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Actualités of Wednesday, 25 July 2018

Source: Le Courrier N°091

Paul Biya a des soucis: révélations sur le ‘parti politique du Grand Nord’

La présidentielle se tiendra le 7 octobre 2018. La présidentielle se tiendra le 7 octobre 2018.

Voici pourquoi et comment ses promoteurs avancent masqués à deux mois de l’importante échéance électorale de la présidentielle du 7 octobre 2018. L’hypocrisie et le chantage utilisés comme armes politique pour faire basculer des adhésions massives des cadres du Rdpc et d'autres formations politiques rivales dans ses rangs, pour la conquêtedu pouvoir suprême.

Le parti de la justice et du progrès (PJP), n’a pas d’existence légale. Personne ne lui connaît de dirigeants, qui ne s’est physiquement manifesté nulle part, mais hante le sérail depuis de longs mois. «Politique-fiction» ? Oui et non, se gaussait récemment le magazine panafricain Jeune Afrique, à son sujet. Certes, le PJP encore désigné comme le « parti du Grand Nord » n’existe pas encore de manière formelle, mais dans l’ombre, de mystérieux hommes politiques originaires du septentrion du pays travaillent à sa légalisation officielle. Pour l’instant, ils avancent masqués, mais envisagent de se découvrir après les élections législatives, municipales et régionales prochaines, en espérant provoquer « des défections massives au sein des partis rivaux.» Le Courrier est aujourd’hui à mesure de révéler ce qui suit : le «parti du Grand Nord» est une fiction dans la réalité. Le Parti de la justice et du progrès (PJP), dont le siège est fixé à Maroua Région de l’Extrême-Nord et «peut, lorsque les circonstances l’exigent, être transféré en tout autre lieu du territoire national par décision du Secrétariat national», dispose en effet d’un projet de statuts en bonne et due forme.

Avec pour emblème un cœur embrassé par deux mains, le rouge-sang et le noir comme couleurs et fraternité-égalité-travail comme devise- la formation ne revendique officiellement aucune orientation sociologique ou régionale. Dans son projet de statuts, le PJP, sous son pavillon officiel de «parti du Grand Nord», s’engage à contribuer à la promotion d’une société [camerounaise] démocratique, respectueuse des droits de l’homme et du citoyen, dans le cadre d’un État de droit reposant sur le libre suffrage, la séparation, la limitation et l’équilibre des pouvoirs, le pluralisme des partis politiques, ainsi que la garantie de la liberté des médias». Le parti politique du Grand Nord «a affirme l’égalité de tous les citoyens et combat toute discrimination liée, à la race, à la tribu, à la religion et au sexe», et «s’engage à accélérer le développement du Cameroun pour le bien-être du peuple ; à défendre l’unité nationale ; à veiller à une éducation de qualité pour tous fondée sur les valeurs d’éthique». Mais comment peut-on se résigner à vivre dans l’anonymat lorsqu’on dispose de telles ambitions pour son pays ?

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Peut-on seulement rêver de gouverner à visage couvert ? Ces préoccupations, véritable curiosité par temps de multipartisme intégral, taraudent les esprits en même temps qu’elles intriguent et inspirent la méfiance dans les milieux du sérail et des services spéciaux de la présidence de la République. Un pro- jet honnête ne saurait souffrir d’ambigüités. Mais pourquoi donc ce mystère, entretenu de- puis plus d’un an, autour d’une histoire qui a priori n’en vaut pas la peine ?

Plan de guerre

D’où la conviction, pour beaucoup d’observateurs, d’une écume sous laquelle se cache une stratégie bien plus pernicieuse qu’elle ne laisse croire. Le plan de «guerre» ne sera efficace que tant que ses éminences grises resteront dans l’ombre. Afin de confirmer le caractère sérieux de la démarche, ses promoteurs ont discrètement organisé des fuites de leurs textes organiques, avec le secret espoir qu’ils parviennent à leur principale cible, Paul Biya, l’actuel Chef de l’Etat au pouvoir, candidat à sa propre succession, qui espèrent-ils saura décrypter le message codé… Le PJP, note-t-on, fait son apparition virtuelle au Cameroun dans un contexte politique doublement particulier, caractérisé par une fin de règne inéluctable du régime actuel conduit par le président Paul Biya, avec une élection présidentielle prévue le 7 octobre 2018, ainsi qu’un besoin de redistribution des cartes au plan géostratégique et politique. Instrument de chantage au service de pontes du régime, le «parti du Grand Nord» est aussi la vitrine d’un marché de dupes entretenu par des ressortissants du septentrion.

Lesquels, soit sentant le fameux «axe Nord-Sud» leur échapper, soit souhaitant rappeler à Paul Biya sa «dette» de sang envers les «frères» de l’ex-président de la République feu El Hadj Babatoura Ahmadou Ahidjo, veulent garder la haute main sur les grands équilibres politiques. Face à une érosion continue des élites, aux batailles de positionnement doublées d’un subtil souci de se poser en défenseurs des «Nordistes». Si, en 2002, les signataires du «Mémorandum sur les problèmes du Grand Nord» avaient nommément signé leurs revendications, les promoteurs du PJP, eux, apparaissent comme de fieffés fourbes. Leur démarche, s’inscrit dans un environnement de chantage permanent.

C’est un message clair qui est ainsi passé au chef de l’État : garder les équilibres actuels, renforcer le pouvoir de certains rentiers bien ciblés de peur de voir le Grand-Nord, vivier électoral par excellence du parti au pouvoir le Rdpc, basculé dans l’opposition. Et qui, mieux que ceux qui vivent des rentes publiques, peut aujourd’hui se poser en incontournable bouclier du président de la République Paul Biya à l’approche de l’élection présidentielle, dont il est d’office candidat? Les barons du septentrion, bien sûr, dont quelques manœuvres souterraines, au lendemain de la mise à l’écart politique de Marafa Hamidou Yaya, ex- ministre d’Etat, secrétaire général à la présidence de la République, avaient déjà permis d’obtenir des strapontins. Cette hypocrisie poli- tique est donc appelée à s’accentuer au fur et à mesure qu’approche la présidentielle, sous le couvert d’un parti poli- tique qui existe sur le papier et dont les promoteurs putatifs, avancent masqués, en se gardant de rester dans l’anonymat.