Les partisans de Cabral Libii réclament avec insistance un face-à-face avec Tchiroma, mais restent étonnamment silencieux quant à un débat direct avec le président-candidat Paul Biya.
Une stratégie de campagne pour le moins surprenante est observée dans le paysage politique camerounais. Alors que les partisans de Cabral Libii réclament avec une ferveur notable un débat télévisé entre leur candidat et le ministre Issa Tchiroma, ils ne manifestent pas la même insistance pour un face-à-face direct avec le président Paul Biya, candidat à sa propre succession.
"Avant, c'était Maurice Kamto que les libistes voulaient affronter sur les plateaux. Maintenant que ce dernier s'est mis en retrait, leur nouvelle cible est Issa Tchiroma. Pourquoi cette obstination à vouloir débattre avec les autres opposants, mais pas avec le principal concerné, celui qui détient le bilan à défendre et dont le fauteuil est convoité ?", s'interroge un observateur politique à Yaoundé.
Cette focalisation sur les figures de l'opposition plutôt que sur le sortant fait naître des questions quant aux réelles motivations stratégiques. Le professeur Libii, souvent présenté comme un tribun redoutable, semble éviter soigneusement de réclamer la confrontation ultime avec le chef de l'État sortant.
Plusieurs hypothèses sont avancées par les analystes. Pour certains, il s'agirait d'une manœuvre visant à s'imposer comme le leader de l'opposition sans directement défier le pouvoir en place. "C'est plus sûr de s'attaquer à Tchiroma qu'à Biya. On gagne en visibilité sans prendre le risque d'un combat frontal avec l'appareil d'État", analyse un militant RDPC sous couvert d'anonymat.
D'autres y voient une reconnaissance implicite de la stature présidentielle de Paul Biya. "Demander un débat avec Biya comme on le ferait avec un autre candidat, c'est nier son statut de président en exercice. Les libistes, consciemment ou non, respectent cette barrière", estime un journaliste politique.
Le silence relatif autour d'un éventuel débat Libii-Biya est d'autant plus paradoxal que, comme le rappellent les supporters du RDPC, "celui qui a un bilan à défendre, c'est bel et bien le président Paul Biya". Dans une campagne normale, c'est vers le sortant que se tourneraient naturellement les demandes de comptes.
"Cette absence de revendication d'un débat direct avec le principal intéressé donne matière à réfléchir", poursuit notre observateur. "Est-ce par respect protocolaire, par calcul électoral, ou par reconnaissance tacite de l'impossibilité d'une telle confrontation ?"
Alors que la campagne présidentielle s'intensifie, cette singularité dans les demandes de débats de l'équipe Libii continue d'alimenter les conversations politiques et pourrait révéler les limites non-dites du champ des possibles dans le paysage électoral camerounais.