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Infos Sports of Thursday, 14 September 2023

Source: Le Messager

Les Lions qualifiés : de nouvelles révélations

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Stade Roumde Adjia de Garoua, en cette journée ensoleillée du 12/09/2023, un jour tout indiqué pour écrire une autre belle page de l'histoire du football camerounais, comme la sélection nationale de l'Afrique en Miniature nous y a habitués... Une décentralisation inhabituelle, avionsnous coutume de croiser les fers avec nos proies potentielles dans les deux métropoles que sont Yaoundé et Douala. Qu'à cela ne tienne, un public bigarré, effervescent, motivé et motivant ainsi que, surtout, nombreux, discipliné et ... ponctuel avait pris d'assaut toutes les places disponibles sur les gradins, en l'attente du festin prédit la veille par Rigobert Song Bahanag, ci-devant manager sélectionneur de l'équipe nationale A du Cameroun. Au menu des Lions Indomptables cette fois, carnassiers souvent empêchés ces derniers temps, des Hirondelles à la sauce Burundaise, un met est-africain qui avait déjà failli leur rester en travers de la gorge au match aller, gagné 1-0 avec beaucoup de difficultés sur une balle arrêtée de Karl Toko Ekambi. Les préalables étaient clairs : seule une victoire, peu importe le score, garantissait la qualification sur le fil à nos Lions, dans un groupe à 3 avec la Namibie, actuel leader, et le Burundi, son dauphin.


Le Kenya, frappé par une sanction de la Fifa en raison de l'ingérence gouvernementale dans la gestion de son football, est forfait général depuis février 2022. En cas de match nul, il aurait fallu une ribambelle de buts, au moins 4, pour pouvoir prendre la route d'Abidjan - trop hasardeux ! Pas surprenant donc que, en conférence de presse d'avantmatch, le coach « Magnan » promettait que « il y a des filets qui vont trembler ». Tant que c'est chez les Burundais... Il n'y avait donc qu'un seul objectif : la qualification ! Avec ou sans la manière ! Pour éviter une honte incommensurable, tout « géant » du football africain que nous sommes... Deux fois n'est pas coutume, commençons par la fin - et le positif : le Cameroun s'est qualifié au terme d'un match somme toute intense, s'offrant l'équipe nationale du Burundi sur le score final de 3 buts à zéro, comme dernière équipe pour la Coupe d'Afrique des Nations 2023 en Côte d'Ivoire. Il se dit que le chef arrive en dernier dans le protocole... Aucun joueur ne s'est blessé, malgré la combativité dont chacun a fait montre selon ses capacités. L'allégresse était aussi visible sur le banc de touche, sur les gradins et dans tous les carrés VIP abondamment fournis pour la circonstance. Un parterre de haute facture, conduit par le ministre en charge des sports, tutelle de l'équipe nationale fanion de football, Narcisse Mouelle Kombi, et le président de la Fédération camerounaise de football (Fecafoot), Samuel Eto'o Fils, en présence de diverses personnalités politiques et anciennes gloires de notre histoire footballistique, dont Joseph Antoine Bell, un des acteurs de la toute première consécration continentale des Lions Indomptables en 1984 en ... Côte d'Ivoire. Un instant assez prolongé, les interminables polémiques autour du football camerounais se sont tues, et il y avait un air d'union sacrée à Garoua, dans tout le Septentrion et tout le peuple camerounais devant les écrans de télévision ou de smartphones. À l'observation un peu plus approfondie, il appert toutefois clairement que tout n'a pas été or qui a brillé ! Deuxième conclusion, sans appel : ce n'était pas une qualification avec la manière ! La résilience du supporter camerounais a une fois de plus été durement mise à l'épreuve ! Pas à pas... Le sélectionneur national nous a surpris avec une formation et un schéma tactique d'attaque tous azimuts, avec pas moins de 5 attaquants, sans véritable protection vers l'arrière, s'appuyant sur une ligne de défense improbable jamais expérimentée. En 4-3-3, qui pouvait selon la situation de jeu se muer en 4-4-2, il affirmait sa volonté d'en découdre en première mi-temps déjà avec un adversaire que tous attendaient probablement en bloc bas ou très bas, le célèbre « bus garé devant les buts ».


Ce fut la première erreur d'appréciation, et nous ne tardîmes pas à nous en rendre compte, avec effroi ! C'est en effet dès la 4ème minute de jeu qu'on enregistra la première parade fantastique du « revenant » André Onana, gardien de but émérite, qui a bien voulu interrompre sa retraite internationale au moins pour ce match capital, se retrouvant par-devers lui au centre de l'attention après des mois d'incompréhensions polémisantes. Il répètera un tel exploit 5 fois, pas moins, pendant la première manche seulement de cette partie, désespérant une attaque burundaise que l'adversaire avait mise en confiance, qui n'avait que très peu de peine à se retrouver dans le premier tiers camerounais. Onana dut laisser ses marques jusque dans les arrêts de jeu de la première mi-temps avec une autre parade d'anthologie. Là où on aurait pu s'attendre à un bloc bas des Hirondelles, ouvrant la possibilité au jeu en hauteur du titulaire de Manchester United, les assauts répétés des attaquants adverses l'ont obligé à tenir sa cage de près et renoncer à ses célèbres relances. Ce d'autant plus que le bloc défensif des Lions Indomptables, même en phase de relance et d'organisation offensive, n'arrivait pas à avancer de plus d'une vingtaine de mètres et restait recluse près au premier tiers du champ de jeu. Pas de problème pour le nominé au top 30 du Ballon d'Or édition 2023, quand on a des qualités tout aussi impressionnantes sur la ligne et une excellente capacité d'adaptation à l'environnement de jeu ! Monter pour monter, très peu pour lui ! D'ailleurs, l'occupation des zones laissant fortement à désirer dans le jeu sans ballon de ses coéquipiers, ses fameuses relances du pied n'avaient que très peu de chances de prospérer. Il y a intelligemment renoncé. Sans conteste, nous tenons ici l'homme du match, le véritable gagnant d'une histoire qui aurait pu tourner au vinaigre pour toute l'équipe et son encadrement, certes, mais tout particulièrement pour lui. Ceci, déjà, est un témoignage plus que révélateur du déroulé de cette partie. D'un calme et d'une sérénité remarquables, d'une assurance providentielle, André Onana a su en 90 mn, avec ce récital, se ramener dans les faveurs de ses détracteurs les plus « sincères » et asseoir sa suprématie du moment dans les cages des Lions Indomptables du Cameroun, où on souhaiterait le voir rester plus longtemps, au-delà de ce match qualificatif à la gloire de la nation sportive. Match référence d'un gardien de but référence ! Preuve de l'arduosité de la tâche : la toute première occasion de but des Lions Indomptables fut enregistrée à la 38ème minute seulement par le virevoltant Bryan Mbeumo apparaissant seul devant le gardien burundais qui, malheureusement, para avec grande classe à la Onana ! Ça ne peut raisonnablement pas être ce que prévoyait le script de ce film... Sur le couloir gauche de l'attaque, Karl Toko Ekambi, tirant probablement profit de ses capacités de « climatiseur » depuis l'épopée historique de Blida, qualificative pour la Coupe du monde Fifa Qatar 2022, avait à notre surprise été aligné dans le onze entrant en lieu et place d'un Clinton Njie auteur d'un début de saison en or massif avec son club turc de Sivaspor. Il n'aura cette fois ni fait ni marqué l'histoire, soit dit. Perdu sur son côté gauche en première mi-temps, mais animé par une certaine rage de (con)vaincre, ce n'est pas rarement qu'on le retrouvait à droite avec Mbeumo, limitant les espaces de déploiement. Ce Le Cameroun sera donc à la Can dernier, dans une forme splendide en club, sous les feux de mire avec Brentford en Premier League, le championnat de football le plus prestigieux du monde, a résolument pris le pouvoir sur le couloir droit, sur tout le couloir droit, avec un volume de jeu énorme que son « coffre », du jargon footballistique pour son endurance physique, lui permet avec aisance. Combien de fois ne l'avons-nous pas vu en duel serré - et gagné - aux abords de notre surface de réparation, là où Olivier Mbaizo avait en fait élu domicile ? Pour le retrouver quelques instants après à l'affût de ballons négligés 70 m plus loin, comme pour son but libérateur 20 secondes après le retour des vestiaires, un coup de froid pour les ambitions nourries des Hirondelles qui, dès lors, ont commencé à battre de l'aile... Dans un jeu totalement décousu, qui ne laissait entrevoir aucun plan véritable, du moins aucun autre que « attaquez, allez de l'avant et faites trembler les filets », le même scénario se faisait jour à une fréquence élevée au milieu de terrain où Zambo Anguissa et le pourtant très doué Olivier Kemen (Kayserispor/Turquie) se marchèrent sur les pieds 60 minutes durant avec une orientation naturelle par trop offensive, ce qui permit au Burundi de se frayer chaque fois très rapidement et avec peu d'adversité le chemin vers la cage d'André Onana, le fraîchement baptisé « Onanachou ». Il aurait fallu dans cette constellation, pour plus de stabilité, un milieu défensif qui pense ... défensif aux côtés d'un Zambo Anguissa relayeur, offrant par la même plus de répit à la défense centrale qui avait fort à faire. Avec l'entrée de Samuel Oum Gouet, à un moment où, il faut quand même le dire, la résistance du Burundi était déjà quelque peu brisée après 2 fautes cataclysmiques avec effet immédiat, 2 buts servis au Cameroun sur un plateau d'argent, cette stabilité défensive s'installa, et on put enfin voir le Zambo Anguissa qui fait depuis 2 saisons le bonheur des Napolitanos. Cette fébrilité et permissivité dans l'entrejeu ont donné l'opportunité à Christopher Wooh, le sociétaire du Stade Rennais, et surtout Harold Moukoudi (AEK Athènes) de laisser ce jour une empreinte indélébile dans cette défense des Lions Indomptables ! C'est avec une sérénité certaine qu'ils ont souvent su désarçonner les attaquants Burundais, Wooh évoluant plus en couverture (rapprochée) et Moukoudi sur l'homme, teigneux, tenace et vorace, agissant sans compromission, forçant le respect. Leur parfaite synchronisation, la seule d'ailleurs dans tous les compartiments de jeu en ce jour, permit quelques fois à Wooh une participation sereine à la construction du jeu, dont un des résultats fut son premier but en sélection nationale, le 2ème de ce match.


Il savait ses arrières bien protégés par Moukoudi dont l'appréciation élogieuse de la performance tient probablement du fait qu'il n'était pas le plus attendu à ce poste. Il a livré un argument de poids pour ses revendications de convocations régulières, après avoir été recalé pour l'épopée qatarie 9 mois plus tôt. Heureusement que les lacunes de nos hommes sur les côtés à l'arrière, trop souvent permissibles avec un Mbaizo quasitransparent et un Nouhou Tolo trop occupé à poursuivre son adversaire du jour, ont pu être compensées par la maestria de l'axe central. Le relais organisé relevant donc de l'extraordinaire en ce match, il est tout à fait logique qu'on ait vu une pointe de l'attaque flottante, perdue, à la percussion généralement fortuite. L'histoire est vite racontée... Vincent Aboubakar, d'habitude valeureux, malgré son but en fin de match pour le « tuer », n'a pratiquement rien réussi, même, et c'est assez surprenant, sur le plan technique. N'eût été le crédit de confiance dont il bénéficie, et le manque d'alternative sérieuse dans le groupe pour un match de cette envergure et avec cet enjeu, son remplacement au plus tard à l'heure de jeu n'aurait pas fait jaser. La 99ème sélection de l'avantcentre de Besiktas Istanbul ne rentrera pas dans les annales comme sa plus belle. Quant à Eric Maxim Choupo-Moting, le Bavarois du Bayern Munich, qui s'est illustré par quelques dribbles sur la distance (étrange, non ?) et tentatives de passes en profondeur, plus 10 que faux 9, le plus positif aura été le précieux temps de jeu et l'absence de blessure. Son remplacement à la 78ème minute était tout à fait logique, même si son remplaçant, Samuel Oum Gouet, lui, ne l'était pas forcément. Cette correction à l'attaque ouvrit quelques espaces dans une défense burundaise finalement exténuée et aboutit sur le but coupe-lumière d'Aboubakar.

Les Lions Indomptables du Cameroun sont donc qualifiés pour la Can 2023 en Côte d'Ivoire, et nos frères jumeaux poussent un ouf de soulagement aussi retentissant que le nôtre. Le spectre cauchemardesque d'une fête du football là-bas sans la rivalité quarantenaire entre les deux pays, c'était moche. Mais nous ne nous sommes certainement pas qualifiés parce que nous avons bien joué et sommes les plus forts que, en bons Camerounais, nous croyons toujours être, il faut avoir le cran de le dire ! Un fond de jeu inexistant, une identité plus que floue, une cohésion brinquebalante entre les différents compartiments de jeu sont, sans aucune prétention à l'exhaustivité, autant de tares qui montrent l'étendue du travail nécessaire afin de surprendre positivement au bord de la Lagune Ebrié. La combativité, le soi-disant hemlé, ne peut pas être le socle permanent et exclusif de nos victoires ! Un chauvinisme déplacé et mal compris, que d'aucuns dans leurs délires assimilent au patriotisme, ne nous aidera ici qu'à nous voiler les yeux devant des vérités criardes et douloureuses. Peut-être que le retour de cadres comme Jean-Charles Castelletto, Collins Faï et l'intégration à terme de jeunes loups comme Olivier Tcham, François Mughe, Elliott Njongoue, ou d'autres à venir, pourrait contribuer à construire un squelette solide et performant... Tout aussi courageusement doit être dit que la sélection nationale actuelle est à l'image du guerrier intrépide parfois brouillon mais souvent victorieux qu'était le « Capitaine Courage » de son temps sur les terrains. Rigobert Song Bahanag, le sélectionneur principal, ès qualités premier responsable de l'organisation du jeu, sait donc plus que quiconque que ça use, aussi bien l'équipe que les supporters et leur motivation. Ergo, il ne lui aura certainement pas échappé qu'il doit lui-même s'élever techniquement et tactiquement à un tout autre niveau pour éviter que le bateau ne chavire avant la destination ! Le désir de bien faire n'est qu'un préalable au succès qu'on ne saurait mesurer, quand on est le Cameroun avec son histoire, qu'aux résultats souvent à l'arraché. On est en droit, après un long temps de répit, de se demander à quoi servent les fréquents rassemblements et matchs amicaux, si ce n'est à dégager une identité de jeu et une équipe-type. L'équipe nationale fanion du football camerounais, en l'état actuel, ne rassure en rien, sauf peut-être dans la conviction que beaucoup est à refaire ! Par l'encadrement technique actuel ou un autre... Ce n'est, malgré toute la passion, que trop volontiers que nous n'allons néanmoins pas laisser notre sport-roi servir une énième fois de bienvenu maquillage pour les nombreux problèmes sociétaux auxquels le peuple camerounais est confronté. Il est et doit rester une distraction passagère, un espace clos de repli revigorant ! Vive les Lions !