Culture of Thursday, 12 June 2025

Source: www.camerounweb.com

Pourquoi ce film fait autant pleurer ?

Un film touchant Un film touchant

Les réalisateurs camerounais devraient prendre exemple sur ce film et comprendre ce qu’est le 7e art. Je ne le dis pas pour critiquer leur médiocrité, mais parce qu’ils s’inscrivent dans le même registre que Tyler Perry.

Ce film ne bouleverse pas uniquement à cause du jeu d’actrice magistral de Taraji P. Henson, mais grâce à tout ce qui l’entoure. Rien n’est laissé au hasard. Dès les premières minutes, Tyler Perry plante le décor avec une maison vieillotte : des murs cramoisis, des ustensiles usés, des médicaments, un vieux plafonnier qui peine à brasser l’air…et, pour souligner l’austérité dans sa forme la plus sauvage un simple plat de nouilles— ces nouilles qui, ici en Amérique, sont le symbole de la misère.

La vaisselle sale, entassés ci et là pour exprimer débordement physique et mentale. L’atmosphère de la maison, la colorimétrie terreuse et froide posent d’emblée le postulat d’un drame. Perry y aborde des réalités souvent gommées sous les paillettes d’Hollywood : la vraie vie, celle de l’Amérique profonde.

Ce film repose sur plusieurs niveaux de lecture : le plan économique. Taraji P. Henson incarne une femme noire américaine de l’autre côté du rêve américain, une femme qui peine à joindre les deux bouts, sans assurance, vivant une précarité profonde.

Le plan socioculturel. On y voit la violence omniprésente dans les communautés afro : des clients en colère, un patron verbalement abusif, et le port d’armes légalisé par l’État, qui alimente cette philosophie du chaos et du gangstérisme.

Le plan psychologique. Jainayah Wilkinson, mère célibataire, incarne la charge mentale à son paroxysme. Ses luttes sont rudes, son quotidien est une guerre. Elle arrive même à faire de la mort de son fille un déni, un traumatisme qu’elle ne parvient pas à affronter.

Le plan politique. Une journaliste blanche fait irruption dans l’histoire. Son discours diplomatique jette subtilement l’opprobre sur les Noirs américains, comme si le problème de l’Amérique, c’était eux. Elle incarne ces médias qui travestissent la réalité sous couvert de neutralité.

Je peux me tromper sur cette analyse, dont j’assume pleinement la paternité. Mais en tant que cinéphile passionnée, c’est ce que j’ai ressenti, ce que j’ai vu, ce que j’ai compris. Un film, une série… ça doit nous bousculer. Ça doit laisser des questions, des remises en cause, une nouvelle vision du monde. Un choc. Un rire. Une colère.

Dans la bataille des chéries. On n’a jamais su de quoi souffrait ce personnage masculin. Quel était le déclencheur de sa lubricité ? Car oui, les déviances sexuelles naissent souvent d’un psychisme torturé. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Freud, lorsqu’il parle de la perversion polymorphe. Et j’insiste : les séries politiques doivent s’ancrer dans le réel, utiliser les vrais termes des constitutions, des lois du pays. Pas inventer des villes et des gouvernements imaginaires.

Dans La bataille des chéries, tout est fictif : la ville, la structure politique, les enjeux. Résultat ? Une série ludique, décorative, sans fond. Une série conçue pour endormir les esprits qui sont déjà lents à la base.

En conclusion, faire un bon film, une bonne série, exige de l’envergure, de la vision, de la culture. Ce n’est jamais l’œuvre d’une seule personne. Les meilleurs scénarios sont écrits par plusieurs plumes, nourris de multiples regards. Alors à nos actrices de bonnes fortunes, qui ont déjà leurs visas pour la France ou les États-Unis : allez-vous former. Taraji P. Henson a tourné ce chef-d’œuvre en quatre jours. Et à celles qui viennent m’insulter sur ma page, comme si j’étais responsable de la médiocrité qui vous entoure.