Vous-êtes ici: AccueilActualités2022 10 10Article 687920

Actualités of Monday, 10 October 2022

Source: www.bbc.com

Manifestations en Iran : quelles sont les revendications ?

Manifestations en Iran : quelles sont les revendications ? Manifestations en Iran : quelles sont les revendications ?

Cela fait trois semaines que des manifestations nationales - déclenchées par la mort d'une jeune femme - ont commencé en Iran. Au cours de cette période, les revendications des manifestants n'ont cessé de croître pour inclure une série de questions que les jeunes Iraniens veulent voir changer dans leur pays.

L'élément déclencheur a été la mort de Mahsa Amini, une jeune femme irano-kurde décédée après avoir été arrêtée par la police des mœurs iranienne pour avoir prétendument enfreint la loi stricte obligeant les femmes à se couvrir les cheveux avec un hijab, ou foulard.

Largement menés par des femmes, les manifestants voulaient des réponses sur la façon dont elle est morte. Ils ont demandé des comptes, l'abrogation des lois strictes sur le hijab et l'abolition de la police des mœurs iranienne, qui les fait appliquer.

"Femme, vie, liberté"

Le principal slogan des manifestants est "Femme, vie, liberté" - un appel à l'égalité et une position forte contre le fondamentalisme religieux.

"C'est un nouveau slogan que nous n'avions jamais entendu dans les manifestations auparavant", déclare Baran Abbasi, grand reporter de la BBC Perse.

Les hommes ont également rejoint les manifestations en scandant le même slogan.

"Lorsque la mort de Mahsa est survenue, les droits des femmes étaient au premier plan. Mais les droits des femmes, et la liberté des femmes en Iran, signifient la liberté pour tous", explique Negin Shiraghaei, une militante irano-britannique des droits des femmes basée au Royaume-Uni.

Mais à mesure que les manifestations se sont étendues et ont rapidement pris de l'ampleur, les revendications sont devenues plus vastes.

Des chants de "mort au dictateur" peuvent être entendus dans les rues - une référence au leader suprême du pays et à la fin de la République islamique.

"Vous l'entendez de la part des écoliers", dit Negin Shiraghaei. "Ils descendent dans la rue... pour demander que le régime soit renversé".

Et puis il y a "azadi, azadi, azadi", qui signifie "liberté, liberté, liberté", que l'on entend souvent scandé par les étudiants dans les universités.

Dans les médias sociaux, les gens réclament la liberté de dire ce qu'ils veulent, de porter ce qu'ils veulent et d'écouter la musique qu'ils veulent, sans craindre d'être arrêtés pour cela.

Pour résumer les revendications des manifestants, Negin Shiraghaei déclare : "Il s'agit essentiellement de droits humains. Ce qu'ils chantent dans les rues, c'est la liberté, les droits des femmes et le renversement du gouvernement."

Chanson virale de protestation

Un fil Twitter partageant les raisons personnelles des Iraniens pour soutenir les protestations est récemment devenu viral. Chaque tweet commençait par "Pour...", par exemple : "Pour mes rêves", "Pour l'égalité", "Pour une vie normale".

Un jeune chanteur iranien relativement inconnu, Shervin Hajipour, s'est inspiré de ce fil et en a tiré une chanson. Les paroles sont une compilation de tweets.

Elle a trouvé un écho auprès de millions d'Iraniens, et a obtenu plus de 40 millions de vues sur Instagram dans les 48 heures qui ont suivi sa sortie. "Qu'un chanteur inconnu obtienne autant de vues sur Instagram, c'est du jamais vu", déclare Taraneh Stone, journaliste spécialiste des médias sociaux à BBC Perse.

Shervin Hajipour a été arrêté par les autorités peu après, et la chanson a été retirée de son profil. Il a maintenant été libéré.

Une jeune génération frustrée

La plupart des manifestants dans les rues sont jeunes, certains sont encore au lycée.

"Les universités de tout le pays sont perturbées, les cours sont interrompus, les étudiants disent qu'ils ne retourneront pas en classe tant que leurs camarades ne seront pas libres", explique Negin Shiraghaei.

Cette situation survient à un moment où cette génération se sent particulièrement frustrée. La corruption systématique de l'élite politique iranienne, la pauvreté croissante avec un taux d'inflation de plus de 50 % et l'absence de liberté sociale et politique leur donnent un sentiment de désespoir.

Pour la première fois depuis la révolution islamique de 1979 - lorsque la monarchie a été renversée et remplacée par la République islamique telle que nous la connaissons - les manifestations rassemblent des personnes issues de milieux économiques différents.

Elles se déroulent dans des quartiers de la classe moyenne et de la classe ouvrière - des quartiers aisés de la capitale Téhéran aux régions les plus pauvres du pays, comme le Baluchestan, dans le sud-est, à environ 1 200 km de Téhéran.

Des personnes d'origines ethniques très diverses participent également à la manifestation.

"La mauvaise gestion du pays dure depuis quatre décennies... Cette situation, associée à la corruption systématique dans le pays et aux sanctions [internationales], s'est fait sentir à tous les niveaux de la société", explique Negin Shiraghaei.

La diversité des manifestants a ajouté à l'éventail des griefs - de la flambée des prix et du chômage élevé à la corruption et à la répression politique.

Manifestations précédentes

Il s'agit du plus long mouvement de protestation continu en Iran depuis la révolution de 1979.

Les protestations précédentes - concernant des élections frauduleuses en 2009, la mauvaise gestion économique en 2017 et, plus récemment, la hausse des prix du carburant en 2019 - ont été impitoyablement réprimées par les forces de sécurité iraniennes.

La réponse des autorités à celle-ci aussi a été prévisible - des dizaines de personnes ont été tuées et des centaines arrêtées. Il y a eu des coupures répétées d'Internet pour empêcher les gens de poster des vidéos et des photos en ligne.

Et pourtant, les manifestations se poursuivent. Peuvent-elles changer quelque chose ? "Je pense que oui, affirme Negin Shiraghaei. "Lorsque les femmes comprennent leurs propres droits, et qu'elles les enseignent à leurs enfants, ce changement est inévitable."