Actualités of Monday, 24 November 2025
Source: www.camerounweb.com
Proclamé « président élu » après la contestée élection d’octobre 2025, l’opposant a fui le Cameroun grâce à un réseau de soutien composé de milices, de déserteurs et de notaires nigérians, avant de trouver asile temporaire en Gambie.
L’exil d’Issa Tchiroma Bakary, l’opposant camerounais qui se revendique vainqueur de la présidentielle du 12 octobre 2025, ressemble à un thriller politique. Échappant de justesse à plusieurs tentatives d’arrestation, il a été exfiltré du Cameroun vers le Nigeria par un dispositif de sécurité hétéroclite, avant de trouver un refuge officiel, bien que temporaire, en Gambie.
Fuites et filières : le réseau d’évasion de l’opposant
L’opération d’exfiltration a débuté dans la clandestinité à Garoua, le fief de Tchiroma. Selon des sources proches de l’opposant, son évasion a été orchestrée par un service de sécurité privé aussi surprenant qu’efficace. Ce dernier était composé :
D’anciens militaires camerounais déserteurs, se réclamant d’une « armée loyaliste ».
D’éléments de l’organisation « Pouvoir au peuple », un mouvement dirigé depuis l’étranger.
Ce groupe armé non étatique a assuré la protection de l’opposant et a coordonné sa fuite du territoire camerounais vers la ville de Yola, dans l’État nigérian de l’Adamawa, au début du mois de novembre.
Le financement de cette opération serait lié à un homme d’affaires nigérian installé à Garoua, El Hadj Ba Iya. C’est d’ailleurs à bord du véhicule de son fils que Tchiroma a pris la fuite initiale le jour de l’élection, le 12 octobre.
Le bras de fer sécuritaire entre le Cameroun et le Nigeria
Une fois au Nigeria, la traque n’a pas cessé pour autant. Les services de renseignement camerounais, ayant tracé le téléphone de l’épouse de Tchiroma, Aminata Tchiroma Müller, ont localisé leur cachette à Yola. Ils ont immédiatement alerté leurs homologues de la National Intelligence Agency (NIA) nigériane.
Une opération conjointe était sur le point d’aboutir : le gouverneur de l’Adamawa, Ahmadu Umaru Fintiri, avait même émis un ordre d’interpellation. Cependant, dans un revirement inattendu, ce dernier l’aurait annulé, sauvant l’opposant d’une arrestation quasi certaine.
Selon nos informations, les autorités camerounaises avaient préparé une demande d’extradition, mais ont choisi de ne pas la transmettre officiellement à Abuja, craignant probablement un refus qui aurait constitué un camouflet diplomatique.
Le refuge gambien : asile humanitaire et calcul politique
Sous la pression croissante du Cameroun sur le Nigeria, Issa Tchiroma Bakary a dû reprendre la route de l’exil. Le 7 novembre, il a trouvé refuge en Gambie.
Banjul a officiellement confirmé sa présence le 23 novembre, précisant qu’il avait été admis « temporairement et pour des raisons humanitaires », en raison des « fortes tensions politiques au Cameroun ». Le gouvernement gambien a tenu à marquer le coup en insistant sur le fait qu’il n’accepterait « aucune activité subversive contre un État tiers », un message d’apaisement clairement adressé à Yaoundé.
De son côté, la « Présidence élue du Cameroun », une structure informelle créée par Tchiroma, a remercié la Gambie par la voix de sa porte-parole, Me Alice Nkom.
Pendant que l’opposant trouve asile à l’étranger, ses partisans restés au Cameroun subissent les conséquences de son exil. Les services de renseignement camerounais ont procédé à une série d’arrestations visant des soutiens, des employés et même des membres de la famille de son épouse, dans une tentative apparente de démanteler son réseau interne.
Cette affaire, qui mêle enlèvements évités de justesse, milices privées, déserteurs et jeux d’influence diplomatique, illustre la violence sourde de la crise post-électorale camerounaise et la détermination de l’opposant à continuer la lutte, désormais depuis l’étranger.