Au 31 décembre 2016, l’encours global des créances en souffrance auprès de la clientèle non financière des banques commerciales camerounaises, était de 489 milliards de FCFA, a appris l’Agence Ecofin de sources proches du secteur. C’est le plus haut niveau de créances en souffrance depuis 2009, lorsqu’elles étaient de seulement 189 milliards de FCFA.
Comparé à la situation de 2015, cela représente une augmentation de 19,2%. C’est la deuxième plus forte progression des créances en souffrances d’une année à l’autre, depuis 2010, lorsque cet indicateur avait affiché une progression de 29,8%. La forte dégradation de la situation en 2016 semble avoir été poussée par le niveau exceptionnel des créances en souffrance de la Banque Internationale du Cameroun pour l’Epargne et le Crédit (BICEC)
La BICEC en tête des banques exposées
A elle seule, cette filiale du deuxième groupe bancaire le plus important de France (BPCE), cumulait au 31 décembre 2016, près 120 milliards de FCFA de créances en souffrance. Une situation en hausse de 67%, en comparaison du montant de près de 72 milliards de FCFA de créances en souffrance déclarées en 2015. Il n’est pas exclu que cette situation ait un rapport avec des prêts frauduleux découverts l’année dernière et qui font aujourd’hui l’objet d’une procédure devant la justice.
Dans la classification des créances en souffrance en zone CEMAC, à laquelle appartient le Cameroun, il existe dans la catégorie des créances en souffrances, une sous-catégorie dite des créances impayées, c’est-à-dire échues et dont le règlement devenu obligatoire n’est toujours pas exécuté. Son encours était de près de 83 milliards de FCFA soit près de 4 fois son niveau de 2009.
A la fin 2016, Afriland First Bank tenait le haut du classement en termes de prêts non remboursés par la clientèle. Elle est suivie d’UBA Cameroon (21,6 milliards de FCFA) et de la BICEC (environs 18 milliards de FCFA).
Dans ce contexte de hausse des risques, les banques se sont montrées moins ouvertes au crédit. Même si l’encours global des prêts accordés à la clientèle a atteint les 3600 milliards de FCFA au terme de l’année 2016, ce niveau a été marqué par une hausse de 6% comparé à celui de 2015, soit la deuxième plus faible progression de crédit bancaire à l’économie du Cameroun.
L’action du gouvernement est attendue
Le gouvernement qui est actionnaire d’au moins 4 des 14 banques du pays est naturellement au courant de ces enjeux. Dans le cadre de son programme économique avec le FMI, il s’est engagé sur un plan de restauration des équilibres dans le système financier. Un engagement qui porte sur le paiement des arriérés, le rachat de certaines créances douteuses à hauteur de près de 90 milliards de FCFA et le renforcement de la régulation dans la gestion des risques.
Questionné par Ecofin sur le sujet, le Secrétaire général du ministère des finances, lors d’un point de presse gouvernemental, avait fait savoir qu’un premier deadline était fixé à la fin septembre. Il était notamment question par le gouvernement, de l’émission d’un emprunt obligataire qui aiderait à financer cette opération de restructuration du secteur financier. Depuis aucun commentaire public n’a été fait sur le sujet.
Une conséquence de la situation actuelle sur le marché du crédit, c’est que les banques commerciales répercutent cette hausse du coût du risque sur les clients individuels et entreprises. Malgré un taux d’inflation est assez bas et anticipé à 0,7% pour 2017, et des taux d’intérêt créditeurs de comptes bancaires autour d'une moyenne de 3%, ces sociétés financières, continuent de prêter aux individus à des taux de plus de 10% en moyenne, et en contrepartie de solides garanties.
Des experts estiment que davantage de régulations contraignantes en matière de crédit ne résoudront pas vraiment le problème des créances en souffrance. Exiger plus de garanties pour l’obtention de prêts pourrait selon eux, négativement impacter l’inclusion financière et alourdir les charges financières des entreprises individuelles, grosses clientes des banques camerounaises.
Une solution pourrait se trouver dans la mise en place d’un Crédit bureau. La question a plusieurs fois été évoquée, mais les avancées ne sont pas communiquées au public. Tout récemment, l'annonce d'un marché lancé par la Banque centrale (BEAC) a circulé, mais aucune confirmation officielle n'est survenue depuis lors.