L'épilogue d'une saga embarrassante. À une semaine de la Coupe d'Afrique des Nations au Maroc, le feuilleton Marc Brys vient de connaître son dénouement. Le sélectionneur belge des Lions Indomptables a officiellement remis sa démission, mettant fin à des mois de tensions institutionnelles qui ont paralysé le football camerounais.
Selon des révélations exclusives du quotidien flamand Het Laatste Nieuws, Marc Brys a accepté de quitter son poste contre une indemnité de départ de 65 000 euros, soit environ 42,5 millions de francs CFA. Un montant qui tranche radicalement avec les spéculations qui circulaient dans les médias camerounais, certains évoquant des sommes dépassant les 3 milliards de FCFA.
Cette différence monumentale entre les chiffres annoncés et la réalité révélée par la presse flamande soulève des questions sur la nature des négociations qui ont permis d'aboutir à ce consensus. Comment le technicien belge, dont le contrat courait jusqu'en septembre 2026, a-t-il pu accepter une compensation aussi modeste alors qu'il semblait déterminé à défendre ses droits ?
La clé réside dans une particularité contractuelle révélée par nos sources : Marc Brys n'avait pas de contrat signé directement avec la Fédération camerounaise de football (FECAFOOT). Son engagement était lié au ministère des Sports, ce qui l'empêchait de saisir la FIFA pour réclamer d'éventuelles indemnités. Une situation juridique qui a considérablement affaibli sa position lors des négociations de sortie.
Face à cette impasse, le technicien belge aurait choisi de déposer une lettre de démission, permettant ainsi d'ouvrir la voie à un accord à l'amiable. Cette stratégie, bien que frustrante sur le plan financier, lui garantit au moins une sortie formalisée et évite un conflit juridique potentiellement long et coûteux.
L'abandon définitif de Marc Brys a été officialisé lors d'une réunion cruciale de préparation pour la CAN 2025, tenue le 1er décembre. À cette occasion, le ministre des Sports, Narcisse Mouelle Kombi, qui était jusqu'alors le principal soutien du sélectionneur belge face aux assauts de Samuel Eto'o, a confirmé son limogeage.
Ce revirement du Minsep marque un tournant politique majeur. Pendant des mois, Marc Brys avait cru pouvoir compter sur l'appui du ministère pour résister aux pressions de la FECAFOOT. Mais dans le football camerounais, les alliances sont fragiles et les rapports de force peuvent basculer du jour au lendemain.
Le bras de fer entre Marc Brys et Samuel Eto'o, président de la FECAFOOT, aura tenu en haleine tout le football camerounais pendant plusieurs semaines. Le point culminant de cette crise a été atteint lorsque deux listes distinctes de joueurs sélectionnés pour la CAN ont été rendues publiques.
La première liste, établie par le staff technique soutenu par la Fédération, avait choqué par l'absence de plusieurs cadres emblématiques de l'équipe nationale. La seconde, publiée par Marc Brys lui-même, avait achevé de plonger supporters et observateurs dans la confusion la plus totale. Pour la première fois de l'histoire récente du football camerounais, personne ne savait réellement qui était sélectionné et qui dirigeait véritablement les Lions Indomptables.
Marc Brys n'avait pas mâché ses mots, dénonçant publiquement ce qu'il qualifiait de tentative de déstabilisation orchestrée par la hiérarchie fédérale. Il accusait Samuel Eto'o et son entourage de sabotage délibéré, dans le but de le pousser vers la sortie.
Avec ce départ enfin acté, le Cameroun retrouve un minimum de lisibilité institutionnelle. Les Lions Indomptables savent désormais qui est aux commandes et peuvent théoriquement se concentrer sur leur préparation pour le tournoi continental. Le premier match face au Gabon est prévu le 24 décembre, soit dans moins d'une semaine.
Mais sur le terrain, les cicatrices de cette crise risquent de mettre du temps à se refermer. Pendant des semaines, les joueurs ont été pris entre deux feux, ne sachant plus à quelle autorité se vouer. Certains avaient été convoqués par Brys, d'autres par le staff désigné par Eto'o. Cette situation kafkaïenne a créé des divisions au sein du vestiaire et semé le doute sur la légitimité même du projet sportif.
Plusieurs interrogations demeurent sans réponse à l'issue de cette affaire. Pourquoi Marc Brys, recruté en avril 2022 avec le soutien apparent du ministère des Sports, n'a-t-il jamais eu de contrat direct avec la FECAFOOT ? Cette anomalie contractuelle était-elle délibérée, ou résulte-t-elle de la guerre institutionnelle chronique entre le Minsep et la Fédération ?
Autre question cruciale : comment l'équipe nationale parviendra-t-elle à se remobiliser mentalement et sportivement après des mois de chaos administratif ? Les Lions Indomptables ont l'habitude des crises - le football camerounais en produit régulièrement - mais celle-ci intervient au pire moment, à la veille d'une compétition continentale majeure.
Ce dénouement représente une victoire claire pour Samuel Eto'o, qui aura finalement réussi à imposer sa vision et son autorité. L'ancienne légende du football camerounais, devenu président de la FECAFOOT en décembre 2021, a montré qu'il était déterminé à exercer un contrôle total sur la sélection nationale, quitte à provoquer des crises institutionnelles.
Mais cette victoire a un coût. Le football camerounais sort affaibli de cet épisode, son image ternie par des semaines de confusion et de conflits publics. Les supporters, déjà échaudés par des décennies de mauvaise gouvernance du football national, ont assisté impuissants à un nouveau feuilleton indigne d'une nation qui se veut grande puissance du football africain.
Arrivé au Cameroun en avril 2022 avec l'ambition de reconstruire une équipe nationale en difficulté, Marc Brys aura finalement connu une aventure tumultueuse de moins de quatre ans. Son bilan sportif restera difficile à évaluer, tant les conditions dans lesquelles il a travaillé ont été perturbées par des querelles institutionnelles qui le dépassaient.
La révélation du montant de son indemnité de départ par Het Laatste Nieuws - 42,5 millions de FCFA - sonne comme un épilogue presque dérisoire pour un conflit qui aura mobilisé tant d'énergie et généré tant de tensions. Marc Brys repart pour la Belgique avec une expérience africaine qu'il n'oubliera certainement pas, mais qui laisse le football camerounais face à ses vieux démons : l'instabilité institutionnelle, les guerres d'ego et l'incapacité chronique à placer l'intérêt sportif au-dessus des considérations politiques.
À huit jours du coup d'envoi de la CAN 2025, les Lions Indomptables doivent maintenant transformer cette page douloureuse en énergie positive. Un défi immense pour une équipe qui arrive au Maroc avec des blessures invisibles mais bien réelles.









