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Infos Business of Mercredi, 22 Décembre 2021

Source: L’étendard

Taxation des tontines : voici pourquoi ça choque

Face à ces différentes prises de position, le Chef de l’Etat va-t-il promulgué une telle loi ? Face à ces différentes prises de position, le Chef de l’Etat va-t-il promulgué une telle loi ?

Depuis quelques jours, les réseaux sociaux s’enflamment des propos les plus inattendus, même par des personnes les plus insoupçonnées, sur la question de la taxation des associations parmi lesquelles, les tontines. Que faut-il retenir de cette innovation fiscale qui soulève dans les chaumières des débats parfois caricaturaux et fait couler beaucoup d’encres et de salives? Evocation.

Il faut dire d’emblée qu’une association en principe ne paie pas d’impôt sur ses activités tant qu elle reste dans son objet. C’est donc le cas des tontines, qui fait polémique dans l’opinion. D’abord, le nouveau dispositif ne concerne pas seulement les tontines. Et quand bien même il concernerait les tontines, elles sont certes astreintes à l’immatriculation mais exonérées du paiement de la patente et de la TPF (Taxe sur la propriété foncière).

Il consacre l’intégration des associations, à l’exemple des épargnes, dans le circuit économique formel. Tant qu’une association à caractère tribal ou non, reste dans son objet, aucun impôt n’est envisageable. Les cotisations ou tontines sont très souvent organisés dans ces groupements sans aucun intérêt à prélever.

Des organismes à but non lucratif

Comme on peut le lire dans l’article 93, « Relève du régime des organismes à but non lucratif, toute entité dotée de la personnalité juridique ou non, publique, privée ou confessionnelle, y compris les fondations, qui n’a pas pour but la recherche de bénéfices aux fins de distribution entre ses membres et dont l’activité n’est pas en concurrence avec celles réalisées par les entités à but lucratif.

Il s’agit notamment : a) sous réserve des conventions, des organismes internationaux et les organisations non gouvernementales ; b) des établissements publics et les collectivités territoriales décentralisées, ainsi que leurs régies de services publics ; c) des sociétés ou organismes reconnus d’utilité publique; d) des offices publics d’habitation à bon marché ; 8 e)des associations de toute nature, de droit ou de fait, les mutuelles, les clubs et cercles privés; f) des organismes de prévoyance et de sécurité sociale; g) des établissements publics et confessionnels d’enseignement et de santé, h) d’une manière générale, tout organisme ayant ou non une personnalité juridique et dont la mission principale n’est pas la réalisation d’activités commerciales.

La Loi des finances-LF 2022, en modification du Code Général des Impôts-CGI, dans ses articles 93 nonies, et 93 decies, crée en effet, outre les traditionnels régimes du réel, du simplifié et de ITL un 4e régime fiscal dénommé «régime des organismes à but non lucratif qui Consacre / encadre la fiscalisation des ONG … etc… dont l’imposition était jadis abandonnée à la discrétion de l’agent des impôts. C’est donc d’une réelle avancée qu’il s’agit.

Quid de la polémique

Tontiner n’est certes pas une activité économique au Cameroun, mais derrière les tontines, comme derrière de nombreuses autres activités supposées à but non lucratif, se dissimulent des activités taxables. C’est ce qui semble avoir justifié le nouveau dispositif fiscal qui entre en vigueur dès le 1er janvier 2022 et qui dans la catégorisation des régimes fiscaux de droit communs, instaure un nouveau régime dit des « organismes à but non lucratif ». Pour illustrer ces positions, prenons le cas d’une association des ressortissants du Ntem, dans le sud Cameroun. L’objet de ce regroupement peut être l’entraide, les assistances diverses en cas de malheur ou de joie.

A côté de ces activités purement sociales et non lucratives, se greffent d’autres bizness du genre, location de la salle, des chaises et tentes, pour en tirer des bénéfices. C’est sur ces bénéfices justement, que des taxes vont être prélevées et non sur l’activité principale de la tontine en elle-même. Si par ailleurs, des intérêts sont prélevés sur l’épargne, ils pourraient être imposés. Ici, il faudrait qu’ils atteignent un certain seuil. La taxation, selon la nouvelle loi de finances indique que les associations qui réalisent des bénéfices devront payer à hauteur de 16%.

Ce qui choque davantage l’opinion, c’est cette disposition qui voudrait que « Dans tous les cas, les organismes sans but lucratif tiennent obligatoirement une comptabilité distincte pour la part de leurs activités à caractère commercial. ». Ceci évidemment à l’effet d’identifier la fourchette du budget taxable. Cette dernière disposition comme la principale semble ne pas passer.

Comme s’est fendu Sosthène Médard Lipot (SML), homme politique, qui demande dans un post sur Facebook, le boycott de cette loi, si elle venait à être promulguée. « Camerounaises, Camerounais, désobéissez à cette loi scélérate et criminelle par laquelle des bandits en cols blancs tentent de vous spolier de vos maigres épargnes de survie Immédiate. », écrit-il, avant de poursuivre « Comment comprendre que des gouvernants violent la constitution, refusent de déclarer leurs biens et avoirs depuis 25 ans, mais entendent contraindre les gouvernés à déclarer leurs petits avoirs épargnés difficilement dans un contexte d’austérité et de corruption d’État ?! Les gouvernés ont le droit de s’insurger contre l’injustice, le deux poids deux mesures sur fond de pillage des ressources nationales. La désobéissance civile doit s’appliquer avec rigueur et témérité contre ce gouvernement. ».

L’homme politique, Conseiller spécial de Maurice Kamto du Mrc (Mouvement pour la Renaissance du Cameroun), s’insurge non pas contre la taxation des activités commerciales des tontines, mais du fait de la déclaration des avoirs des petits épargnants. « Signez juste le décret d’application de l’article 66 et mettez en place l’organe qui recevra les déclarations des biens et avoir, puis insérez dans le code pénal,’ l’enrichissement illicite comme infraction! En un an l’Etat aura plus d’économie dans ses caisses, que trois ans de collecte auprès des associations », réagit un internaute à la suite de cette sortie de SML.

Face à ces différentes prises de position, le Chef de l’Etat va-t-il promulgué une telle loi ? Il est difficile qu’il en soit autrement, au vu de ce que l’élargissement de l’assiette fiscale sur tous les secteurs d’activités, est une priorité pour le gouvernement, malgré la précarité ambiante.