La crise post-électorale camerounaise s'est invitée dans les couloirs du sommet du G20. Selon des sources concordantes, le président français Emmanuel Macron a eu un entretien en aparté avec le vice-président nigérian Kashim Shettima lors du sommet des chefs d'État et de gouvernement qui se tient actuellement à Rio de Janeiro. Au cœur de leurs discussions : le cas de l'opposant camerounais Issa Tchiroma Bakary.

L'information, révélée par Bachirou Mamouda, observateur des questions politiques de la région, témoigne de l'internationalisation croissante du dossier Tchiroma. Le leader de l'opposition camerounaise, qui conteste les résultats de la présidentielle du 12 octobre 2025, a trouvé refuge en Gambie le 7 novembre dernier, après avoir transité par le Nigeria où il a séjourné plusieurs jours dans l'État de l'Adamawa.


La présence du vice-président Kashim Shettima, figure influente de l'administration nigériane, à cet entretien n'est pas anodine. Le Nigeria, pays frontalier du Cameroun et poids lourd de la région, joue un rôle central dans cette crise. C'est d'ailleurs sur son territoire que l'opposant camerounais avait d'abord trouvé refuge avant de gagner Banjul.


L'implication du président français dans ce dossier s'inscrit dans un contexte historique particulier. Comme le rappelle Bachirou Mamouda, au Nigeria, les Camerounais sont communément appelés "dan farança" en langue haoussa, une expression qui signifie littéralement "fils des Français". Cette appellation traduit la perception persistante des liens étroits entre la France et son ancienne colonie, notamment dans la partie francophone du Cameroun.
Ces relations historiques expliquent en partie pourquoi Paris suit avec attention l'évolution de la situation politique camerounaise, d'autant que la crise actuelle touche particulièrement les régions anglophones du pays, théâtre depuis plusieurs années d'un conflit séparatiste meurtrier.
Une diplomatie à plusieurs étages

Cet échange en marge du G20 intervient alors que les autorités gambiennes ont confirmé officiellement, le 23 novembre, accueillir Issa Tchiroma Bakary "sur des bases purement humanitaires dans un esprit de solidarité africaine". Le gouvernement de Banjul a également précisé qu'il s'engageait "auprès de partenaires régionaux pertinents, y compris la République fédérale du Nigeria, pour soutenir une issue pacifique et négociée" à la crise post-électorale camerounaise.


L'entretien Macron-Shettima suggère que les discussions diplomatiques se poursuivent à différents niveaux pour tenter de trouver une solution à cette crise qui menace la stabilité d'une région déjà fragilisée par de multiples tensions sécuritaires.

Le Nigeria apparaît comme un acteur incontournable de toute résolution de la crise camerounaise. Non seulement par sa proximité géographique et les liens communautaires transfrontaliers, notamment au sein de la communauté peule, mais aussi par son poids politique et économique dans la sous-région ouest-africaine.
Le fait que le vice-président Kashim Shettima, originaire du nord-est du Nigeria et fin connaisseur des dynamiques sahéliennes, ait été l'interlocuteur d'Emmanuel Macron sur ce dossier souligne l'importance accordée par Abuja à cette question.

Ni l'Élysée ni la vice-présidence nigériane n'ont pour l'instant communiqué officiellement sur le contenu de cet entretien, conformément à la discrétion habituelle des échanges diplomatiques en marge des grands sommets internationaux. Toutefois, cette rencontre marque une nouvelle étape dans la gestion internationale d'une crise qui dépasse désormais largement les frontières camerounaises.