Le Président du Sénat privilégie une cérémonie traditionnelle locale aux festivités nationales, soulevant des interrogations
Une polémique inédite secoue l'ouest du Cameroun. Marcel Niat Njifenji, Président du Sénat et deuxième personnalité de la République, qui avait brillé par son absence lors des célébrations de la Fête nationale du 20 mai dernier, sera personnellement présent à Bangangté à partir du 27 mai pour l'installation d'un nouveau chef de village. Cette décision soulève de nombreuses interrogations sur les priorités et les enjeux sous-jacents de cette démarche.
Les cérémonies de célébration de l'Unité nationale du 20 mai 2025 ont été marquées par l'absence de plusieurs hautes personnalités de la République. Parmi elles, Marcel Niat Njifenji, dont l'absence avait été officiellement attribuée à des questions de santé par certaines sources proches du pouvoir.
Cependant, cette explication semble remise en question par les événements qui suivent. Selon nos informations, le directeur du Cabinet du Président du Sénat a adressé, le 27 mai 2025, une correspondance officielle au Préfet du département du Ndé, confirmant la présence personnelle de la "Haute Personnalité" à Bangangté.
Dans cette correspondance dont nous avons eu connaissance, le directeur du Cabinet précise : "Je saisis également cette occasion pour vous faire savoir, aux fins nécessaires, que, durant Son séjour, la Haute Personnalité se propose d'assister personnellement à la cérémonie d'installation du nouveau Chef du village TCHOUDIM prévue ce 31 mai 2025 ou, à défaut, de S'y faire représenter."
Cette formulation protocolaire contraste singulièrement avec l'absence du Président du Sénat aux festivités nationales, soulevant des questions sur les priorités accordées aux différents événements officiels.
Selon nos sources locales, cette cérémonie d'installation cache des enjeux fonciers considérables. Le nouveau chef désigné, identifié comme étant le frère de Ketchankeu Christophe, percepteur à l'Ambassade du Cameroun en France depuis 43 ans, dirigera une chefferie récemment créée dans le groupement Bangangté.
Cette création de chefferie aurait été effectuée sans l'accord du Roi de Bangangté et contre l'avis de la population locale, selon les informations recueillies sur le terrain. Le territoire concerné par cette nouvelle entité administrative traditionnelle couvrirait notamment une vaste exploitation agricole d'une superficie de 1 350 hectares, propriété du Président du Sénat.
Nos investigations révèlent que le Roi de Bangangté s'est opposé à une grande partie du processus d'immatriculation de ces terres, estimant que "prendre cet énorme foncier sur un petit territoire est indécent". Cette opposition explique pourquait l'absence notable du souverain traditionnel et d'autres chefs coutumiers à la cérémonie d'installation prévue.
Les populations locales considèrent que ces terres ont été "arrachées de force" aux communautés, alimentant les tensions autour de cette question foncière sensible dans une région où la pression démographique sur les terres arables est particulièrement forte.
L'apparent paradoxe entre l'absence aux célébrations nationales du 20 mai et la présence personnelle à une installation de chef de troisième degré soulève des interrogations légitimes. Pour certains observateurs, ce choix révèle des priorités personnelles qui pourraient primer sur les obligations protocolaires liées à la fonction de deuxième personnalité de l'État.
Cette situation illustre également les tensions persistantes entre autorités administratives et traditionnelles dans certaines régions du Cameroun, particulièrement lorsque des intérêts fonciers majeurs sont en jeu.
Plusieurs questions demeurent sans réponse : comment une nouvelle chefferie peut-elle être créée sans l'accord des autorités traditionnelles locales ? Quel sera l'impact de cette installation sur l'équilibre social et foncier de la région ? Et surtout, comment concilier les devoirs de fonction publique avec les intérêts privés ?