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Actualités of Thursday, 22 December 2016

Source: camer.be

Marché Mokolo: le Capharnaüm tient son rôle

Mokolo revendique bien sa réputation de capharnaüm Mokolo revendique bien sa réputation de capharnaüm

Bousculades, attaques ou arnaques, voilà à quoi sont exposés, en cette période d’avant-fêtes, les clients de cet espace marchand de Yaoundé.

Nom officiel: marché Mokolo. Lieu: Yaoundé II. Signe particulier: grand centre commercial de la capitale. A ces traits identitaires, on pourrait encore ajouter qu’il est ouvert à toutes les mixités. En cette fin d’année, Mokolo présente la particularité de cumuler trois vraies raisons d'y aller: une rue très bon marché où s'époumonent tous les matins les vendeurs de quatre saisons, une place largement dédiée à la Chine (brocante, fripes, chaussures d'occasion) et quelques halles couvertes, joliment ponctuées d'étals de jouets. En prélude à Noël et la Saint-Sylvestre, Mokolo ne s’empêche pas de fédérer aussi des commerces de plus en plus pointus comme ceux de l’électroménager.

La balade dans cet espace consiste donc à butiner de l'un à l'autre, selon son temps et ses envies. Ce 16 décembre 2016, Mokolo revendique bien sa réputation de capharnaüm. Reste à trouver un autre nom pour dire la difficulté d’y circuler. Pour les usagers, il y a deux options pour circuler: se faire tout petit ou alors beaucoup plus grand que les autres. La première possibilité permettra de passer «presque inaperçu » et de faufiler entre des individus. La seconde quant à elle procure le pouvoir et l’influence nécessaire pour se frayer un chemin. Hormis ces deux opportunités, c’est parti pour des heures de courses, ceci au risque de se faire soutirer ou dans les meilleurs des cas de rentrer bredouille.

Insécurité

Dans cet espace marchand, tous les secteurs sont bondés de monde. Dans les allées du marché, les acheteurs ne sont pas les seuls concernés. Les pickpockets s’invitent également aux préparatifs de la fête. Une seconde d’inattention peut valoir la perte de revenus annuels, des téléphones, de bijoux, de portefeuilles etc. Amélie Mandeng peut se considérer comme chanceuse. Lors de ses achats jeudi 15 décembre, seul le regard insistant de sa fille sur le «présumé bandit» pendant qu’il posait son acte a attiré son attention. La femme prise de panique a alarmé les alentours et se sentant détecté, ce dernier prit la fuite en laissant tomber le porte-monnaie. Cynthia Enama rentre aussi dans le registre des personnes à qui la chance a souri.

Il faut dire que son expérience lui a permis d’éviter la répétition des faits. «Cela fait deux ans que j’ai été victime de ces bandits, ils avaient déchiré mon sac et pris mon porte-monnaie, ce n’est qu’au moment d’effectuer un achat que je m’en suis aperçue mais c’était trop tard. Cette année, ils ont encore déchiré mon sac mais comme j’arrête mon argent en main depuis ce temps, ils n’ont rien pris, heureusement », relate la jeune femme.  

«Frappe»

Une autre forme de maraude plane également dans les marchés en cette saison de grande affluence. C’est celle dont a été victime Sabine Aurel Nouitcheu, «J’ai acheté un pantalon chez un marchand ambulant et lorsque je suis arrivée chez moi, je me suis rendue compte que c’était un ensemble de vieux tissus emballés dans le plastique, j’ai pensé y retourner mais mes proches qui ont déjà vécu ça, m’ont demandé de laisser tomber car cela ne servirait à rien» explique cette élève.  

Hausse des prix

«A ce prix tu ne pourras pas acheter une chaussure de bonne qualité maintenant, tu oublies que nous sommes en décembre ?» rappelle Alain, vendeur de chaussure à la sauvette à une de ses clientes. Après une quinzaine de minutes passée à discuter sur le prix d’une paire de chaussures, les deux n’ont pas trouvé un terrain d’entente. Selon cette dernière, elle a l’habitude d’acheter ses articles chez Alain entre 6 000 et 8 000 Fcfa, mais cette fois, «il prétend avoir acheté la marchandise chère et doit la revendre à des prix plus élevés pour récupérer son argent. Il est arrivé à me poser la question de savoir si quelqu’un n’aimerait pas faire des recettes énormes en fin d’année». Les commerçants de vêtements ne sont pas en reste.

Pour eux la formule est simple, «c’est à prendre ou à laisser». Dans une boutique de prêt à porter pour femmes et enfants située à l’intérieur du marché, l’on n’a pas l’air de supplier la clientèle. Tout essayage se fait après négociation du prix. Pour celles qui ne veulent pas se soumettre à cette règle, il leur est exigé de quitter les lieux le plus souvent avec les mots pas toujours corrects. «Je suis le carrefour, tu vas tourner et revenir me trouver ici, sinon comment vas-tu faire pour passer les fêtes ?»

Vacarme

Dans les échoppes, la musique est le support de communication le plus utilisé. Celles dites de l’heure sont jouées en boucle pour attirer l’attention de leur clientèle. Le volume est élevé à son plus haut degré, parfois obligeant de crier pour se faire entendre. Dans la foulée, les vendeurs à la sauvette d’un ton ironique s’adressent à leurs clientèles «vous ne pouvez pas rester chez vous ? Ou alors allez au marché du Mfoundi ou celui de Mvog Mbi, est ce que Mokolo est le seul marché de Yaoundé?».

Les plus accoutumés prennent ces intrigues à la rigolade tandis que ceux habités par un caractère spontané regimbent «vous aussi restez chez vous, qui vous a appelé ici ?» et les injures s’en suivent.