Actualités of Friday, 8 August 2025

Source: www.camerounweb.com

Cas Gabonais: l'arrivée de Sylvain Riquier fait jaser à Etoudi, le plan secret de Paris sur la succession de Paul Biya

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La nomination de Sylvain Riquier comme nouvel ambassadeur de France au Cameroun, deux jours seulement après l'éviction définitive de Maurice Kamto de la présidentielle, interpelle. Ce changement diplomatique, qui voit un diplomate civil remplacer un général, intervient dans un contexte où Paul Biya, 92 ans, apparaît de plus en plus fragile politiquement. Entre la menace d'un soulèvement populaire et le risque de perdre le contrôle sur une succession cruciale, Paris semble chercher une troisième voie : orchestrer une transition "propre" qui préserverait ses intérêts stratégiques et économiques dans cette région clé d'Afrique centrale. Analyse d'une stratégie française qui pourrait redéfinir l'avenir géopolitique du Cameroun.





Cameroun : La nomination de Sylvain Riquier révèle-t-elle une stratégie française de "coup propre" ?
L'analyse des récents mouvements diplomatiques et militaires suggère que Paris pourrait préparer une transition contrôlée au Cameroun
La nomination surprise de Sylvain Riquier comme nouvel ambassadeur de France au Cameroun, annoncée le 7 août, soit deux jours après l'exclusion
définitive de Maurice Kamto de l'élection présidentielle d'octobre, soulève des questions sur les véritables intentions de Paris dans la crise politique camerounaise qui s'annonce.
Un changement de profil révélateur
Le remplacement du général Thierry Marchand par un diplomate civil expérimenté n'est pas anodin. Contrairement à un ambassadeur militaire qui entretient des rapports directs avec l'état-major camerounais, Sylvain Riquier apporte un profil plus adapté à la gestion post-crise. Cette transition du militaire au civil pourrait signaler que la phase de "préparation" touche à sa fin.
Ancien ambassadeur aux Comores, diplômé de l'ENA et fort d'une expérience de quinze ans dans les zones de tension, Riquier possède le profil idéal pour gérer une transition délicate tout en préservant les intérêts français.
Le piège de l'immobilisme
La France se trouve dans une impasse stratégique au Cameroun. D'un côté, maintenir Paul Biya, 92 ans et visiblement affaibli, expose Paris au risque d'un coup d'État anti-français similaire à ceux du Mali ou du Burkina Faso. De l'autre, laisser le pouvoir dériver vers Chantal Biya et Ferdinand Ngoh Ngoh, le tout-puissant secrétaire général de la présidence,
reviendrait à perdre le contrôle sur une succession cruciale.
"En gardant Biya, la France court le risque d'un soulèvement populaire qu'elle ne pourra pas
contrôler", analyse un expert en géopolitique africaine qui préfère garder l'anonymat. "Mais en laissant faire une succession 'naturelle' , elle risque de voir arriver au pouvoir des acteurs sur lesquels elle n'aura aucune prise."
Les signaux d'une préparation militaire
Plusieurs éléments convergent vers l'hypothèse d'une intervention orchestrée :
● Les récents remaniements militaires opérés par Paul Biya, qui pourraient avoir été "conseillés" par Paris pour positionner les bons interlocuteurs
● L'existence d'accords de coopération militaire permettant à la France de former et d'influencer l'encadrement militaire camerounais
● Le contrôle par Paul Biya du Bataillon d'Intervention Rapide (BIR), unité d'élite formée par des conseillers israéliens mais dont les cadres entretiennent des liens avec la France
Le timing parfait
L'exclusion de Maurice Kamto créée une situation paradoxalement favorable à un changement de régime "propre". Elle évite aux militaires le dilemme de renverser un président élu démocratiquement, tout en offrant une légitimité à d'éventuels putschistes qui pourraient se présenter comme les restaurateurs de la démocratie. "Un coup d'État après l'exclusion de l'opposition principale aurait une tout autre résonance qu'un coup contre un processus électoral normal", note un observateur de la scène politique camerounaise.
Les leçons du Gabon
Le précédent gabonais de 2023, où le général Brice Oligui Nguema a renversé son cousin Ali Bongo dans un "coup de palais" familial, pourrait servir de modèle. Bien que la France ait officiellement condamné ce putsch, elle a rapidement normalisé ses relations avec le nouveau régime, préservant ses intérêts économiques et stratégiques. Au Cameroun, l'identification et la préparation d'un militaire "fiable" permettraient à Paris d'anticiper et de contrôler une transition inévitable plutôt que de la subir.
Les enjeux économiques considérables
Avec ses réserves pétrolières, ses ressources forestières et sa position géostratégique en
Afrique centrale, le Cameroun représente des intérêts français considérables. Dans un contexte de concurrence accrue avec la Chine et la Russie, perdre le contrôle de ce pays constituerait un revers majeur pour l'influence française sur le continent.
Une stratégie à haut risque
Si cette hypothèse se confirmait, la France jouerait gros. Un échec pourrait précipiter le Cameroun dans le camp anti-français, comme cela s'est produit au Sahel. Mais l'immobilisme face à un régime à bout de souffle présente peut-être des risques encore plus grands.
La nomination de Sylvain Riquier, diplomate chevronné habitué aux situations de crise, pourrait ainsi s'inscrire dans une stratégie plus large visant à préparer l'après-Biya tout en préservant les intérêts français.
Les prochaines semaines, à l'approche de l'élection présidentielle d'octobre, seront décisives pour confirmer ou infirmer cette hypothèse. Une chose est sûre : le statu quo n'est plus une option viable pour aucun des acteurs de cette crise annoncée.