notre survie ».