L'argent, nerf de la guerre électorale dans la course à l'union de l'opposition
Exclusif - Alors que l'opposition camerounaise peine à trouver un candidat unique face à Paul Biya, plusieurs prétendants à la magistrature suprême posent désormais leurs conditions financières pour rejoindre une éventuelle coalition. Selon nos informations, ils réclament le remboursement intégral de leur caution de 30 millions de FCFA, assortie d'intérêts, avant d'accepter de se désister au profit d'un candidat consensuel.
Cette révélation jette un éclairage cru sur les tractations en cours au sein de l'opposition, à moins d'un mois du scrutin du 12 octobre. Si les déclarations publiques mettent en avant l'unité et l'intérêt supérieur de la nation, les négociations privées révèlent des préoccupations plus prosaïques.
La caution de 30 millions de FCFA, soit environ 45 700 euros, représente un investissement considérable pour de nombreux candidats. Ce montant, non remboursable en cas d'échec électoral avec moins de 10% des suffrages, constitue un frein majeur à la participation politique au Cameroun.
"C'est une question de principe", confie sous couvert d'anonymat l'entourage de l'un des candidats concernés. "Ils ont engagé des fonds personnels et mobilisé leurs réseaux pour constituer cette caution. Un simple retrait sans compensation serait perçu comme un abandon."
Ces exigences financières s'ajoutent aux difficultés déjà observées dans les tentatives de rapprochement. Comme nous l'avions révélé, l'alliance tant attendue entre Issa Tchiroma Bakary (FSNC) et Bello Bouba Maïgari (UNDP) semble compromise par des calculs politiques et des rancunes anciennes remontant à leur rupture de 1995.
La disqualification de Maurice Kamto, qui était pressenti pour jouer les arbitres, a encore compliqué la donne. Son silence persistant sur le choix entre les deux leaders du Nord laisse planer l'incertitude sur la faisabilité d'une coalition crédible.
Cette approche transactionnelle de l'unité politique soulève des questions sur la nature même de l'opposition camerounaise. Comment concilier les appels à l'union patriotique avec des négociations au centime près ?
"Cela montre que nous sommes encore loin d'une véritable culture démocratique où l'intérêt général prime sur les intérêts particuliers", analyse un observateur politique qui préfère garder l'anonymat.
Avec le dépôt des candidatures qui se profile, le temps presse pour l'opposition. Chaque jour qui passe sans accord renforce la position du président sortant Paul Biya, qui peut compter sur une opposition divisée et affaiblie par ses querelles internes.
Les prochaines heures seront cruciales pour déterminer si l'opposition saura dépasser ses divergences - y compris financières - pour présenter un front uni face au pouvoir en place, ou si elle se présentera fragmentée devant les électeurs camerounais.