Actualités of Wednesday, 18 June 2025
Source: www.camerounweb.com
En cette période charnière de l'histoire politique camerounaise, à l'approche de l'élection présidentielle d'octobre 2025, une déclaration citoyenne poignante émanant des intellectuels et leaders de la Région du Sud interpelle la nation tout entière. Ce manifeste, signé par huit personnalités éminentes dont le Dr Appollinaire Legrand OKO et le Pr Jean Calvin ABA'A OYONO, constitue un cri du cœur pour le changement après 43 ans de règne de Paul Biya.
Dans un plaidoyer articulé en quatre pages, les signataires dressent un bilan sans concession du "règne sans partage" du président sortant sur sa région natale, dénonçant avec force les conditions de vie dégradées, les infrastructures en ruine et les manipulations politiques qui auraient maintenu la population sudiste dans la pauvreté et la soumission. Le document révèle notamment :
L'état désastreux des routes et l'absence d'électricité dans certaines localités depuis l'indépendance
La collusion des élites locales avec un système de prédation et de fraude électorale
La répression systématique des voix dissidentes originaires du Sud
Le mythe entretenu d'une adhésion inconditionnelle des Sudistes au régime Biya
Plus qu'une simple dénonciation, cette déclaration se veut un appel à l'action pour les populations du Sud, les exhortant à "prendre leur destin en main" lors du scrutin à venir. Les signataires proposent une alternative claire : rompre avec la passité pour embrasser le changement par les urnes, seul moyen selon eux de mettre fin à "cette humiliante éducation de la servitude".
DECLARATION A L'ADRESSE DES POPULATIONS DE LA REGION DU SUD.
« Embarquons résolument dans le train du bonheur !
Nous vivons un moment politique décisif pour l'ensemble du pays et singulièrement pour la Région du Sud. Car, depuis 43 ans, Monsieur Paul BIYA règne sans partage sur le Cameroun et l'ancienne province du Centre/Sud, devenue province du Sud, puis Région du sud, sa région natale, laquelle fait l'objet de toute sorte de préjugés, de mensonges et de fantasmes.
En cette période cruciale de notre histoire nationale, les populations du Sud se doivent de prendre la pleine mesure de leur responsabilité morale, historique, individuelle et/ou collective. Elles peuvent opter de se taire et d'accepter tous les mensonges qui sont répandus sur elles, tout comme il leur est loisible de prendre la décision digne et courageuse de se prononcer et d'agir pour le bien de leur Région et du pays tout entier, dans le contexte actuel bouillonnant de fin certaine du régime BIYA et d'avènement d'un nouveau régime, de rupture, soucieux du bien-être de l'ensemble des Camerounais(es).
C'est donc à nos frères et sœurs du Sud qu'est adressée cette interpellation citoyenne sous forme de Déclaration.
Chers Frères et Sœurs,
Au cours de la période sensible et délicate que traverse actuellement le Cameroun, et dont le point culminant est l'élection présidentielle qui, inéluctablement, pointe à l'horizon, nous avons le choix entre deux attitudes. La première est celle du silence, de l'inaction, de l'observation passive, tels des étrangers de passage au Cameroun, le choix de la peur ou de la connivence avec le régime sortant au cours de l'élection présidentielle d'octobre 2025. Si tel est notre posture, nous aurons opté pour la démission.
Nous aurons choisi de continuer à subir, encore et toujours, après avoir subi depuis 1982. Ce sera alors un choix irresponsable. Pourquoi irresponsable ? Parce que chaque citoyen doit exiger de ceux qui gouvernent ou de ceux qui aspirent à gouverner de meilleures conditions de vie pour lui-même et pour ceux qui lui sont proches. Face à un régime, sortant et bientôt sorti, qui a lamentablement échoué dans tous les secteurs de la vie nationale, nous devons exercer notre sanction dans les urnes lors de cette élection présidentielle, sinon notre sort et celui de nos proches (parents, frères et sœurs, enfants, etc.) est négativement scellé. Rester donc passif dans le contexte actuel, c'est être irresponsable.
L'autre attitude, utile, responsable, c'est celle de l'engagement, de l'action, de la participation au grand changement politique qui va s'opérer cette année. Le véritable changement est celui qui vient du Peuple. Après 43 ans, nous pouvons affirmer que le changement qui a eu lieu en novembre 1982 au Cameroun, et qui ne venait pas du peuple, n'a quasiment rien apporté de bénéfique aux populations paupérisées à la Région du Sud. La nomination des Ministres et des Directeurs Généraux originaires du Sud n'a rien apporté à l'écrasante majorité des Camerounais de cette Région dont les conditions de vie se sont considérablement dégradées, en comparaison à celles connues jadis, sous le Président Ahidjo notamment.
Les raisons de notre engagement pour le Changement sont innombrables. L'état des routes dans notre Région est désastreux. Les axes Ebolowa - Akom 2 - Kribi, Sangmelima - Oveng-Fang, Meyomessala - Bengbis et bien d'autres en sont quelques illustrations emblématiques. En cette saison des pluies, le calvaire que nous subissons pour nous déplacer dans certaines localités est inhumain. Certaines localités du Sud n'ont pas connu d'électricité depuis l'indépendance de notre pays. Le comice agropastoral, qui a pourtant contribué à développer et à mieux urbaniser les chefs-lieux des autres Régions, n'a rien apporté de significatif à la ville d'Ebolowa. Plus de dix ans après le comice, certaines infrastructures, pourtant initiées dans le cadre de l'organisation du comice, n'étaient toujours pas terminées.
Le chômage endémique des jeunes diplômés ou sous-scolarisés est criant. La mauvaise qualité de vie se dispute la scène sociale avec le désespoir généralisé.
Nous devons également nous engager pour apporter un démenti clair et net à un mensonge qui n'a que trop duré: celui qui consiste à présenter les ressortissants du Sud comme attachés à la personne et à la politique de Monsieur Paul BIYA, pour la simple raison qu'il est natif de la Région du Sud.
Soutenir ce mensonge, c'est vraiment prendre les populations du Sud pour des esclaves. Comment peut-on être ou rester attaché à un homme qui, durant son très long règne, n'a affiché que condescendance et distance vis-à-vis des populations du Sud ? Qui se souvient d'un seul meeting qui traduirait cette prétendue proximité - de Paul BIYA dans une quelconque localité du Sud au cours des trente dernières années? Par rapport aux populations du Sud, Paul BIYA a toujours été un homme politique froid, insensible, sans contact, même symbolique, avec les populations.
Comment en est-on parvenu à tromper si grossièrement certains Camerounais en leur faisant croire que Paul BIYA est plus attaché aux sudistes ou que ces derniers lui vouent amour, loyauté et culte indéboulonnable? Le Sud comme socle granitique du RDPC est un slogan politique de griot.
Ceux qui répandent cette propagande mensongère sont les élites impopulaires qu'il a fabriquées et qui apparaissent puis disparaissent du paysage politique régional au gré de ses décrets. Sur la base des faux résultats électoraux, issus des laboratoires obscurs du régime sortant, l'on crée une légitimé fantasmée à Paul BIYA dans le Sud. A l'observation, quand vous devenez « élite » dans le Sud, vous devez immédiatement vous adapter et devenir un expert de la fraude électorale. Ce sont ces ministres, directeurs généraux, hauts fonctionnaires ou Chefs traditionnels, soumis à Paul BIYA, revendiquant même pour certaines le triste et regrettable statut de « créatures de Paul BIYA », qui jouent ce rôle indigne. Parmi ces élites il y en a qui, à défaut de reproduire la même froideur que leur chef central vis-à-vis des populations, deviennent des agents de la terreur locale : trafic d'influence, accaparement des terres des villageois par la force, chantage pour le recrutement des jeunes de leur localité dans l'administration, l'armée ou la police contre plusieurs hectares de terres ainsi dérobées aux familles démunies.
Ce deal prend souvent la forme d'un troc des temps contemporains : la famille « obtient » un policier ou un gendarme/militaire et l'élite locale reçoit des terres en contrepartie.
Depuis l'accession de Paul BIYA à la magistrature suprême de notre pays, beaucoup de dignes fils et filles du Sud ont payé au prix fort leur liberté de ton et leur refus de soumission à sa dictature et sa corruption des esprits. La répression multiforme des sudistes devrait renseigner les esprits crédules sur la perception que se fait Paul BIYA de tout sudiste réellement contestataire. Sans scrupule, même de belles âmes y sont passées. Jean Marc ELLA, Marthe EKEMEYONG Epouse MOUMIE, Abel EYINGA, Charles Sylvestre ATEBA EYENE, Gervais MENDO ZE sont quelques victimes de la répression multiforme du régime de Paul BIYA.
Nous lançons un appel fraternel à nos frères et sœurs afin qu'ils s'engagent pleinement au cours des semaines avenirs afin de prendre leur destin en main. Nous n'avons plus le choix. Les populations de notre Région ne doivent plus avoir pour seul destin la souffrance et le silence ou la mort !
Au bout de votre engagement dans la compétition électorale avenir, et après tant d'années de sacrifices, vous verrez enfin la lumière sous l'impulsion d'un nouveau pouvoir véritablement soucieux de vos conditions de vie et du développement de notre Région. Cessez d'être à la solde des politiciens véreux qui vous prennent en otage et vous instrumentalisent à des fins personnelles contre vos compatriotes des autres Régions de notre pays. Prenez votre destin en mains en tournant le dos à cette humiliante éducation de la servitude volontaire ou forcée. Vous deviendrez alors des Citoyens et non plus ces sujets exposés à la risée des Hommes libres ! »