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Actualités of Thursday, 31 August 2023

Source: www.bbc.com

Qui est le général Brice Oligui Nguema, nouvel homme fort du Gabon ?

Qui est le général Brice Oligui Nguema, nouvel homme fort du Gabon ? Qui est le général Brice Oligui Nguema, nouvel homme fort du Gabon ?

Après avoir déposé le président gabonais Ali Bongo, le général Brice Oligui Nguema a été porté dans les rues par ses troupes triomphantes, qui scandaient "Oligui, président ! Oligui, président !

Le général de 48 ans apparaît certes comme un homme du peuple, porté par ses soldats, mais pour beaucoup, c'est un leader inattendu.

Il y a cinq ans à peine, il n'existait pratiquement pas dans la conscience publique gabonaise, ayant passé dix ans en dehors du pays après avoir été écarté du cercle rapproché de la famille Bongo qui, jusqu'à mercredi, avait régné sur le Gabon pendant près de 56 ans.

À son retour, le général Nguema s'est discrètement hissé au plus haut niveau de l'armée. Il y consacre ses journées au maintien du régime du président Ali Bongo.

Le nouvel homme fort du Gabon est né dans la province du Haut-Ogooué. Cette région est un fief de la famille Bongo et certains disent même que le général Nguema est le cousin d'Ali Bongo.

Le choix des armes

Gen Nguema a suivi les traces de son père et a poursuivi une carrière militaire. Très jeune, il a rejoint la puissante unité de la Garde républicaine du Gabon, après avoir été formé à la prestigieuse académie militaire du Maroc.

Ce jeune officier ambitieux a rapidement attiré l'attention des hauts gradés de l'armée et est devenu l'assistant du président de l'époque, Omar Bongo, qui était le père d'Ali Bongo.

On dit que Gen Nguema était extrêmement proche d'Omar Bongo - il a servi l'autocrate jusqu'à sa mort en 2009.

Edwige Sorgho-Depagne, analyste spécialisée dans la politique africaine, a déclaré à l'émission Newsday de la BBC : "On ne s'attendait pas à ce qu'il dirige le Gabon à ce moment-là. Dans les années 2000, il a été éloigné du pays pendant un certain temps... il était presque oublié."

Lorsque Ali Bongo a succédé à son père en 2009, Gen Nguema a été démis de ses fonctions. Il a commencé ce que les médias locaux décrivent comme un "exil", en servant pendant près de 10 ans comme attaché aux ambassades du Gabon au Maroc et au Sénégal.

Retour d'"exil"

Un an après l’Accident Vasculaire Cérébral (AVC) d’Ali Bongo survenu à Ryad en Arabie Saoudite en octobre 2018, le colonel Brice Clothaire Oligui Nguema est rappelé au Gabon où il remplace un autre colonel et non moins demi-frère du président– Frédéric Bongo – à la tête du service de renseignement de la Garde Républicaine : la Direction Générale des Services Spéciaux (DGSS).

Après seulement six mois à ce poste, Gen Nguema a été promu à la tête de la Garde républicaine.

Aux commandes de la Garde républicaine, il impulse des réformes en vue de la rendre plus efficace dans l'une de ses missions fondamentales : le maintien du régime.

Pour cela, il renforce le dispositif de protection d’Ali Bongo, mais sa réforme la plus marquante est sans doute le développement de la Section des Interventions Spéciales , une unité spéciale placée sous l’autorité directe d’Ali Bongo.

Il fait passer les effectifs de cette unité d’une trentaine d'éléments à plus de 300 (avec près de 100 tireurs de précision ), qu’il dote d’équipements de pointe et dont il compose même le chant dont une des paroles phare est : « Je défendrais mon président avec honneur et fidélité .»

Un ancien proche collaborateur a déclaré à l'AFP que le général était "un homme de consensus, qui n'élève jamais la voix, qui écoute tout le monde et cherche systématiquement le compromis".

Peu après sa prise de fonction, le général Nguema a lancé l'opération "mains propres", qui visait à lutter contre les détournements de fonds présumés de l'Etat.

Accusations de corruption

Cependant, le général Nguema a lui-même été accusé de thésauriser l'argent public.

Dans une enquête menée en 2020, l'organisation américaine de lutte contre la corruption OCCRP a affirmé que le général Nguema et la famille Bongo avaient acheté des propriétés coûteuses aux États-Unis avec de l'argent liquide. Le général aurait dépensé 1 million de dollars (790 000 livres sterling) pour trois propriétés.

La réponse de Nguema à ce rapport ? "Je pense que, que ce soit en France ou aux Etats-Unis, une vie privée est une vie privée qui doit être respectée".

Il y a à peine huit mois, l'agence de presse nationale du Gabon rapportait que Gen Nguema avait publiquement réaffirmé sa loyauté à l'égard de la présidence d'Ali Bongo, qui avait duré 14 ans.

Une nouvelle page ?

Mais samedi, quelques heures seulement après l'annonce de la victoire d'Ali Bongo à l'issue d'une élection présidentielle contestée, l'armée a annoncé qu'elle annulait les résultats et qu'elle prenait le pouvoir.

Le président étant assigné à résidence, le général Brice Clothaire Oligui Nguema a été nommé chef de la transition au Gabon.

Le général a déclaré au journal français Le Monde que les Gabonais en avaient assez du régime d'Ali Bongo et que le président n'aurait pas dû briguer un troisième mandat.

"Tout le monde en parle, mais personne ne prend ses responsabilités", a-t-il déclaré. "L'armée a donc décidé de tourner la page."

Les Nations unies, l'Union africaine et la France ont condamné le coup d'État, le huitième à avoir lieu en Afrique de l'Ouest et en Afrique centrale depuis 2020.

Mais le général Nguema semble avoir conquis une grande partie de l'opinion publique. Il a également réussi à unir l'armée, qui se divise selon des lignes ethniques.

Accusé de corruption et ayant passé l'essentiel de sa carrière dans le cercle rapproché des Bongo, il ne sera peut-être pas le nouveau départ espéré par les Gabonais.

Il restera cependant dans les livres d'histoire du pays comme l'homme qui a "tourné la page".