Actualités of Wednesday, 24 December 2025

Source: www.camerounweb.com

MAURICE KAMTO : le silence stratégique qui intrigue l'opposition camerounaise

Maurice Kamto Maurice Kamto

Jeune Afrique analyse les raisons du mutisme prolongé du leader du MRC depuis la présidentielle d'octobre



Deux mois de silence radio. Depuis le 20 octobre, Maurice Kamto s'était fait remarquablement discret, n'émergeant de son mutisme que pour le décès de son ex-allié Anicet Ekane. Dans une enquête exclusive publiée ce lundi, Jeune Afrique décrypte cette stratégie de silence qui a intrigué observateurs et militants, révélant comment ce retrait calculé a finalement servi les intérêts du leader du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) dans sa reconquête du pouvoir partisan.


La première révélation de l'enquête de Jeune Afrique concerne la durée exceptionnelle de ce silence. "L'opposant devrait ainsi mettre fin au long silence qu'il s'était imposé depuis le 20 octobre", écrit le magazine, soulignant le caractère délibéré et prolongé de ce retrait médiatique. Un silence d'autant plus remarquable qu'il intervient dans un contexte politique bouillonnant, marqué par la contestation des résultats de la présidentielle et l'exil d'Issa Tchiroma Bakary.


Jeune Afrique note qu'une seule exception a interrompu ce mutisme : le décès d'Anicet Ekane. "Il n'avait rompu [son silence] qu'avec le décès de son ex-allié Anicet Ekane", précise le magazine. Cette sortie ponctuelle pour rendre hommage à une figure majeure de l'opposition camerounaise était évidemment incontournable, mais elle ne constituait pas un véritable retour sur la scène politique.


Bien que Jeune Afrique ne livre pas explicitement les motivations de ce silence prolongé, l'enquête du magazine permet d'en reconstituer les contours stratégiques. Le contexte révélé par Jeune Afrique est celui d'un homme qui a pris un pari risqué lors de la présidentielle en quittant son propre parti pour se rallier au Manidem d'Anicet Ekane, et qui a vu ce pari échouer avec la défaite électorale et le décès ultérieur d'Ekane.


Dans ce contexte, rapporte Jeune Afrique, Maurice Kamto devait gérer un double défi : reconquérir son parti après l'avoir quitté, et le faire sans paraître opportuniste ou défaitiste. Le silence apparaît alors comme une stratégie d'attente, permettant de laisser ses lieutenants préparer le terrain pour son retour tout en évitant de devoir commenter publiquement l'échec de son alliance avec Ekane.


L'un des aspects les plus fascinants révélés par Jeune Afrique concerne l'activité intense du MRC pendant le silence de son leader. "Mais la machine du parti, elle, n'a pas attendu pour se mettre en branle", souligne le magazine, décrivant comment l'appareil partisan a fonctionné à plein régime malgré l'absence médiatique de Kamto.


Jeune Afrique révèle que pendant que Maurice Kamto gardait le silence, ses fidèles menaient une bataille féroce contre les dissidents internes. Le trésorier national Alain Fogué accusait Okala Ebode de "haute trahison", le comité national de médiation et d'arbitrage orchestrait son exclusion, et Mamadou Mota, président par intérim, tentait des médiations de dernière chance. Tout cela sans un mot public de Kamto lui-même.

Cette division du travail, que Jeune Afrique met en lumière sans la qualifier explicitement, suggère une stratégie bien rodée : laisser les lieutenants faire le sale travail de la purge interne pendant que le leader préserve son image en restant au-dessus de la mêlée.


L'enquête de Jeune Afrique révèle indirectement un autre avantage de ce silence stratégique : il a permis à Maurice Kamto d'échapper aux questions embarrassantes sur son parcours récent. Comment justifier sa démission du MRC le 17 juillet ? Comment expliquer l'échec de son alliance avec Anicet Ekane ? Comment répondre aux accusations de ceux qui voient dans son retour un simple opportunisme ?

Le magazine rapporte que "Maurice Kamto ne s'était jamais exprimé sur cette opposition naissante" menée par Okala Ebode. En refusant d'entrer dans le débat, Kamto a évité de devoir répondre aux arguments juridiques solides des dissidents concernant les statuts du parti et la condition de trois années de militantisme ininterrompu.

Jeune Afrique révèle ainsi, en creux, une stratégie du silence comme esquive : ne pas répondre aux critiques, c'est aussi ne pas leur donner d'importance, et laisser l'appareil du parti gérer les contestataires par des moyens internes plutôt que par un débat public.


Dans son enquête, Jeune Afrique rapporte les propos du président par intérim Mamadou Mota lors de la convention du 21 décembre, qui offrent un éclairage indirect sur cette période de silence. Mota "s'est satisfait de la 'constance, la régularité et le sérieux' avec lequel le parti a poursuivi ses activités durant cette période de transition", révèle le magazine.

Cette formulation, rapportée par Jeune Afrique, est particulièrement intéressante. Elle suggère que le silence de Kamto n'a pas paralysé le parti, bien au contraire. Le MRC a continué de fonctionner "avec constance, régularité et sérieux", preuve que l'absence médiatique du leader n'équivalait pas à une absence organisationnelle.


Jeune Afrique révèle les conditions dans lesquelles Maurice Kamto s'apprête à rompre ce long silence. La convention extraordinaire du 21 décembre, tenue discrètement en visioconférence pour échapper à la surveillance des autorités, a permis sa réélection triomphale avec 95,44 % des suffrages.
Le magazine souligne que cette convention n'avait "pas été publiquement annoncée", témoignant d'une volonté de contrôler totalement le narratif du retour. En choisissant le moment et les conditions de sa réapparition, Kamto maximise l'impact de sa rupture de silence tout en minimisant les risques d'interférences, qu'elles viennent des autorités ou des dissidents internes.


Jeune Afrique révèle les raisons conjoncturelles qui rendent le retour de Maurice Kamto à la fois nécessaire et opportun. "Le retour de Kamto intervient dans un contexte marqué par la préparation des législatives et municipales prévues au mois de mai", souligne le magazine. C'est donc l'imminence d'une échéance électorale cruciale qui met fin au silence stratégique.
Plus significatif encore, Jeune Afrique dévoile que "le leader du MRC pourrait ainsi reprendre le leadership de l'opposition laissé vacant par l'opposant Issa Tchiroma Bakary (...) depuis en exil en Gambie". Le magazine met ainsi en lumière l'opportunité politique créée par l'exil de Tchiroma Bakary : un vide à la tête de l'opposition que Kamto peut occuper en reprenant la parole.


L'enquête de Jeune Afrique révèle que le silence de Kamto a aussi permis de laisser passer les "turbulences" internes sans qu'il ait à y répondre directement. Le magazine rapporte que Mamadou Mota "est également revenu sur les turbulences qu'a traversées son organisation, notamment la controverse autour du retour de Maurice Kamto".

Ces turbulences, détaillées par Jeune Afrique, incluent la contestation menée par Okala Ebode et l'aile dissidente, l'interdiction de la première convention par les autorités le 29 novembre, et les accusations croisées de trahison au sein du parti. En restant silencieux, Kamto a laissé ces tempêtes se déchaîner et se résorber sans avoir à prendre position publiquement, préservant ainsi son image d'unificateur au-dessus des querelles partisanes.


Les révélations de Jeune Afrique permettent de décrypter une méthode politique subtile. Le silence prolongé de Maurice Kamto n'était ni une fuite ni une absence, mais une stratégie mûrement réfléchie qui lui a permis de :


Laisser retomber la poussière après l'échec de son alliance avec Anicet Ekane
Permettre à ses fidèles de nettoyer les rangs du parti sans se salir les mains
Échapper aux questions embarrassantes sur sa démission et son retour
Choisir le moment optimal pour réapparaître, avec les législatives en ligne de mire

Se positionner pour reprendre le leadership de l'opposition dans le vide créé par l'exil de Tchiroma Bakary

Le magazine ne le formule pas ainsi, mais son enquête dessine le portrait d'un homme politique calculateur qui sait utiliser le silence comme une arme stratégique. Dans un paysage politique camerounais souvent marqué par l'agitation verbale et les déclarations intempestives, Maurice Kamto a choisi la voie inverse : celle du silence qui en dit long.

Jeune Afrique conclut son enquête en annonçant que "l'opposant devrait ainsi mettre fin au long silence qu'il s'était imposé depuis le 20 octobre". Le verbe "devoir" employé par le magazine suggère une nécessité : avec sa réélection à la tête du MRC et les législatives qui approchent, Kamto ne peut plus rester silencieux.

La question qui reste ouverte, et que Jeune Afrique ne tranche pas, est de savoir quel sera le contenu de cette parole retrouvée. Kamto parlera-t-il en leader d'opposition radical dénonçant le régime Biya ? En stratège électoral se préparant pour les législatives ? En rassembleur tentant de réunifier une opposition fragmentée par l'exil de Tchiroma Bakary et les divisions internes ?
Une chose est certaine, révèle l'enquête de Jeune Afrique : après deux mois de silence calculé, Maurice Kamto revient sur la scène politique camerounaise avec un parti purgé de ses dissidents, une légitimité interne renouvelée par un plébiscite à 95%, et un leadership de l'opposition à portée de main. Le silence aura finalement été payant. Reste maintenant à voir si la parole retrouvée saura mobiliser au-delà du cercle des fidèles du MRC.