Dans un communiqué signé par ses responsables locaux, le parti au pouvoir exhorte ses militants à la sérénité et met en garde contre les "provocations sur les réseaux sociaux"
À quelques jours de la proclamation officielle des résultats de l'élection présidentielle par le Conseil constitutionnel, prévue au plus tard le 26 octobre, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) du département du Mayo-Kani lance un appel solennel au calme. Dans un communiqué rendu public ce lundi, les responsables départementaux du parti au pouvoir demandent à leurs militants de résister aux provocations et de préserver la paix sociale.
"Le Pouvoir vient de Dieu et il ne se trompe pas. Tout ce qu'il fait est bon. Le Mayo-Kani a bénéficié de multiples bienfaits de l'État. Ne soyons pas ingrats", peut-on lire en introduction du communiqué signé par Dr Taïga, président de la Commission départementale de campagne du RDPC pour le Mayo-Kani, et Hele Pierre, vice-président de la Commission régionale de campagne pour l'Extrême-Nord.
Ce message empreint de religiosité s'inscrit dans un contexte de tensions croissantes après l'annonce des résultats provisoires qui donnent Paul Biya vainqueur avec 53 à 54% des voix, devant Issa Tchiroma Bakary, originaire de la région du Nord voisine.
Le RDPC du Mayo-Kani exprime une préoccupation particulière face à la propagation de contenus contestataires sur les plateformes numériques. "Nous lançons un appel au calme et à la sauvegarde de la paix à tous les fils et filles du Mayo-Kani et leur demandons de ne pas céder aux mots d'ordre de provocations de toute sorte issus des réseaux sociaux qui peuvent compromettre l'ordre public", indique le communiqué.
Cette mise en garde intervient alors qu'Issa Tchiroma Bakary, principal opposant et candidat du Front pour le salut national du Cameroun (FSNC), multiplie les publications sur Facebook de procès-verbaux censés démontrer sa victoire dans plusieurs départements clés, avec environ 60% des voix selon ses propres décomptes.
Au-delà de ses militants, le parti au pouvoir élargit son message à l'ensemble des acteurs politiques et traditionnels du département. "Nous demandons aux Maires, aux Chefs Traditionnels, aux Présidents des Sections RDPC, OFRDPC, OJRDP, aux Élites du Mayo-Kani de travailler la main dans la main dans le calme, la sérénité, la concorde et la paix", précise le document.
Cette paix est présentée comme "si chère au Président de la République S.E Paul BIYA, artisan infatigable de la stabilité et de l'unité nationale", une formulation qui anticipe déjà la confirmation de sa victoire par le Conseil constitutionnel.
Le Mayo-Kani, situé dans la région de l'Extrême-Nord, constitue une zone stratégique du dispositif électoral camerounais. Département frontalier densément peuplé, il représente un enjeu crucial dans l'équilibre politique régional, d'autant que la région voisine du Nord a basculé en faveur d'Issa Tchiroma Bakary selon certaines sources.
L'appel au calme lancé par les responsables locaux du RDPC témoigne de la fébrilité qui règne dans les rangs du parti au pouvoir, malgré l'annonce de résultats favorables à Paul Biya. Les références aux "bienfaits de l'État" et au risque d'"ingratitude" suggèrent une stratégie de rappel des réalisations gouvernementales pour maintenir la cohésion de l'électorat.
Le ton du communiqué oscille entre l'appel à la responsabilité collective et l'avertissement implicite. En demandant à rester "soudés, solidaires et plus engagés pour le meilleur de notre pays", les signataires cherchent à prévenir toute manifestation de contestation qui pourrait se transformer en troubles à l'ordre public.
Cette initiative locale s'inscrit dans une dynamique plus large d'appels au calme multipliés par le gouvernement central, qui exhorte tous les acteurs à patienter jusqu'à la proclamation officielle des résultats définitifs.
Reste à savoir si ces appels suffiront à apaiser les tensions dans un contexte où l'opposition conteste vigoureusement les chiffres officiels et mène une bataille parallèle sur le terrain de l'opinion publique et des réseaux sociaux.