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Actualités of Monday, 6 November 2017

Source: ebugnti.wordpress.com

Enquête non résolue et silence de l'Eglise: Mgr Bala assassiné et profané dans l'oubli

Mgr Bala assassiné, sa tombe profanée Mgr Bala assassiné, sa tombe profanée

Le meurtre, non encore élucidé de l’évêque de Bafia, passe peu à peu dans l’oubli, de façon naturelle ou instrumentalisée.

Le 29 octobre dernier, rien ne laissait signifier que l’on commémorait le cinquième mois de l’enlèvement, qui sera suivi de l’assassinat, de Monseigneur Jean Marie Benoît BALA. Tant l’événement semble être entré dans les coffres forts de l’histoire, progressivement scellé.

Aucune commémoration officielle donc, aucun appel à la prière. Sans doute que quelques groupes et individus s’en sont souvenu, selon leur sensibilité et leur piété. Mais il faut plus que quelques initiatives éparses pour éviter que ce drame sombre dans l’oubli.

L’Église, qui a affronté l’État jusqu’aux obsèques, n’a donné aucune consigne commémorative. Ni pour le jour de l’enlèvement, ni pour celui du repêchage du corps, ni même le jour de l’enterrement.

Le contraire aurait pourtant, nous semble-t-il, permis de garder vivant le souvenir de cet Assassinat ignoble et grotesque, pour poursuivre le combat contre « les forces obscures et diaboliques » tant décriées.

Celles dont la Conférence Épiscopale Nationale du Cameroun (CENC) disant, le 10 juillet 2017, qu’elles « persécutent » l’Église. Déclaration reprise avec emphase le 02 août en la cathédrale Notre-Dame des Victoires de Yaoundé par Monseigneur Joseph AKONGA ESSOMBA, en symbiose avec un peuple écoeuré et corroborant.

Malheureusement, l’on semble s’être contenté de ce propos révolutionnaire et les approbations réprobatrices de l’Assemblée du 02 août.

Tout est désormais fait pour laisser à la nature et à la lassitude le soin de faire leur effet inhibiteur des consciences, de la mémoire et du souvenir.

Un effet qui est accompagné du silence qui s’impose sur la question. En rencontrant le chef de l’État le 26 octobre 2017, Mgr Piero PIOPPO, nonce apostolique en fin de séjour au Cameroun, n’a pas eu le moindre mot sur ce drame, ni pour le peuple de Dieu qu’il laisse le cœur en lambeau.

Il s’était pourtant retrouvé au premier plan de ce drame. Naturellement, en sa qualité de représentant du Saint-Siège au Cameroun. Mais aussi parce qu’il avait été pris à partie par une certaine opinion.

Sans jamais avoir été prouvées, ces allégations ont semé le trouble dans le cœur et les esprits meurtris des fidèles. Jetant le trouble sur l’Église universelle, et plus encore celle qui est au Cameroun.

Ce silence est sympathique de la loi de l’ormetà qui semble désormais s’imposer sur la question. C’est le sujet dont il ne faut pas parler, au risque de rien pourtant.

La police et la justice sont naturellement acérées par le système étatique. On ne comprend d’ailleurs toujours pas au nom de quoi il tente de faire taire la vérité. Mais l’Église ne fait pas mieux.

Quoique sa discrétion soit légendaire, en particulier dans ce type d’événements polémiques et scandaleux, parce que ça en est un. Une évocation régulière, jusqu’à obtention de la vérité et de la justice, maintiendrait vivante l’espérance du peuple de Dieu.

Lui qui a été porté par l’élan de résistance, pour la justice et la vérité, donné par Monseigneur Samuel KLEDA et la Conférence Épiscopale Nationale du Cameroun (CENC).

Mais il faut saluer l’affection et l’engagement sans précédants des fidèles catholiques dans cette affaire. Un intérêt qui les porte toujours dans la prière, avec la ferme conviction que la vérité éclatera et la justice, rendue.

Afin que nul n’en ignore

Le 29 mai 2017, Monseigneur Jean Marie Benoît BALA, évêque de Bafia, a été enlevé dans son évéché et sa voiture garée sur le pont Ebebda du fleuve Sanaga, sur la Nouvelle N°4.

Après trois nuits et deux jours de recherche dans les eaux du fleuve, sa dépouille sera repêchée le 02 juin, à une vingtaine de kilomètres de là, aux abords du village Tsang, par Monatele.

Un drame retentissant sur lequel tout sera dit, des noms cités, de présumées complicités dénoncées, des présumés laxismes institutionnelles condamnés. Le scénario du suicide, mal ficelé a rapidement été démonté et le complot d’État dévoilé.

Aucun procureur ne s’est saisi de la question, comme y autorise pourtant le code de procédure pénale du Cameroun. Au contraire, l’on a senti comme une réelle volonté de brouiller les pistes.

Au bout de deux mois d’affrontement par communiqués interposés, la police judiciaire tentera de contraindre l’Église à prendre possession des restes de l’évêque. Un extraordinaire dans un système où des dépouilles mettent des mois, voir des années, dans des morgues sans que personne ne s’en préoccupe.

L’État, par la voix du procureur de la République près la Cour d’appel du Centre, affirmera « l’absence de toute trace de violence sur le corps du défunt « et conclura que « la noyade est la source la plus probable de décès ».

En face, les évêques du Cameroun et avec eux une large et très affectée majorité de l’opinion publique, indiqueront que « le corps qu’ils ont vu et reconnu au bord de la Sanaga et à la morgue de l’Hôpital Général de Yaoundé, et qui était la dépouille de Mgr Jean-Marie Benoît BALA, portait des marques de violences ».

Sur leur « autorité morale », ils affirmeront que « Monseigneur Jean Marie Benoît BALA ne s’est pas suicidé. Il a été brutalement assassiné ». Une thèse accréditée par les multiples manoeuvres policières et administratives visant à faire taire les voix et les consciences.

De la profanation et des morts suspectes

Le 02 août, les obsèques seront célébrées et la dépouille inhumée le lendemain en la cathédrale Saint-Sébastien de Bafia. Vingt-cinq jours plus tard, dans la nuit du 27 au 28 août, la tombe et la cathédrale seront profanées.

Du sang sera aspergé sur le sépulcre de l’évêque défunt, l’allée centrale de la nef, la cathèdre et l’autel. La police fera des prélèvements aux fins d’en déterminer la nature et l’origine.

L’enquête ouverte est muette jusqu’à ce jour. Un employé de l’évêché est également décédé, de manière troublante. Pascal BOADE, coursier et mécanicien, est mort mi-septembre, à l’aéroport de Nsimalen. Il effectuait une course pour le diocèse.

Avant lui, et bien avant Monseigneur Bala, l’abbé Armel Collins NDJAMA, recteur du Petit Séminaire Saint André de Bafia, avait été retrouvé mort le 10 mai 2017, dans sa chambre. Ce décès a abondamment alimenté les débats sur l’assassinat de son évêque.

L’enquête ouverte à Bafia, qui était pourtant restée muette, a été reprise par la Direction de la Police Judiciaire de Yaoundé. Elle semble désormais orientée à démontrer que l’abbé est décédé de mort naturelle.

Les conséquences sophistes d’une telle conclusion vont de soi. La police considérant que les deux morts sont « intimement » liées.