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Politique of Mardi, 23 Novembre 2021

Source: Le Messager

Succession : voici comment le sérail veut fragiliser Paul Biya

Entre le bruyant Appel de la Lékié qui invite le Chef de l’Etat à se présenter en 2025, en passant par les appétits du trône qu’étalent le ministre d’Etat/Secrétaire générale de la présidence de la République, le jeu trouble du Rdpc et les soupçons de transmission dynastique du pouvoir qu’incarnent Franck Biya, la prochaine élection présidentielle s’annonce dans un tourbillon de velléités.

La course vers la succession de Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, s’annonce tumultueuse. A en croire les signaux, le scrutin de 2025 sera tout sauf une simple ballade de santé pour le président sortant. Avec 39 ans de règne à la tête de l’Etat, 7 ans comme Premier ministre de feu Ahmadou Ahidjo, entré dans la Haute administration en 1962, l’homme Lion qui incarne aujourd’hui le Cameroun avec ses hauts et ses bas, ses (rares) réussites et ses insuccès, n’aura visiblement pas la même aise à briguer un énième mandat à la tête du Cameroun. Maître des horloges qui n’a d’yeux que sur son trône, le président du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), quoique « candidat naturel », a le trône le plus convoité. Lui qui a hérité du fauteuil présidentiel le 6 novembre 1982 avec la promesse d’apporter au peuple, la démocratie, l’État de droit, la prospérité et le respect de la chose publique. Présenté et attendu comme guide d’un pays déchiqueté par des crises multiformes, Paul Biya dont le poids de l’âge commence à jouer en sa défaveur, est d’ores et déjà encerclé.

1-Ngoh Ngoh : le vice-dieu veut devenir dieu

Aux rangs des prétendants à la succession du N’nomgui, se trouve en pole position Ferdinand Ngoh Ngoh dont l’obsession pour le trône n’est plus un secret pour personne. Récemment en mission pour « s’assurer que les infrastructures construites et en cours de construction répondent au cahier de charge défini par la Confédération africaine de football (Caf) ; rassurer les autorités de la Caf, de la Fédération internationale de football association (Fifa), la communauté nationale et internationale, de la disponibilité effective de toutes les infrastructures retenues pour la Can 2021, de la capacité du Cameroun à organiser des compétitions internationales d’envergure, telle que la Coupe du monde de football junior ; et contribuer à lever tous les doutes sur la capacité du pays à organiser la prochaine Can », le Vice-dieu, vénéré tel un Emir, n’a pas boudé le plaisir de sauter sur l’occasion pour conforter ceux qui l’ont toujours présenté comme le véritable patron de la République. Lui qui, à travers les fameuses Task force qu’il multiplie à la pelle, est par exemple à l’origine du bricolage, des replâtrages et de l’enfumage qu’on a présenté en mondovision concernant la prochaine Coupe d’Afrique des nations (Can) que le Cameroun abritera à partir de janvier 2022.

Le Sgpr et ses suppôts tapis au sein du gouvernement ne sont-ils pas les artisans du retrait de la Can au Cameroun en 2019 sous la très policée appellation « glissement ». N’est-ce pas au même Ngoh Ngoh qu’est imputé le retard devenu mystère autour de la publication par la Chambre des comptes, du rapport d’audit des 180 milliards Fcfa de la dotation globale du Fonds spécial de solidarité nationale pour la lutte contre le Coronavirus (Covidgate), partagés entre plusieurs départements ministériels ? Très attendue à l’Assemblée nationale, la publication de ce volumineux document a été reportée plusieurs fois sans raisons officielles. Une affaire qui constitue peut-être le plus gros scandale de détournements massifs de ces dernières années au Cameroun.C’est qu’au nom de la délégation de signature dont il jouit pleinement, le natif de Minta s’est taillé un costume de vice-dieu qu’il arbore fièrement, paralysant le pays par des guerres de lobbies qu’il sait si bien entretenir, animé par ce désir de succéder à Biya.

En multipliant des actes présidentiels et en transformant les instruments de souveraineté du Chef de l’Etat (Crtv, haute administration, gestion des grands dossiers de la République) en ses propres acquis, le Sgpr ne cache plus sa boulimie pour le Pouvoir. Toute chose qui s’apparente à de la haute trahison dans l’entourage du N’nomgui au regard de tout ce que « le père de la Nation » a fait pour celui qui n’était alors présenté dans le sérail que comme un garçon de course. Poignardé dans le dos, quel crédit pourrat-il encore lui concéder ?

2-Mouvement des Franckistes : Biya père contre Biya fils ?

Dans la course, le groupe de pression baptisé Mouvement citoyen des franckistes pour la paix et l’unité du Cameroun(Mcfp), composé d’hommes politiques, d’hommes d’affaires et de certains proches du pouvoir (agissant presque tous dans l’ombre) et qui ont cru opportun de demander à Franck Emmanuel Biya, fils aîné du président Paul Biya de se présenter à la présidentielle de 2025. Un choix osé et plus que courageux qui continue de faire bouger le microcosme politique, charriant commentaires et analyses les plus ronflants. Malgré le mutisme du concerné, sur sa position, cette formation politique hétéroclite dirigée, apprend-on, depuis 2013 par Mohamed Rahim Noumeau, un chef d’entreprise, estime que Franck Biya est un successeur crédible. Une vaste campagne d’adhésion a d’ailleurs été lancée récemment dans le pays et au sein de la diaspora afin de regrouper le plus de personnes possibles pour soutenir le premier né de la famille Biya qu’on sait pourtant très éloigné du feu des projecteurs.

Dans la foulée, certaines sources confirment que ce mouvement est né avec l’onction de certains membres de la famille présidentielle qui usent de tous les stratagèmes pour imposer leur progéniture et pérenniser ainsi la dynastie Biya au pouvoir. Un scénario d’alternance de père en fils qui s’apparenterait étrangement aux cas du Gabon avec Ali Bongo ou encore plus près de nous avec Mahamat Idriss Deby, porté à la tête de l’organe transitoire quelques heures seulement après le décès de son guerrier de père. Sujet sensible et taxé de tabou, la question de l’alternance au Cameroun s’est donc amplifiée ces derniers mois avec la naissance de ce fameux Mcfp dont le bruitage s’est davantage donné une nouvelle résonnance lorsque Franck Biya a choisi le 6 novembre 2021, date de la célébration du 39e anniversaire de l’accession de son père à la plus haute fonction, pour s’incliner devant la mémoire de feu le sultan Ibrahim Mbombo Njoya.Loin d’une simple visite de courtoisie et d’hommage, le fait que l’homme ait choisi la date de la célébration de l’accession de son paternel à la très haute fonction de président de la République pour se rendre solennellement à Foumban, a ravivé le débat sur les soupçons de transfert dynastique du pouvoir à l’Etat.

3-Rdpc : entre Appels et politique de l’embuscade

La redoutable tempête inattendue qui menace de dessoucher les piliers du pouvoir de Paul Biya en 2025 pour installer un dauphin (encore cagoulé) vient inéluctablement du Rdpc. Si beaucoup ont présenté Jacques Fame Ndongo, la « créature de Biya », son indéfectible soutien, celui qui tient les clés du socle granitique du Sud, comme le parfait successeur, la chronique pré-électorale et ses innombrables rebondissements, annonce d’autres soupirants qui prépareraient tranquillement l’assaut final. Pris sous ce prisme, le fameux appel de la Lékié ne serait-il qu’une agitation des fidèles de Biya ? Question à 10 sous. Lancé lors des assises départementales du Rdpc organisées pour l’installation officielle des bureaux des sections Rdpc/Ofrdpc Ojrdpc et pour la relance des activités statutaires le 31 octobre dernier à Monatélé, le cri de cœur d’Eyebe Ayissi et ses camarades de cette contrée continue de faire des vagues dans un contexte de panique à bord au sein du sérail.

A en croire les initiateurs, le président national reste candidat naturel à l’élection présidentielle contre vents et marées. Du coup, être au pouvoir pendant 39 ans ne veut pas dire que Biya ne veut pas passer la main ou qu’il est contre une alternance démocratique. « La Lékié rappelle en parlant de l’élection en 2025, que l’alternance doit se fait par le choix d’un candidat lors de l’élection présidentielle et pas autrement. S’il y a des personnes qui veulent « attenter » à l’alternance, ce n’est certainement pas l’immense majorité des républicains militants du Rdpc que sont les populations de la Lékié. Par cet appel solennel, la Lékié rappelle et appelle au respect des dispositions en matière d’alternance/succession à la présidence de la République contenues dans la constitution de notre pays le Cameroun et qui encadrent ledit processus, garantissant ainsi une alternance démocratique », expliquait Pr. Guy Tsala Ndzomo, universitaire et non moins élite et chef de 1er degré de la localité d’Edinding dans le département de la Lékié (lire Le Messager du lundi 08 novembre 2021Ndlr).