Le 12 octobre 2025, les Camerounais se rendront aux urnes pour une élection présidentielle qui s’annonce historique. Parmi les douze candidats en lice, une seule femme se distingue : Hermine Patricia Tomaino Ndam Njoya. À 56 ans, cette femme politique, entrepreneure et écrivaine incarne une voix singulière dans un paysage dominé par les hommes. Candidate sous la bannière de l’Union Démocratique du Cameroun (UDC), elle porte un message de renouveau face au président sortant Paul Biya, au pouvoir depuis des décennies.
Née à Yaoundé en 1969, Hermine Patricia Tomaino Ndam Njoya a bâti un parcours aussi riche que diversifié. Après des études secondaires au Lycée Sultan-Njoya de Foumban, elle obtient une maîtrise en droit public à l’Université de Yaoundé. Son expertise en gouvernance et gestion de projets l’a conduite à coordonner des programmes pour l’Union européenne et des initiatives de lutte contre le VIH/SIDA. Loin de se limiter à la politique, elle s’est imposée dans le monde des affaires en dirigeant une plantation caféière dans la région de l’Ouest. Présidente de l’Association des Femmes Camerounaises dans le Café (AFECC), elle milite pour l’autonomisation économique des femmes, un engagement qui lui vaut une reconnaissance au-delà des frontières.
Sur le plan politique, son parcours est tout aussi impressionnant. Élue députée du Noun de 2007 à 2020, elle a occupé le poste de secrétaire à l’Assemblée nationale avant de devenir maire de Foumban en 2020. Veuve d’Adamou Ndam Njoya, ancien président de l’UDC, elle a repris le flambeau du parti en 2021, s’imposant comme une figure incontournable de l’opposition. Porte-parole des partis réclamant une réforme du Code électoral, elle a publié plusieurs ouvrages engagés, dont L’Enfer rose et Les Élections bancales, qui dénoncent les dérives du système politique camerounais.
Ses atouts dans cette course présidentielle sont nombreux. En tant que seule femme candidate, elle incarne une alternative crédible et rafraîchissante dans un environnement politique très masculin. Son expérience multisectorielle, alliant politique, entreprise et plaidoyer, lui permet de toucher un électorat varié, en particulier les jeunes en quête de nouveaux visages. Son réseau international, forgé grâce à son travail dans le secteur caféier et ses collaborations avec des organisations panafricaines, renforce sa légitimité. Enfin, son discours évite les clivages ethniques pour se concentrer sur des thèmes universels comme la lutte contre la corruption et l’amélioration de la gouvernance.
Cependant, sa candidature n’est pas sans défis. Malgré son charisme, l’UDC peine à rivaliser avec le RDPC de Paul Biya, dont la machine électorale est redoutable. Les ressources financières limitées de sa campagne contrastent avec les moyens colossaux déployés par le pouvoir en place. Par ailleurs, la fragmentation de l’opposition, avec douze candidats en lice, risque de diluer son électorat. Enfin, son image d’intellectuelle et de femme d’affaires pourrait la distancier des classes populaires, qui constituent pourtant un vivier électoral essentiel.
Face à Paul Biya, la tâche semble titanesque. Les observateurs politiques doutent qu’elle puisse réellement menacer le président sortant, maître des institutions et du jeu électoral. Néanmoins, sa candidature a une portée symbolique forte. Elle force le débat sur la place des femmes en politique et pourrait servir de tremplin pour une opposition plus unie dans les années à venir. Même si ses chances de victoire sont minces, sa participation marquera l’histoire comme celle d’une femme ayant osé défier un système verrouillé.
Hermine Patricia Tomaino Ndam Njoya incarne à la fois l’audace et la persévérance. Sa candidature, bien que symbolique, rappelle que la bataille pour l’alternance passe aussi par la diversité des voix. Dans un contexte où les opposants sont souvent marginalisés, sa présence sur la scène politique est en soi une victoire. Comme elle l’a déclaré en déposant sa candidature : « Le Cameroun a besoin de courage, pas de complaisance. » Un message qui, malgré les obstacles, continue de résonner.