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Actualités of Wednesday, 17 November 2021

Source: www.bbc.com

Migration : l'aventure d'un avion à Majorque révèle une nouvelle route

Plus de 20 personnes ont réussi à s'échapper d'un avion de ligne Plus de 20 personnes ont réussi à s'échapper d'un avion de ligne

Plus de 20 personnes ont réussi à s'échapper d'un avion de ligne contraint d'effectuer un atterrissage imprévu dans les îles Baléares. Mais cette aventure audacieuse soulève des questions non seulement sur la sécurité des aéroports, mais aussi sur les routes migratoires vers l'Europe.

Dans l'après-midi du 5 novembre, un Airbus A320 d'Air Arabia Maroc décolle de Casablanca au Maroc à destination de la Turquie.

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Peu après le début du vol de six heures, un Marocain à bord semble souffrir d'une urgence médicale correspondant à une crise de diabète. L'avion demande la permission d'atterrir à l'aéroport de Son Sant Joan à Palma, sur l'île espagnole de Majorque, afin qu'il puisse recevoir des soins médicaux.

À l'atterrissage, l'homme est transporté en ambulance à l'hôpital de Son Llàtzer, escorté par des gardes civils, ainsi qu'un autre homme qui voyage avec lui.

Pendant ce temps, dans l'avion non gardé, un groupe de passagers tente de descendre.

"Il y a eu une grande altercation dans l'avion, l'équipage étant réprimandé et intimidé par plusieurs passagers qui demandaient à pouvoir sortir pour fumer et se rendre sur la piste d'atterrissage", peut-on lire dans le rapport établi par un tribunal local qui enquête sur l'incident. Des extraits sont publiés dans les médias espagnols.

Finalement, plus de 20 passagers masculins, apparemment tous marocains à l'exception d'un Palestinien, réussissent à passer outre l'équipage et le personnel de l'aéroport qui essaie de bloquer la porte de l'avion. Dans le chaos, une hôtesse de l'air est blessée.

Des images filmées par l'un des passagers restés dans l'avion montrent plusieurs hommes poussant pour descendre de l'avion, tandis que d'autres, qui sont déjà sortis de l'avion, courent sur le tarmac.

La présence de civils sur la piste d'atterrissage entraîne la fermeture de l'aéroport pendant environ trois heures et l'interruption d'environ trois douzaines de vols.

Les hommes qui sont arrivés sur la piste d'atterrissage escaladent ensuite une clôture d'enceinte et s'échappent.

Pendant ce temps, l'homme qui est emmené à l'hôpital reçoit le feu vert et est arrêté. Son compagnon fuit l'hôpital mais est également arrêté. Dans les heures qui suivent, 12 migrants au total sont arrêtés, la plupart près de l'aéroport. Douze autres migrants sont toujours en fuite et au moins deux d'entre eux se sont rendus à Barcelone en ferry.

L'incident suscite des appels au renforcement de la sécurité à l'aéroport de Palma, l'un des plus fréquentés d'Europe, et le gouvernement espagnol promet de réagir.

"Les efforts déployés visent à garantir que cela reste un acte absolument isolé et exceptionnel", indique Aina Calvo, représentante du gouvernement central dans les îles Baléares. "Tous les aéroports du monde auront pris note".

Le consul du Maroc à Palma, Abdellah Bidoud, le qualifié d'"aventure mal pensée" et de "cas isolé".

Pourtant, on spécule que cette méthode d'entrée en Europe, surnommée patera aérea ou bateau aérien par certains médias espagnols, pourrait avoir créé un précédent.

Ces dernières années, des dizaines de milliers de migrants africains tentent de traverser la Méditerranée pour rejoindre le continent espagnol et les îles Baléares, ou l'Atlantique pour rejoindre les îles Canaries.

Il s'agit d'un voyage notoirement dangereux, qui a fait plus de 1 700 victimes rien que l'année dernière. Les migrants peuvent payer de fortes sommes pour s'assurer l'aide de trafiquants.

En revanche, un vol Casablanca-Istanbul peut coûter aussi peu que 200 € (131 191 FCFA).

"Les fausses maladies, les courses folles et autres moyens créatifs de rejoindre l'Europe" sont désormais un choix inévitable pour les migrants, note le commentateur Camilo José Cela Conde.

Malgré les inquiétudes liées à la sécurité des aéroports, il estime que ces solutions sont préférables aux itinéraires plus traditionnels "si elles évitent le risque extrême de mort et ne profitent pas aux mafias qui contrôlent le commerce des traversées maritimes".

Alors que les aéroports d'Espagne et d'ailleurs cherchent des moyens de s'assurer que cet épisode ne se répète pas, le journal de droite ABC estime que cela pourrait être le début d'une tendance

"Beaucoup plus économique... beaucoup moins risqué et sans dettes à payer par la suite - et avec une bonne chance de succès", dit-il à propos de la méthode de migration dite "air-boat."

Le parti d'extrême droite Vox, quant à lui, voit dans cette affaire la confirmation de sa position anti-immigration et la preuve que les frontières aériennes, terrestres et maritimes de l'Espagne doivent être surveillées de plus près.

Entre-temps, l'enquête se poursuit, les enquêteurs cherchant à déterminer dans quelle mesure l'épisode est préparé à l'avance.

Le fait que presque tous les hommes qui ont fui l'avion n'aient pas enregistré de bagages dans la soute est considéré comme un signe qu'ils étaient probablement tous dans le coup dès le départ.

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Les enquêteurs se sont également penchés sur un compte Facebook suivi par des milliers de jeunes Marocains, qui aurait publié en juillet une proposition d'exécution d'un plan ressemblant fortement à celui du 5 novembre.

Le post indique que si un passager simule une maladie alors qu'il survole l'espace aérien espagnol en direction de la Turquie, "l'avion effectuera un atterrissage forcé en Espagne pour protéger la réputation de la compagnie aérienne et se dégager de toute responsabilité". Il ajoute : "inscrivez-vous si vous êtes intéressé".

Les 12 hommes en détention sont accusés de toute une série de délits, allant de la facilitation de l'immigration illégale au désordre public et à la sédition.