La mort de Djeukam Tchameni continue de faire parler. Certaines sources parlent d'assassinat de l'opposant, président du Manidem. Djeukam Tchameni, le codétenu d'Anicet Ekane raconte comment son camarade de lutte a été assassiné.
Anicet Ekane est mort le 1er décembre 2025 à l'infirmerie du Secrétariat d'État à la défense (SED). Il était 7 heures du matin. La triste nouvelle s'est répandue comme une traînée de poudre, d'abord parmi les gendarmes, puis chez les détenus politiques. Les murmures des premiers instants se sont au fil du temps transformés en une clameur, puis des cris de douleur et enfin un tonnerre d'indignation. Anicet Ekane a été tué.
Le président Ekane était certes malade au moment de sa brutale arrestation le 24 octobre 2025 par des éléments criminels de la DGRE, mais il n'est pas mort de sa maladie. Ses médecins privés étaient formels, sa condition médicale était gérable et il aurait pu vivre de nombreuses années supplémentaires s'il bénéficiait du suivi médical approprié. Comment expliquer donc qu'il décède 40 jours à peine après son arrestation ? Eh bien, la réponse est simple. Il a été assassiné.
Je m'en vais vous dire qui a commandité le crime et qui sont ceux qui l'ont exécuté. Je vais vous dévoiler qui a commandité le crime et qui sont ceux qui l'ont exécuté. Le président Anicet Ekane et moi avons été arrêtés dans la nuit du 24 octobre 2025, douze jours après la victoire dans les urnes d'Issa Tchiroma Bakary et trois jours avant la proclamation par Clément Atangana des résultats frauduleux qui faisaient de Paul Biya un vainqueur illégitime. Co-fondateur de l'Union pour le changement en 2025 (UPC 2025), nous avons été les architectes et les stratèges de la défaite cuisante du candidat du RDPC.
Du 13 septembre 2025 au 11 octobre 2025, l'UPC 2025 a investi un candidat consensuel du peuple, mené une campagne non-partisane et non-sectaire basée sur un programme commun de transition et de refondation. Nous avons exclu de notre stratégie le culte de la personnalité et le messianisme politique. Nous nous sommes éloignés de toutes les personnes qui tiendraient un discours tribaliste ou clivant. Notre candidat a joué sa partition avec intelligence, sagesse et brio. Le peuple a montré sa maturité en lui donnant une victoire de près de 60 % contre à peine 30 % pour l'ex-président de la République.
En clair, l'Union pour le changement et son candidat avaient choisi d'accéder au pouvoir par la voie institutionnelle, par les urnes et dans la paix. Nous étions loin d'imaginer que nos adversaires choisiraient de nous répondre par les armes, les arrestations et les morts.
Arrêtés préventivement trois jours avant les émeutes marquant le début de la crise post-électorale, Anicet Ekane a été tué avec 50 autres Camerounais qui avaient comme lui cru au retour effectif de la démocratie dans notre pays. Les cinquante autres martyrs de la liberté ont été tués par balles. Anicet a été assassiné en deux temps, ponctués de souffrances atroces, comme si les commanditaires et les exécutants de ce crime odieux tiraient un bénéfice maléfique de le voir mourir à petit feu.
Je dis et je répète, ils ont tué Anicet Ekane. Le premier coup mortel a eu lieu le 24 octobre 2025 pendant son arrestation. Des voyous lourdement armés font irruption dans nos domiciles respectifs sans mandat d'amener ni mandat de perquisition. Ils nous arrêtent sans ménagements, fouillent de fond en comble nos maisons, emportant téléphones, ordinateurs et autres babioles. Chez moi, ils volent la rondelette somme de 2 000 euros et 500 dollars américains ; chez Anicet, ils emportent son extracteur d'oxygène dont il a besoin pour respirer normalement.
Nous sommes ensuite cagoulés, mis dans deux véhicules différents et directement acheminés au service central des recherches judiciaires au SED. Pour moi qui suis en excellente santé, ce voyage inconfortable qui dure 5h30 me laisse des douleurs musculaires qui persistent jusqu'à ce jour. Pour Anicet, cela a dû être un enfer.
Cagoulé, privé de son extracteur d’oxygène, assis entre deux miliciens armés jusqu'aux dents, incapable de respirer correctement pendant une demi-dizaine d'heures, ce voyage, sur une route moyenâgeuse, Anicet recevait son premier coup mortel. Il le savait, quand on a finalement pu se parler au SED, les premiers mots de Anicet à mon endroit ont été « Président Djeukam Tchameni, je ne me remettrai jamais de ce voyage ».
Les criminels qui nous ont arrêtés sont de la DGRE. Leur ancien chef de gang, Eko Eko, est en prison, inculpé du meurtre du journaliste Martinez Zogo. Cette organisation mafieuse, qui opère en marge de la loi, a aussi, dans la matinée du 25 octobre 2025, arrêté le professeur Aba Oyono dans son domicile sis-à Yaoundé. Dans les échauffourées entourant son brutal kidnapping, les exécutants ont gravement blessé l'index de la main droite de son épouse et ce doigt a dû être amputé, laissant à cette mère de dix enfants une séquelle à vie. Ce crime ne restera pas impuni.
Le deuxième coup de poignard qui occasionnera la mort prématurée du président Anicet Ekane est la confiscation de son extracteur d'oxygène. Sa maladie exigeant la présence à portée de main de cet appareil car ses poumons n'arrivaient plus à extraire naturellement de l'air en quantité suffisante. Cet appareil lui était nécessaire pour supporter la vie.
Certes, l'infirmerie du SED disposait d'un appareil similaire, mais il était moins performant que celui qui avait été confisqué par la légion de gendarmerie du Littoral. Malgré les demandes pressantes, mais sans suite des avocats d'Anicet Ekane, il a fallu que Maître Nguefack fasse un scandale sur RFI pour que cet appareil soit remis au malade 35 jours après sa confiscation. Eh bien, il était trop tard ; le mal était déjà fait. Malgré la courageuse résistance de ce combattant émérite, la mort a eu le dessus au matin du 1er décembre 2025.
Voici donc comment l'assassinat d'Anicet Ekane a été mis en œuvre. On connaît les exécutants. Mais qui sont les commanditaires ? Qui a ordonné l'arrestation prématurée ou préventive du président Anicet Ekane, du président Dieukam Tchameni et du Professeur Aba'a Oyono ?
La réponse devrait être simple. Le commanditaire de l'arrestation et donc de la mort de Anicet Ekane n'est nul autre que Paul Biya, qui s'accroche au pouvoir malgré sa défaite cuisante à l'élection présidentielle du 12 octobre 2025. Son refus d'accepter le verdict des urnes a plongé le Cameroun dans une crise post-électorale qui risque de détruire le pays.
Mais à 92 ans, et après 43 ans de pouvoir sans partage, Paul Biya est-il encore au contrôle ? Un nonagénaire qui n'a pas pu faire campagne a-t-il la force de résister à un peuple qui l’a clairement vomi ? Assistons-nous en direct à un cas flagrant d'abus de faiblesse commis par un entourage restreint qui veut s'accrocher à ses avantages colossaux ?
Même dans la mort, Anicet contribuera au combat. Son décès prématuré pourrait permettre de répondre à la question « qui gouverne le Cameroun ? ».









