Actualités of Monday, 27 October 2025
Source: www.camerounweb.com
Présidentielle au Cameroun : Clément Atangana et le Conseil constitutionnel, arbitres décriés d'une élection sous haute tension
Alors que le Conseil constitutionnel s'apprête à proclamer ce lundi 27 octobre les résultats de la présidentielle du 12 octobre, son président Clément Atangana et ses dix collègues font face à une vague de contestations sans précédent. L'opposition dénonce une institution acquise au pouvoir.
C'est dans un climat de défiance généralisée que le Conseil constitutionnel du Cameroun doit proclamer, ce lundi, les résultats définitifs de l'élection présidentielle du 12 octobre dernier. À sa tête, Clément Atangana, magistrat de 84 ans et président de l'institution depuis 2018, concentre l'essentiel des critiques de l'opposition et de la société civile.
Selon les résultats provisoires annoncés par Elecam, l'organe en charge de l'organisation du scrutin, le président sortant Paul Biya aurait remporté l'élection avec 53,66 % des voix. Mais c'est la candidature d'Issa Tchiroma, crédité d'un score nettement inférieur, qui cristallise aujourd'hui la polémique. Ses partisans dénoncent un "vol électoral" orchestré par une institution qu'ils jugent inféodée au pouvoir.
Composé de onze membres nommés par décret présidentiel, le Conseil constitutionnel camerounais peine à convaincre de son impartialité. Parmi ses membres, six disposent d'une formation juridique, dont quatre anciens magistrats. Seul le professeur Charles-Étienne Lekene Donfack, 76 ans et ancien ministre du Développement urbain, possède une expertise reconnue en droit constitutionnel.
Aux côtés de Clément Atangana, on retrouve des figures emblématiques de l'appareil judiciaire et administratif camerounais : Bah Oumarou Sanda, 85 ans, ancien procureur général et ambassadeur ; Florence Rita Arrey, 77 ans, ex-juge au Tribunal pénal international pour le Rwanda ; ou encore Adolphe Minkoa She, 70 ans, ancien recteur de l'Université de Yaoundé II.
Les cinq membres non-juristes – parmi lesquels Ahmadou Tidjani, ancien gouverneur, Jean-Baptiste Baskouda, ex-secrétaire d'État, et l'anthropologue Paul Nchoji Nkwi, 85 ans – complètent cette institution que beaucoup jugent vieillissante et déconnectée des aspirations démocratiques de la population.
Figure centrale de cette controverse, Clément Atangana incarne pour l'opposition la continuité d'un système verrouillé. Magistrat à la retraite depuis 2014, il a été propulsé à la présidence du Conseil constitutionnel en 2018, après une longue carrière au sein de l'appareil judiciaire camerounais. Ses détracteurs l'accusent de n'avoir jamais fait preuve d'indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif.
"Comment peut-on confier l'arbitrage d'une élection présidentielle à une institution dont tous les membres ont été nommés par le président sortant lui-même ?", s'interroge un observateur de la société civile camerounaise, sous couvert d'anonymat. "Le résultat est joué d'avance."
L'annonce des résultats définitifs, prévue ce lundi, intervient dans un contexte explosif. Les équipes d'Issa Tchiroma, qui affirment avoir remporté le scrutin, multiplient les appels à la mobilisation et dénoncent des irrégularités massives lors du dépouillement. Des manifestations spontanées ont déjà éclaté dans plusieurs villes du pays, réprimées par les forces de l'ordre.
Pour l'opposition, la composition même du Conseil constitutionnel invalide par avance toute décision qu'il pourrait prendre. "Ces onze personnes n'ont ni la légitimité ni la crédibilité nécessaires pour proclamer un résultat qui engagera l'avenir de millions de Camerounais", martèle un porte-parole de la coalition d'Issa Tchiroma.
La moyenne d'âge élevée des membres du Conseil – 73 ans – est également pointée du doigt, symbolisant selon ses critiques une gérontocratie dépassée par les évolutions du pays.
Au-delà de la proclamation des résultats, c'est la crédibilité de l'ensemble du processus électoral qui est en jeu. Le Cameroun, dirigé depuis 1982 par Paul Biya, traverse une période de tensions politiques et sociales intenses. La gestion de cette crise post-électorale par le Conseil constitutionnel sera scrutée de près par la communauté internationale.
Pendant ce temps, à Yaoundé, le compte à rebours est lancé. Clément Atangana et ses dix collègues s'apprêtent à prendre la parole devant la nation. Leur décision, quelle qu'elle soit, marquera durablement l'histoire politique du Cameroun.