Actualités of Tuesday, 23 September 2025

Source: www.camerounweb.com

Paul BIYA : l’esthétique au service du politique

Paul Biya Paul Biya

En mobilisant les ressources du 9e art pour proposer, surla base de faits marquants, la trajectoire du président de la République à partir d’une perspective inédite, MANAOUDA MALACHIE vient enrichir, d’une démarche originale, l’offre éditoriale consacrée à « L’homme du Renouveau ». Résultat : une bande dessinée qui vaut le détour



Les chiffres, a-t-on coutume de dire, parlent d’eux- mêmes ! Si l’on exclut les deux pages consacrées à « l’avant-pro- pos » signé de son auteur, « Le Président Paul BIYA en BD. Itinéraire d’un homme d’Etat visionnaire », l’on dénombre 122 planches à travers lesquelles se donne à voir le Président de la République, sur 92 ans, dont 63 de service dans la haute administration, et 43 de magistrature suprême. L’entreprise éditoriale de MA- NAOUDA MALACHIE s’impose ainsi par son audace, d’entrée de jeu. Mais cette entrée par les statistiques, pour important qu’elle soit, n’est que l’une des clés de l’ouvrage. La succession des bandes, l’enchaînement des bulles, le déploiement des récitatifs, s’inscrivent, on s’en rend rapidement compte, dans le double registre de la restitution et de la re- constitution. Restitution des étapes d’un parcours singulier, et reconstitution d’une trajectoire particulière, qui marquent d’une empreinte notable notre histoire collective. Au gré des dates marquantes, des lieux significatifs, des déclarations historiques, des choix parfois cornéliens, le personnage central de cette Bande Dessinée apparaît tel qu’en lui-même : un brin énigmatique, mais pragmatique, endurant et résiliant, alliant fermeté et flexibilité, ouverture au dialogue et disposition au consensus, au gré des circonstances, des enjeux et des contraintes. Ce que l’on (re)voit, ce n’est pas seulement un cursus scolaire et académique solide (de l’école catholique de Nden à l’Institut des Hautes Etudes d’Outre-mer, en passant par l’Institut d’Etudes Politiques de Paris). Ce que l’on (re)voit, c’est aussi les responsabilités exercées dans l’appareil d’Etat, jusqu’aux plus hautes fonctions à la faveur de la succession constitutionnelle de novembre 1982. Ce que l’on (re)voit c’est égale- ment le choix de la légitimation de son pouvoir par voie électorale (et ce, dès janvier 1984), les mutations impulsées au sein du parti unique, de- venu parti dominant suite à la restau- ration du multipartisme, le recours aux Institutions financières internationales pour faire face à la crise éco- nomique, l’option du règlement pacifique du différend frontalier avec le Nigeria, ou encore celle d’une coopé- ration internationale toute de prudence et de réalisme, l’élaboration et la conduite des politiques publiques dans divers domaines, entre autres repères. Bref, de cette Bande Dessinée, Paul BIYA, homme d’Etat, n’est pas seulement le personnage central. L’auteur a décidé de le hisser au rang de héros.

« L’héroïsme du Président, affirme MANAOUDA MALACHIE, se situe au bout d’une expérience riche en rebondissements dont cette bande dessinée se propose d’offrir une expérience narrative accessible au plus grand nombre de lecteurs : jeunes et moins jeunes, citadins et ruraux, hommes et femmes, universitaires et écoliers, opérateurs politiques et acteurs de la société civile trouveront dans cet ouvrage les émotions et les nuances qu’un récit textuel n’aurait pas permis d’’exprimer ». (p.5) Il faut le dire avec force : la dynamique éditoriale de cet ouvrage est soutenue par deux choix majeurs qui en sont d’importants atouts. D’une part, celui de privilégier les FAITS et leur (re)mise en contexte, ce qui en dit long sur le caractère exigeant et méticuleux de la recherche. D’autre part, le recours à JAIMES, dont l’ingéniosité et la finesse, contribuent à assurer une compréhension claire des situations historiques mobilisées et traitées, dans une langue accessible, et un style vivant. De cette combinaison tout en complémentarité (textes factuels et dessins inspirés), émerge l’image de Paul BIYA, capitaine tenant fermement, par temps de météo clémente comme par moments de vents contraires, le gouvernail du « bateau Cameroun », dont un éminent membre de l’équipage se demandait s’il était « dans la tourmente », il y a quelques décennies Depuis lors, beaucoup d’eau coulé sous les ponts. De nombreux ouvrages consacrés à celui que l’on appelle le « sphinx » ont été publiés : de Paul BIYA. Les secrets du pouvoir (Michel Roger EMVANA), au plus ré- cent Paul BIYA ou la cohérence d’un grand homme d’Etat (Narcisse MOUELLE KOMBI), en passant par Le Code BIYA (François MATTEI), Au Cameroun de Paul BIYA (Fanny PIGEAUD), ou encore Les 200 plus belles citations de Paul BIYA signées d’un certain MANAOUDA MALACHIE… Ce-dernier est resté fidèle à lui- même, résolu à tracer, voire à renforcer les lignes d’originalité d’une production éditoriale, qui se veut en même temps un acte d’engagement et l’expression de sa loyauté envers « L’homme du Renouveau ». Et de fait, Le Président Paul BIYA en BD.



Itinéraire d’un homme d’Etat visionnaire, n’est ni un essai politique, ni un traité de gouvernement, ni une biographie classique. En mettant les FAITS à la disposition du dessinateur, ou plus exactement en stimulant sa créativité pour une Bande Dessinée, c’est-à-dure en rejetant simultanément la caricature, il se distingue nettement des autres auteurs, en ce qu’il a fait le choix de s’investir dans le « 9e art ». Or, comme nous le rappelle Bernard LAMIZET, « L’art est, d’abord une mémoire esthétique du politique, qu’il inscrit dans les formes et dans les représentations qui le donnent à voir et, par consé- quent à se rappeler. C’est par l’art que, sous la forme de ses acteurs, de ses institutions et des événements qui le scandent, le fait politique s’inscrit dans notre mémoire et dans notre culture. La représentation artistique des événements politiques s’articule à celle des médias en lui donnant la péren- nité d’un ensemble de figures inscrites dans l’espace public et placées, de la sorte, sous les yeux des citoyens et des habitants de la cité ».

(Le langage politique. Discours. Images. Pratiques, Paris, Ellipses, 2011, p.50) A l’évidence, les choix des FAITS effectué par MANAOUDA MALACHIE pour conduire cette aventure éditoriale, ne manquera pas susciter des interrogations sur leur pertinence, leur consistance ; tel événement ayant été ignoré, tel autre ayant vu sa portée réduite, tel autre encore ayant fait l’objet d’une emphase. L’on observera néanmoins que toute sélection est, à bien des égards, si ce n’est pas nature, subjective. Car, choisir, c’est trier, c’est hiérarchiser ; c’est aussi choisir de ne pas choisir, sur la base des critères propres à chaque projet, en l’occurrence, celui porté par un admirateur du président de la République. Autant dire que l’ouvrage alimentera à coup sûr de vifs débats, que l’on espère constructifs. Il lui reste à marquer les esprits et à s’imposer dans les rayons de librairie.