Une simple phrase, une nuance de langage, et c’est tout un système de pouvoir qui vacille. Dans une déclaration publiée par le quotidien Le Grand Titre, Narcisse Mouelle Kombi, ministre des Sports, affirme que « Paul Biya a demandé que je laisse travailler la FECAFOOT. » Une formulation anodine en apparence, mais qui révèle bien plus qu’un simple changement de ton. En utilisant le verbe « demander » plutôt qu’ordonner, le ministre expose, peut-être malgré lui, un Paul Biya affaibli, dont l’autorité ne s’impose plus avec la même fermeté qu’autrefois.
Dans le contexte politique camerounais, où chaque mot compte et où le respect de la hiérarchie est une règle d’or, le choix des termes n’est jamais innocent. Quand un ministre déclare publiquement que le Président de la République « a demandé » plutôt que « a ordonné » ou « a instruit », cela suggère une transformation profonde dans l’exercice du pouvoir. Paul Biya, figure historique du Cameroun, n’est plus perçu comme celui qui impose, mais comme celui qui sollicite.
Pour les observateurs politiques, cette nuance est un signe clair : le temps où les directives présidentielles s’appliquaient sans discussion semble révolu. Et c’est précisément cette faiblesse perçue que Narcisse Mouelle Kombi, en citant ainsi le Chef de l’État, met en lumière. Une façon subtile, mais redoutable, de montrer que l’autorité suprême n’a plus le même poids.
En révélant cette « demande », Narcisse Mouelle Kombi ne se contente pas de rapporter une instruction. Il humilie, sans le dire explicitement, un Paul Biya dont l’influence semble s’effriter. Dans un pays où le respect du Président est une tradition quasi sacrée, une telle formulation est une provocation. C’est une manière de signifier que les temps ont changé, que les ministres ne se contentent plus d’obéir, mais négocient, interprètent, voire ignorent.
Cette attitude, loin d’être anodine, pourrait bien sceller le sort de Narcisse Mouelle Kombi lui-même. Dans un système politique où la loyauté est une monnaie d’échange essentielle, montrer publiquement que le Président n’a plus l’autorité absolue est une faute grave. Une faute qui, dans le contexte des prochains remaniements gouvernementaux, pourrait lui coûter cher.
Les rumeurs de remaniement ministériel circulent depuis des mois à Yaoundé. Dans ce contexte, la déclaration de Narcisse Mouelle Kombi pourrait bien être interprétée comme une erreur stratégique. En affaiblissant publiquement l’image de Paul Biya, il prend le risque de se retrouver lui-même sur la sellette.
Les observateurs politiques s’accordent à dire que son sort est désormais scellé. Dans un système où la survie dépend de la capacité à préserver les apparences, avoir osé suggérer, même indirectement, que le Président n’est plus maître de ses décisions, est une ligne rouge qui a été franchie. Les prochains jours diront si cette audace lui sera fatale, mais une chose est sûre : au Cameroun, ceux qui exposent la faiblesse du pouvoir finissent souvent par en payer le prix.
L’affaire Narcisse Mouelle Kombi est révélatrice d’un moment charnière dans l’histoire politique camerounaise. Elle montre que le pouvoir de Paul Biya, autrefois incontesté, est désormais sujet à caution. Mais elle révèle aussi que ceux qui, comme Mouelle Kombi, jouent avec les symboles de ce pouvoir, prennent un risque immense.









