Une journée de contrastes et de tensions. Alors que des milléiers de Camerounais sont descendus dans les rues de Yaoundé, Garoua et d’autres villes pour célébrer la victoire autoproclamée d’Issa Tchiroma Bakary, les forces de sécurité ont réprimé ces rassemblements, déployant des unités lourdement armées et utilisant des canons à eau pour disperser les manifestants. Dans le même temps, un mouvement d’humeur a été maîtrisé à la Briqueterie, révélant une atmosphère électrique et instable à travers le pays.
Dès le matin, les partisans d’Issa Tchiroma Bakary, brandissant des banderoles à son effigie et scandant son nom, ont envahi les rues pour fêter sa victoire, qu’il revendique sur la base des résultats partiels publiés dans 11 des 18 divisions électorales, représentant selon lui 80 % de l’électorat. "Nous avons gagné, et nous ne laisserons pas voler notre victoire", ont clamé les manifestants.
Cependant, la réponse des forces de l’ordre a été rapide et musclée. À Yaoundé comme à Garoua, la police a intervenu avec fermeté, utilisant des canons à eau et procédant à des interpellations. Les images de manifestants dispersés sous la pression des forces de sécurité ont circulé sur les réseaux sociaux, alimentant les craintes d’une escalade de la violence.
Vers 11 heures, un mouvement d’humeur a éclaté dans le quartier de la Briqueterie, sur l’axe Immeuble Ekang – École de police. Les Forces Mixtes Opérationnelles (FMO) ont été immédiatement déployées pour rétablir l’ordre. Selon un bilan provisoire, douze individus ont été interpellés, dont un porteur d’une arme de poing et en possession d’une somme d’argent non encore évaluée. Les autorités ont annoncé qu’un bilan détaillé sera communiqué ultérieurement.
Alors que les partisans d’Issa Tchiroma célèbrent, des sources proches du Conseil constitutionnel laissent entendre que l’institution se préparerait à proclamer la victoire du président sortant, Paul Biya, malgré les allégations de fraude électorale. À 92 ans, Paul Biya, au pouvoir depuis plus de 42 ans, brigue un nouveau mandat de sept ans, une perspective qui exacerbe les tensions dans un pays déjà profondément divisé.
De son côté, Issa Tchiroma Bakary a réitéré sa détermination à défendre ce qu’il qualifie de "vérité des urnes". "Le peuple a parlé, et je ne permettrai pas que sa voix soit étouffée", a-t-il déclaré, ajoutant que les résultats partiels qu’il a publiés reflètent la volonté populaire. Ses partisans, galvanisés, semblent prêts à poursuivre la mobilisation, malgré la répression.
Cette journée de mobilisation révèle une profonde fracture au Cameroun. D’un côté, des citoyens déterminés à faire respecter leur choix, de l’autre, un pouvoir qui semble prêt à tout pour maintenir son emprise. Avec le Conseil constitutionnel sur le point de rendre sa décision, les prochaines heures pourraient être déterminantes pour l’avenir du pays.