Le recueil de nouvelles « L’Etrange détresse » de Narcisse Mouelle Kombi donne à voir les turpitudes de notre temps.
C’est possible qu’au moins deux des nouvelles de ce recueil de quatre aient été écrites voici quelques années. Il n’en demeure pas moins qu’elles restent d’actualité.
Tant les mœurs, les circonstances, conjonctures qu’elles dépeignent, les travers de la société qu’elles décrient sont encore monnaie courante parmi nos contemporains.
Tenez : les Maki, ces pauvres hères prolifiques et incapables de subvenir aux besoins de leur progéniture, existent en grand nombre au sein de nos communautés aujourd’hui. Leur quartier que l’auteur décrit comme un ghetto périphérique de la capitale pourrait bien correspondre à nombre de bidonvilles s’étant développés au cœur même de Yaoundé.
« … sans lumière et sans vie, où les taudis faits de tôles, de morceaux de carton et de carcasses de voitures attendaient d’être rasés par les bulldozers du nouveau plan d’urbanisme ».
Ne serait-on pas quelque part à Etam-Bafia, Mokolo Elobi, Mvog-Ada ? Et que dire de « l’hôpital de la Rénovation » qui rappelle étrangement certaines de nos formations sanitaires, avec leurs pratiques indignes d’Hippocrate ?
Détresse donc. On la vit tout au long de cette œuvre. Dans le quotidien sombre fait de famine, maladies, manque d’argent et d’instruction, chômage, surendettement des Maki. Mais aussi dans celui de Mbella et Lucie, un couple de Camerounais installé en France.
L’homme, accro au travail, voit son épouse délaissée transférer progressivement ses sentiments amoureux sur son cadet venu du pays, poursuivre des études en architecture.
La fin est tragique pour les deux frères. Tragique encore dans « Adieu, veuve joyeuse », où l’épouse d’un riche fonctionnaire planifie sa mort. Tout comme dans « Vivre de la mort » qui met en lumière un fabricant de cercueils mettant tout en œuvre pour faire prospérer son affaire.
Des Maki à Elobi, fabricant de cercueils, en passant par Bamolo infirmier véreux, Kobé le sorcier, Sidi Moussa l’usurier, Mbella, Mpondo, Lucie les expatriés, Ndomé prétendante au club des veuves joyeuses, Abdoulaye le marabout, Narcisse Mouelle Kombi dépeint la misère de la condition humaine. Misère matérielle, financière, morale et spirituelle.
Certains personnages n’hésitent pas à mettre en danger la vie de leurs proches, mus par leurs petits intérêts personnels.