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Actualités of Thursday, 10 November 2022

Source: La Nouvelle du 10-11-2022

Ligne 94 : la course a enfin commencé

Une véritable affaire de petits copains et coquins. Une véritable affaire de petits copains et coquins.

C’est à cette conclusion catastrophe à laquelle l’audit ouverte sur ce chapitre budgétaire logé au ministère de l’Economie, du Plan et de l’Aménagement du Territoire devrait aboutir. Ceci, au regard des indiscrétions qui émanent des premières investigations du CONSUPE. Une véritable affaire de petits copains et coquins.

C’est le moins qu’on puisse dire. A l’aube de ses 40 ans d’exercice du pouvoir, le président Paul Biya est en train de faire face à l’un des plus gros scandales de son magistère, à savoir la gestion calamiteuse du chapitre 94 logé au ministère de l’Economie, du Plan et de l’Aménagement du territoire (MINEPAT). L’on peut dire sans risque de se tromper qu’en ordonnant lui-même, une enquête administrative sur ce chapitre 94 qui a son pendant au ministère des Finances qui s’appelle « chapitre 65 », personne ne sait, à date, l’immensité des dégâts q u e cette bombe à fragmentation va causer dans le landernau social camerounais . En effet , c et te vaste opération, considérée comme la plus importante jamais conduite dans le pays, risque de faire plus de dégâts qu’on l’imagine.

12 exercices ( 2 010-2021) à auditer, cela n’est pas une sinécure, tant il est vrai que l’audit porte sur des dépenses suspicieuses, en raison de l’op a c i té qui a conduit à la gestion des fortes sommes d’argent dégagées sur ce chapitre. On parle de près de 300 milliards de Fcfa croqués. Du coup, l’on est en droit de s’interroger sur les sommes d’argent en cause, la nature des dépenses et la qualité des bénéficiaires. Et c’est là toute la difficulté de l’opération.

Sauf que, ceux qui se sentent mouillés dans ce scandale n’ont de cesse de multiplier les stratagèmes pour conduire tout le monde sur de fausses pistes glissantes afin de créer l’amalgame dans l’opinion. Ce qui semble être une stratégie perdante d’office puisque, cette opinion est déjà au courant des faits et gestes de ceux qui ont pris en otage ce pan important de la vie publique nationale. Au MINEPAT par exemple où nous sommes allés tendre nos longues oreilles, les vérificateurs venus tout droit du contrôle supérieur de l’Etat ont pour mission principale d’aller fouiner en priorité à la direction générale de l’Economie et de la Programmation des investissements publics (DGEPIP), notamment à travers la direction de la Programmation des Investissements publics (DPIP) qui est chargée « de la programmation, du suivi et du contrôle de l’exécution des investissements publics » et « du suivi des projets d’investissement public non programmés », selon le décret du 4 juillet 2008 portant organisation du MINEPAT. A ce titre, la DPIP a traité les dossiers de plus de 1800 milliards de Fcfa de dépenses exécutées sur la ligne 94 au cours des 12 derniers exercices.

Du coup, il n’est pas difficile de remonter la chaine des décideurs du MINEPAT qui ont géré ce chapitre. Complices ou acteurs principaux, les regards de nombreux observateurs restent tournés vers les directeurs généraux de l’Economie et de la Programmation des investissements publics qui s’y sont succédé à savoir Isaac Tamba et Dieudonné Bondoma Yokono et les directeurs de la Programmation des Investissements publics, Alain Cyrille Abba Mvondo, Angos Zangue, Ledoux Kue et un certain Jean Sylvain Mvondo.

Promoteurs Privés

Seulement, la pomme de discorde réside à la question de savoir qui a droit ou qui peut être bénéficiaire des fonds logés dans ce chapitre 94 ? Il ne fait donc plus mystère que des centaines de milliards de Fcfa sont ainsi distribués chaque années à des opérateurs économiques, ce qui est normal. Sauf qu’une caste bien connue d'opérateurs économiques véreux, s’y sont glissés, se sont durablement installés, se taillant même la part du lion, grâce à leurs accointances avec les gestionnaires malhonnêtes de ladite ligne pour faire fructifier des affaires purement privées. Exit les fonds généralement alloués pour des transferts aux établissements publics et autres organismes de l’Etat ; pour la sécurité ; pour les communes ; pour les ONG et autres associations ; pour des aides aux ménages ; pour les hospitalisations et les évacuations sanitaires ; pour le marquage des produits pétroliers (Hydrac/Authentix) ; pour les microprojets des députés ; pour les partis politiques…

Tout ce beau monde qui aurait eu droit automatiquement aux interventions de ce chapitre souffre d’ailleurs, des mois durant, pour rentrer en possession de leurs dus alors que les bandits à col blanc, activent leurs réseaux pour plonger leurs longues mains dans la caisse, sans autre forme de procès, en narguant les autres Camerounais par leur train de vie ostentatoire. En attendant que ces derniers rendent gorge avec leurs parrains, nul besoin de s’agiter dans tous les sens pour faire diversion comme le démontrait encore, il y a quelques mois, le ministre des Finances à l’Assemblée nationale en décembre 2021, pour justifier l’opacité qui entoure la gestion de ces chapitres. « Certaines informations » liées à ces dépenses « revêtent un caractère extrêmement confidentiel », indiquait-il. Avant de poursuivre : « il peut arriver que ces chapitres de dépenses communes financent des opérations qui ont trait à la sécurité nationale.

Ces bénéficiaires-là, je n’ai pas forcément envie que tout le monde sache que tel bénéficiaire a eu ceci ». Drôle de pirouette. Pourtant, à la brigade de contrôle du MINEPAT, on affirme que nombre de bénéficiaires, recrutés dans toute la sphère économique et sociale du pays, ne respectent pas les cahiers de charges adossés à ces subventions. Le constat est fait par un inspecteur d’Etat en poste au CONSUPE (sous anonymat) qui a participé à l’enquête sur le financement par le Trésor public des projets appartenant à des promoteurs privés. Ce que corrobore un homme politique de la place sur la chaine de télévision privée Info TV, Saint Eloi Bidoung. Selon l'ancien cadre du RDPC, Jean Pierre Amougou Belinga a perçu du financement de la ligne 94 et n'est pas le seul. La plus grande majorité des opérateurs économiques issus des 10 régions du Cameroun, ont aussi pris des portions de ce fonds, a-t-il révélé. Le jour du jugement donc, que tous ceux qui ont piqué dans la caisse répondent de leurs actes.