Dans une sortie médiatique aussi rare que fracassante, l'opposant Guy Mesmin Wambo a dénoncé avec véhémence la gestion du pays par le président Paul Biya, affirmant que "le Cameroun est dans l'abîme".
Invité de l'émission Canal Presse sur Canal 2, le leader politique n'a pas mâché ses mots face à l'argument classique selon lequel "le temps appartient au président de la République". Une formule souvent utilisée pour justifier les lenteurs dans la prise de décisions au sommet de l'État.
"Vous avez tantôt dit que le temps appartient au président de la République. C'est de cette façon que nous avons conduit la République", a lancé Guy Mesmin Wambo, avant de dresser un constat alarmant de la situation institutionnelle du pays.
L'opposant a soulevé des questions qui interpellent : "En combien de temps on a tenu un conseil des ministres ? En combien de temps on a tenu un conseil de la magistrature ? Tout le monde est dans la souffrance."
Ces interrogations font écho aux préoccupations croissantes d'une partie de l'opinion publique camerounaise face à la raréfaction des instances de décision au sommet de l'État. Le dernier conseil des ministres remonte à plusieurs mois, tout comme le conseil supérieur de la magistrature, créant un vide institutionnel que dénoncent de plus en plus d'observateurs.
Guy Mesmin Wambo s'est ensuite attaqué frontalement à la doctrine qui entoure l'exercice du pouvoir au Cameroun depuis des décennies.
"On ne peut pas être dans un pays où il y a autant de préoccupations et nous dire que le président de la République a son temps, il n'est pas pressé, ce n'est pas quelqu'un à qui on met de l'influence. Non. Ce n'est pas ça", a-t-il martelé avec conviction.
Pour l'opposant, cette conception du pouvoir est incompatible avec les principes démocratiques fondamentaux : "Le président de la République exerce son mandat au nom du peuple camerounais. Il est là pour résoudre les préoccupations des Camerounais."
C'est dans la conclusion de son intervention que Guy Mesmin Wambo a prononcé les mots les plus durs de son analyse : "Et aujourd'hui, tel que nous avons vu notre pays, je pense qu'il faut le dire de façon honnête, le pays est dans l'abîme."
Cette déclaration choc intervient dans un contexte particulièrement tendu au Cameroun. Le remaniement ministériel tant attendu tarde à être annoncé, les instances institutionnelles fonctionnent au ralenti, et de nombreux dossiers majeurs restent en suspens.
Les propos de Guy Mesmin Wambo ont immédiatement suscité des réactions sur les réseaux sociaux et dans les milieux politiques camerounais. Certains y voient une analyse lucide de la situation du pays, d'autres dénoncent une sortie jugée excessive.
Cette intervention s'inscrit dans une séquence politique marquée par des interrogations croissantes sur la gouvernance du pays. Entre le blocage du remaniement ministériel autour des cas Ferdinand Ngoh Ngoh et Laurent Esso Mvondo Ayolo, l'absence prolongée de conseils des ministres, et la multiplication des défis sécuritaires, économiques et sociaux, les Camerounais attendent des signaux forts de la part du pouvoir.
La question reste posée : le président Paul Biya entendra-t-il ces critiques de plus en plus virulentes, y compris au sein de sa propre majorité, ou maintiendra-t-il le cap d'une gouvernance selon son propre calendrier, loin de toute pression ?









