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Actualités of Thursday, 30 November 2023

Source: La Nouvelle

Scandale à Eneo : Comprendre l’affaire des 186 milliards

Cette histoire qui s’apparente aujourd’hui à un coup d’Etat Cette histoire qui s’apparente aujourd’hui à un coup d’Etat

Cette histoire qui s’apparente aujourd’hui à un coup d’Etat scientifique fomenté par Energy of Cameroon (Eneo), met sur le grill toutes les magouilles entreprises par cette société qui veut d’abord spolier les caisses de l’Etat avant de se mettre à la porte. Tout ceci avec la complicité de certains antipatriotes plus ou moins tapis dans l’ombre.

Il ne fait l’ombre d’aucun doute aujourd’hui sur la volonté de l’Etat du Cameroun à nationaliser l’entreprise en charge de la distribution de l’énergie électrique. C’est du moins le sentiment qui se dégage au lendemain de la réunion tenue le 22 novembre 2023, une réunion du comité interministériel en charge du rachat par l'Etat, des actions de la société Actis au sein de la société Energy of Cameroon (Eneo).

Présidée dans son cabinet par le ministre des Finances (Minfi), Louis Paul Motaze, assisté du ministre de l'Eau et de l'Energie (Minee), Gaston Eloundou Essomba et du ministre délégué auprès du ministre de l’Economie, de la Planification et de l'Aménagement du Territoire, en charge de la Planification, Paul Tasong, cette réunion va inéluctablement déboucher sur l'ouverture dans les prochains jours, des négociations de rachat par l'Etat du Cameroun, des actions d'Actis estimées à 51%. C’est du moins ce qu’indiquent des sources généralement bien informées. En réalité, cette volonté d’acquisition des actions d’Actis avait déjà été manifestée dans la correspondance du 5 septembre 2023 que le ministre d’Etat secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh, adresse au secrétaire des services du Premier ministre, Séraphin Magloire Fouda.

Dans la correspondance en question, le président Paul Biya instruit la mise sur pied d’un comité interministériel chargé de piloter le dossier de la nationalisation de l’entreprise en charge de la distribution de l’énergie électrique au Cameroun. C’est d’ailleurs ce même comité qui s’est réuni la semaine dernière au Minfi, dans le but d’implémenter et de mettre en œuvre cette volonté présidentielle de se séparer de l’actionnaire anglais. Bien avant cela, et contre toute attente, Eneo va brandir à l’Etat du Cameroun, une ardoise de 186 milliards de Fcfa sortis l’imagination fertile de certains réseaux. A ce sujet justement, des sources concordantes indiquent en effet que c’est dans une lettre datée du 14 avril 2023 que David Grylls, le patron d’Actis, va servir une mise en demeure au Premier ministre, Joseph Dion Ngute, réclamant un paiement de 186 milliards de Fcfa, au risque de traîner le pays en justice pour « rétention illégitime » de ses liquidités.

« Actis vous a écrit en septembre 2022 pour vous alerter sur le fait que les dettes accumulées étaient si importantes que la liquidité d’Eneo était menacée. Par la suite, des paiements limités ont apporté un certain répit. Cependant, les paiements ne se sont pas poursuivis. Nous sommes informés qu’Eneo est maintenant redevable d’environ 186 milliards de Fcfa. Une fois de plus, la liquidité d’Eneo est menacée, ainsi que sa capacité à réaliser pleinement son potentiel dans le cadre de la concession et d’autres accords. Compte tenu du rôle crucial joué par Eneo dans la production, la distribution et la vente d’électricité dans tout le pays, la viabilité continue du secteur de l’électricité au Cameroun est toujours fortement menacée », écrivait alors David Grylls.

Manœuvres peu orthodoxes

Largement suffisant pour qu’au niveau de l’Etat du Cameroun, l’on commence à subodorer de la part d’Eneo des manœuvres peu orthodoxes pour délester les caisses de l’Etat d’importantes sommes d’argent. C’est d’ailleurs dans le but d’éclairer cette situation que des réunions seront multipliées entre l’Etat du Cameroun et Eneo. Des cas de « double facturation » imputables à Eneo, seront même découverts au cours des réunions en question. Si Actis soutient qu’il s’agit que « l’essentiel de cette dette accumulée concerne l’électricité consommée par l’Etat et les entités publiques. (…) complétée par les remboursements de la taxe sur la valeur ajoutée pour 2022 et les compensations tarifaires dues, mais non acquittées », au Minfi par contre, l’on estime que les 186 milliards de Fcfa demandés sont surréalistes. Ici, on rappelle que 269 milliards de Fcfa avaient déjà été versés pour apurer les dettes des seules années 2020, 2021 et 2022.

Par ailleurs, la dernière opération qui portait sur un paiement de 42 milliards de Fcfa s’est achevée au premier trimestre 2023. Alors question : d’où sortent alors les 186 milliards réclamés par Eneo ? Dans la foulée, de l’écume des commentaires entendus çà et là , il ressort que lors de la rencontre du 25 avril 2023 entre Eneo et l’Etat, il est apparu que certaines dettes déjà payées ou en cours de paiement par les collectivités territoriales décentralisées, les universités, les hôpitaux et les entreprises publiques avaient une fois de plus été prises en compte, au même moment où certaines entreprises publiques à l’instar de la Camwater ne se reconnaissaient pas dans les montants qui leur sont imputés.

Pourtant dans certains salons huppés et buvettes de fortune à Koumassi, il se murmure qu’une vaste enquête a mis à nu, des faits troublants au sein de société, notamment un réseau de blanchiment d’argent impliquant de hauts cadres. Des langues qui ne cessent de se délier parlent, à tort ou à raison, d’un directeur financier au salaire mirobolant qui aurait trouvé refuge du côté du Panama. Un certain Adrian Ratner, qui toucherait 24 millions Fcfa, pourtant il ne se rendait physiquement au bureau au Cameroun qu’une fois par mois. Vrai ou faux ? Une chose écœure cependant : le silence assimilable à la complicité du Pca Séraphin Magloire Fouda. Un silence qui conforte aujourd’hui les vaticinations de quelques hobereaux qui se plaisent à pinailler que toutes ces rémunérations exorbitantes et autres rétro-commissions versées de part et d’autre, dissimuleraient tout simplement un vaste réseau de détournement des recettes d’Eneo via un système de blanchiment sophistiqué, impliquant même quelques pontes du régime. Il revient donc ici d’interpeller ces cadres camerounais d’Eneo qui se liguent contre la patrie, en s’accommodant au jeu de cette société qui veut mettre le Cameroun en difficulté. Des enquêtes devraient d’ailleurs être diligentées dans ce sens, surtout que la lutte contre la corruption au Cameroun en dépend.